« La mort ne commence rien, à part ce sentiment de perte qui habite nos insomnies. »
Lyonel Trouillot
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La narratrice d’une quarantaine d’années vit depuis six mois dans le Cotentin à la Hague. Professeur de biologie, elle participe à un programme du Centre Ornithologique de Caen mais vient aussi oublier son passé et peut-être en guérir. Peu à peu, au rythme des marées (ou des déferlantes), Claudie Gallay installe magistralement une atmosphère singulière à mesure que la narratrice découvre les habitants de ce bourg. Solitaire, elle observe la mer et fait corps avec elle, lui crie son désespoir et sa douleur. Pourtant les habitants l'accepteront et elle découvrira les histoires enfouies et tues du village ; étrangère au village, elle s’intéresse malgré tout à tous et à leurs trajectoires. Elle loge dans une maison balayée par le vent et les embruns où vit également Raphaël sculpteur insatiable et passionné qui regarde avec circonspection le monde et en propose sa vision d'artiste. Il vit une relation privilégiée avec sa soeur Morgane, belle femme de 30 ans admirée de tous les hommes. Autour d’eux s’animent une série de personnages (« A la Hague, les vieux et les arbres se ressemblent pareillement torturés et silencieux ») comme Nan une vieille folle habillée de noir qui a vu disparaître toute sa famille en mer ou La Cigogne une petite fille décharnée au quotidien difficile mais qui continue de rêver… Jusqu’au jour où Lambert arrive au village pour vendre la maison où il venait en vacances avec ses parents. Le passé va ressurgir… Nan prendra Lambert pour un autre, un certain Michel. Progressivement se révèleront les liens exacts qui unissent tragiquement Lambert à ce village et peu à peu, le miroir se brisera et chacun aura son rôle ou sa vision des évènements… Un grand roman fait de rancunes, de haine, de mensonges, de non-dits où la mer est omniprésente (« Ces vagues les déferlantes. Je les ai aimées. Elles m’ont fait peur »), la mer cruelle qui broie et détruit mais qui accueille aussi les passagers éphémères que sont les hommes et les oiseaux.
« C’est son rêve et les gens qui ont des rêves ne risquent pas grand chose. Et ceux qui n’en ont pas, ils risquent quoi ? Je ne sais pas… mais c’est moins facile pour eux »
"Des oiseaux par milliers volent vers les feux
Par milliers ils tombent par milliers ils se cognent
Par milliers aveuglés par milliers assommés
Par milliers ils meurent.
Le gardien ne peut supporter des choses pareilles
Les oiseaux ils les aiment trop
Alors il dit tant pis je m'en fous
Et il éteint tout..."
Jacques Prévert, le gardien de phare aime trop les oiseaux
Fiche #368
Thème(s) : Littérature française