« L’ami, c’est celui qui t’ouvre sa porte au milieu de la nuit sans te poser de questions. »
Sorj Chalandon
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De Beyrouth à Paris en passant par Nice, Frédéric Paulin, historien autant qu’écrivain, nous entraîne dans un conflit qui prend des allures de guerre mafieuse, sans qu’on puisse reprendre notre souffle. Nous sommes au Liban, terre d’accueil cosmopolite, pays de cocagne, béni par des Dieux divers jusqu’à ce que … On referme ce premier tome d’une trilogie attendue un peu sonné, avec dans les narines comme une odeur de poudre et de poussière mêlée à celle des Cedars que fument certains héros. Au pays du cèdre, il faut souvent alcool, drogue ou benzodiazépine pour tenir. Les parcours de femmes et d’hommes réels et fictifs s’entremêlent, s’entrechoquent. On pénètre l’intimité des séduisantes, puissantes et troubles Sandra et Zia. On se tourmente avec le diplomate Kellermann. On s’attache peut-être aux Nada père et fils, et même aux flics du SDECE ou des RG Caillaux et Dixneuf. Ils croisent les politiques français et libanais de l’époque. Pour ceux d’entre nous qui l’ont vécu, on entre avec un certain plaisir dans les secrets ( ?) de l’ascension de nos gouvernants, dans les combines de barbouzes ou autres agents, et aussi dans l’opposition UDR-RPR-PS des années Giscard-Chirac-Mitterrand. Dans ce Liban complexe, l’auteur nous mène dans les arcanes d’un système confessionnel et politique qui confine au gangstérisme. « Ad augusta per angusta » comme on disait au SDECE (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage)… Mais l’horreur des événements, bien réels, d’attentats en représailles, d’explosions en viols et en massacres, nous plonge aussi dans une noirceur plus douloureuse, qui fait écho à l’actualité du Moyen-Orient d’aujourd’hui. Ce tableau des années 1975-1983 est un texte sombre et brillant, passionnant, exigeant, édifiant et qui croira qu’il ne s’agit là que d’un roman noir et qu’il ne parle que du Liban ?
Christine J.
« Ce qu’il voit de son pays de cœur le dévaste. Il ne parvient pas à croire que les Libanais en soient arrivés là : que les pires atrocités en cachent de nouvelles, pires encore. Que des enlèvements succèdent à des exécutions, des massacres à des attentats, que la mort succède à la mort sans que cela émeuve une communauté internationale atone. Cela pourrait être une exacte définition de l’enfer.
Car ce qu’il voit du Liban est une chute dans l’horreur. »
« Oui, peut-être que pour les pays étrangers le Liban n’est qu’un moyen de renforcer leur puissance régionale. Peut-être que le Liban n’a pas d’autre intérêt pour ses puissants voisins que d’être un champ de bataille où régler leurs comptes. »
« Le vieil homme pense.
A moi tout seul, comme d’autres dans cette ville dévastée, dans ce pays meurtri, je suis le Liban.
Je suis le Liban qui vieillit, qui ne peut plus lutter contre le chaos et la destruction, la passion des hommes, leur folie, leur soif de vengeance. »
« Il aimerait croire qu’il appuie sur la détente et fait sauter la tête de la jeune fille parce qu’il n’est pas une bête féroce, seulement parce qu’il veut lui éviter de vivre après avoir vécu l’horreur.Mais il n’en est pas certain. »
Fiche #3240
Thème(s) : Littérature française
Le jour où Bruna hésite à suivre son amie pour une fête, elle ne sait pas que son destin et sa vie sont en train de se jouer. Elle décide finalement d’y aller et rencontre Frane. C’est le coup de foudre, ils sortent ensemble, ne se quittent plus et se marient rapidement alors que Frane, marin, doit s’embarquer pour naviguer pendant plusieurs mois. Le jeune couple s’est installée au deuxième étage de la maison des parents de Frane où sa mère, Anka, continue de régner et veille sur eux et particulièrement sur Bruna avec un œil critique et inquisiteur. Les journées s’enchaînent, « …une nouvelle journée, la même qu’aujourd’hui, la même qu’hier. » et Bruna se sent vite enfermée, prisonnière dans ce deuxième étage sans issue. Elle regarde depuis sa fenêtre les autres s'activer, mais n'a pas le sentiment de vivre. Cette sensation d'enfermement et d'isolement s'acccroît lorsque la santé d’Anka vient à décliner. Jusqu’au jour où, seconde réorientation de sa vie, en nettoyant la remise, elle trouve une vieille boîte contenant un poison mortel qui la mutera en « belle-fille fatale » et la mènera en prison pour une longue peine mais lui offrira une seconde chance en lui ouvrant les portes d’une seconde vie. Le récit nous offre le portrait d’une femme qui apprendra à se connaître, réussira à prendre en main sa vie, son destin et à retrouver sa liberté, un chemin douloureux puisqu’il passera par un meurtre et la case prison mais l’habileté de l’auteur nous fera faire connaissance pas à pas avec Bruna, tranquillement, sans jugement péremptoire et préconçu, nous apprendra à la connaître, puis à l’apprécier très progressivement et finalement à s’y attacher.
Ecouter la lecture de la première page de "La femme du deuxième étage"Fiche #2955
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Olivier Lanuzel
Sept ans que Marika a quitté Berlin pour la France et ses frères. Elle revient accompagnée par son fils Solal pour rencontrer pour la première fois son père Thomas, metteur en scène. Trois jours qui devaient être éclairés par cette rencontre mais trois jours qui vont s’obscurcir rapidement : Berlin va retrouver la cataclysme de son histoire sous une autre forme. A 600 km de là, un volcan éteint se réveille, réchauffe dangereusement l’atmosphère et libère une multitude de particules noires, polluantes et étouffantes. Dans le même temps, un tremblement de terre aussi soudain qu’inattendu sépare Berlin en deux, « la ville a mugi de douleur et s’est déchirée dans un cri dégueulasse, un cri de mort, grave, qui remonte du plus profond, du plus loin, du ventre de la terre. ». A cet instant, Solal et Thomas sont ensemble dans le métro. Thomas s’efface et n’aura de cesse que de sauver Solal et de le ramener vers la vie. Marika quant à elle se lance dans une course effrénée pour retrouver son fils et parcourt en tous sens la ville détruite, au cœur de la panique, de la fuite collective, de « l’encadrement » policier. Marika est une combative, elle montrera une énergie folle pour retrouver son fils. Astrid Monet traduit parfaitement la tension, parfois la terreur, l’état des lieux et l’effondrement de l’environnement sans oublier de nous faire partager les instants de tendresse entre Solal et ses parents comme les moments de solidarité entre ceux qui refusent de partir et de céder au chaos dans une ville marquée par l’Histoire.
Ecouter la lecture de la première page de "Soleil de cendres"Fiche #2595
Thème(s) : Littérature française