« Il voulait dire, je suppose, que plus les gens accaparaient le pouvoir, plus ils méprisaient ce qui leur avait permis d’y accéder. »
Colum McCan

Les comptes-rendus-avis de lecture de la librairie Vaux Livres

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Sophie Daull

Sophie DAULL

Au grand lavoir
Philippe Rey

1 | 158 pages | 02-08-2018 | 16€

L’homme est jardinier à la ville de Nogent-le-Rotrou. Anonyme, solitaire, son entourage ne connaît rien de lui, de son passé, une vie bien rangée, sans éclats. Jusqu’au jour où il apprend qu’une romancière viendra dans cinq jours dédicacer à la librairie de la ville son premier roman : il la reconnaît tristement, c’est la fille de la femme qu’il a tuée trente ans auparavant, meurtre pour lequel il a passé des années en prison. Le compte à rebours est lancé : immédiatement, même s’il redoute de la rencontrer, il sent qu’il ira vers elle, ultime punition, « heure des comptes », ou porte ouverte pour un retour à la vie, pour se poser les bonnes questions et peut-être trouver réponses : cinq jours de tension, mal-être, ambigüité... De son côté, la vie et la mort ont éprouvé la romancière, sa mère a donc été assassinée mais sa fille est également morte d’une maladie foudroyante après une erreur de diagnostic. Le récit alterne les souvenirs de l’un et l’autre au jour le jour. Tout est interrogations, tentatives d’explications et de pardon. Les deux situations sont-elles si différentes ? Où sont les barreaux des prisons de chacun, quelle est « la plante grimpante qui s’enroulera autour des barreaux de nos cages, prison ou chagrin, jusqu’à en fendre le mortier » ? Comment ont-ils pu survivre dans leur prison ? Serait-il possible qu’ils s’en évadent, seuls ou mutuellement ? « Au grand lavoir » propose un dialogue puissant et tendre qui interroge brillamment et subtilement sur notre capacité à pardonner, à se détacher sans oublier, et à continuer de vivre avec nos disparus et à côté des responsables.

« Alors j’irai au grand lavoir là-bas, où la mémoire se récure contre le granit rugueux, où la langue se rince au torrent qui mousse comme un savon d’encre, où la fiction fait Javel. Je regarderai l’eau crasseuse s’écouler dans une grande synovie de mots et je laisserai sécher les éclaboussures au soleil de leur consolation. Grande lessive. »

« Et l’amour brisé par une mort injuste n’est pas soluble dans la réparation par l’argent ou la prison. Il n’y a pas d’économie du pardon. »

Ecouter la lecture de la première page de "Au grand lavoir"

Fiche #2180
Thème(s) : Littérature française