« …là où finit le mot, la musique commence. Ou bien, c’est vrai, la peinture. Ou bien tout simplement le silence… »
Evgueni Vodolazkine
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1988 sera une année charnière pour le narrateur. La journée, il est comptable, compte, ajoute, soustrait, vérifie et revérifie chaque opération. Le soir, il rejoint quelques amis dans un bar à l’ancienne tenu par Lisa dont il est secrètement amoureux. Puis il finit la nuit seul dans son appartement : « La planète interdite, c’est un bon résumé de ma vie. Le tout est d’en avoir conscience et de parvenir à s’en satisfaire. ». Rien d’autre (« La routine me sert de carapace. »). Enfin, presque, sinon une cicatrice, des écharpes et un poème qui l’accompagnent depuis l’enfance. Ce sont ses secrets. Mais cette année, enfin, peut-être pourra-t-il en parler, les partager. En effet, une fissure, la carapace s’effrite et il commence timidement de se confier à ses amis qui l’écoutent avec attention et le découvrent enfin. Puis d’autres personnes viennent chaque soir écouter et découvrir la suite de son histoire et de son grand-père adoré Pierre-Jean. Et ils sont de plus en plus nombreux. Le ton est parfois badin mais le lecteur ressent toujours un poids et une profondeur derrière cette légèreté, l’atmosphère est souvent digne de Jean-Pierre Jeunet voire Boris Vian, une poésie folle, le personnage et son appréhension de la vie étant si atypiques. La fin sera bouleversante. Une belle réussite que ce premier roman.
Premier roman
Thème(s) : Littérature française
La fin du monde est proche, la fin d’un monde, excès de chaleur entraînant assèchement et destruction, bouleversement des vies, il est temps de payer l’addition, « Les disettes et les épidémies sont arrivées chez nous, juste retour de balancier. ». La végétation disparaît ou au contraire envahit l’espace. La plupart ont fui, quelques-uns sont restés et il faut bien survivre. Environnement glauque, pillages, vols, les bandes ne font que passer, la peur demeure. Antoine est resté et déambule au milieu de ce monde avec son appareil photo. Il s’est refusé à abandonner sa fille Chloé qui, suite à un traumatisme, vit dans un établissement pour enfants malades depuis l’âge de huit ans. Elle a maintenant dix-sept et a peu connu le monde extérieur. Elle va l’affronter. Alors le père et la fille vont se retrouver et prendre ensemble la route (cela ne vous rappelle-t-il pas quelque chose ?) vers le port de Saint-Nazaire, un voyage dans un environnement hostile où Antoine découvre sa fille, la regarde s’éveiller, grandir, fixe ces instants sur la pellicule comme la mémoire d’un ancien monde. Paradoxalement, il revient vers la vie et abandonne progressivement la peur. Un chemin semé d’embûches mais qui renoue les liens entre un père et une fille en les menant vers la lumière et un nouveau monde. Une belle piqûre de rappel, noire mais pas désespérée !
Ecouter la lecture de la première page de "Nous entrerons dans la lumière"Thème(s) : Littérature française
Les Etats-Unis et l’Irak, deux pays en guerre, deux pays qui s’affrontent. Mais derrière ces pays, il y a des hommes dont on oublie souvent de parler. Ces hommes sont aussi en guerre, mais souvent, ils subissent, quelque soit leurs idées initiales face à la guerre et à « l’ennemi », ils sont fréquemment contraints à l’engagement, la haine, la colère et le désir de vengeance font leur nid, progressivement ou violemment. Ainsi, les deux mondes à échelle humaine ne sont pas si éloignés et pourtant la guerre semble sans fin… Louise Caron nous parle pour cela d’une histoire dans l’Histoire (« L’histoire commence là, petite histoire enracinée dans la grande, celle dont les armes décident, qui s’écrit en majuscule avec le sang des victimes lavé aux larmes des vaincus. ») et nous propose de rencontrer Naïm, un artiste pacifique qui s’engage après la mort de son père, de Sohrab son amie qui décide de le suivre et de Niko Barnes un Américain qui s’interroge sur les fondements de son engagement. Trois destins pris dans le tourbillon de la guerre, impuissants et ballottés par les évènements, trois vies en dérive, inexorablement. Malgré la violence, les horreurs et la dureté des évènements, avec le destin de ses personnages émouvants, Louise Caron, sans aucun parti pris, réussit le tour de force de happer le lecteur.
« Avec la force, on n’arrête pas le mal, on le perpétue. »
Thème(s) : Littérature française
Jean et sa famille, les Jehan, sont associés aux Passereaux, une ferme dans les années 50 non loin de Pau, un peu à l’écart du village voisin. Enfant, Jean est bon élève, adore écrire et raconter des histoires (ces derniers instants seront consacrés à l’écriture), notamment à sa sœur Paule, un peu éloignée de tous et du quotidien de la ferme. Le village regarde avec quelques craintes cette ferme et son patriarche, les relations sont tendues, sans que Jean n’en connaisse les raisons. Il préfère s’occuper d’Odette (« Odette n’avait pas de défaut, sauf peut-être son silence et sa solitude. ») avec qui il se sent bien. Son instituteur lui conseille de continuer ses études, il en a les capacités. Mais aux Passereaux, on ne peut dévier aisément du chemin tracé par la famille. Il espèrera longtemps convaincre les parents, le mariage avec Odette lui sera refusé, il fuira, rejoindra l’Algérie, puis reviendra, retour incontournable, on ne quitte les Passereaux… Trajectoire tragique d’une vie de solitude, d’incompréhension, de douleur, de folie, un cri déchirant à la Münch, aussi terrible que stupéfiant. Un premier roman émouvant particulièrement réussi qu’on lit d’une traite jusqu’à sa fin très singulière et inoubliable.
Premier roman
Cathy Jurado-Lécina nous rendra visite le vendredi 15 novembre 2015.
Thème(s) : Littérature française
Depuis cinq ans, un jeune homme erre. Il revient enfin dans la ville de son enfance, la ville où il a rencontré son meilleur ami, la ville où il l’a tué, il y a cinq ans. Il a appris que les tours où habitait son ami vont être détruites. Irrésistiblement attiré, il sent que c’est le moment. Il se remémore son adolescence et cette histoire tragique d’amitié. Lui ne réclamait qu’un peu d’attention, l’autre n’aspirait qu’à sa liberté. Il retrouve le fleuve, si proche de lui, pouvant procurer aussi bien sérénité que violence. Il vient chercher un apaisement, un nouveau départ, et on espère que l'effondrement de ces immeubles symbole de son passé suscitera une renaissance. Une belle écriture pour l’histoire dure et noire d’un ado qui s’est toujours senti seul et isolé, qui avait si peur de ne pas trouver sa place, que rien ne change et de reproduire la vie de ses parents.
Ecouter la lecture de la première page de "Le jour de l'effondrement"Thème(s) : Littérature française
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