« … un des plaisirs de la lecture est la découverte, le hasard, le tâtonnement. Fréquente les librairies, lis quelques lignes, tu trouveras ta voie. Puis un livre conduis toujours à un autre livre, je ne sais pas pourquoi, c’est comme ça. »
Claude Bendel
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La mère de Lídia Jorge a décidé de rejoindre l’hôtel paradis, une maison de retraite. Pendant un an, elle enregistrera son journal et sa fille le reprend aujourd’hui. La vieille dame est handicapée, se déplace en fauteuil, ne peut écrire mais quel caractère (« Je ne devrais pas être comme je suis, toujours à attendre le beau, le grandiose, le puissant… Mais j’ai ce tempérament, je veux trop, je donne trop d’ordres, j’aime trop quelque chose hors de ma portée et, quand je ne l’atteins pas je cherche désespérément à transformer ce qui existe de façon à rapprocher l’objet défectueux de la réalité inatteignable. ») et quelle soif de vie ! Le récit oscille en effet entre colère et calme, joie et tristesse, pleurs et rires avec quelques éclats d’humour grinçant ou pas. Il relate la vie d’une maison de retraite, les relations entre les résidents, on y croise les soignants, la direction et évidemment sa fille avec qui elle n’est pas tendre. La vieille dame observe, analyse, les qualités, les défauts, les travers, les difficultés des employées souvent étrangères. Evidemment elle a des préférences… Mais il s’agit aussi d’une chronique de la vieillesse, d’une vie où la notion d’intimité a disparu, où son voisin de chambre d’un jour à l’autre peut disparaître pour être remplacé dans l’heure qui suit par un nouveau résident : « Entrer en vie, sortir mort ou rester assis à la même place, c’était presque pareil. » Mais cette femme est une résistante (« …l’espoir est immortel… »), résistante pour vivre jusqu’au bout, trouver et profiter de moments sympathiques même fugaces, petits instants de bonheur, penser à sa maison, aux fleurs, aux jardins, aux chants des merles … trouver du réconfort et de la beauté en regardant le ciel et les nuages… Un portrait détonant et attendrissant !
« La vie est un arc, elle a son commencement et sa fin, elle débute dans un berceau, effectue son vol ascendant, et à partir d’un certain moment la courbe descend jusqu’à ce qu’on se rende à la terre, de nouveau à l’intérieur d’une caisse en bois qui ne diffère en rien d’un berceau. »
Fiche #3112
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Elisabeth Monteiro Rodrigues
Après l’excellent « Porc épique », voici le deuxième opus de Manuel Rui traduit en Français, un recueil de nouvelles qui revient sur l’année 1975, l’année de l’indépendance de l’Angola. Il est donc question de transition, de pouvoir, de gouvernement, de guerre mais aussi d’enfants et de rêves mais Manuel Rui sait déjà que ce ne sera pas un long fleuve tranquille, les alligators ont la peau dure…
Ecouter la lecture de la première page de "Oui Camarade !"Fiche #2025
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Elisabeth Monteiro Rodrigues
Le petit Henrique est au cœur du roman de Valério Romaõ où les dialogues et les descriptions s’enchaînent dans un rythme singulier. Et pourtant Henrique ne parlera pas, n’exprimera désespérément aucune idée, aucune parole, aucun sentiment. Henrique est autiste et l’on suit le combat de sa famille, parents et grands-parents, un combat individuel mais aussi d’un couple mis à l’épreuve évidemment, chacun réagit avec sa personnalité, son degré d'acceptation et se trouve souvent en opposition. Un instant unis et l’instant d’après en désaccord, « On était d’accord sur les désaccords. » Une vie définitivement phagocytée, un écueil en chasse un autre : identifier la maladie, la nommer, trouver des solutions pour la vie de tous les jours, trouver les personnes aptes à intervenir, reconnaître les médecins compétents comme les charlatans ou « guérisseurs de foire ». Qui pourrait aider ? Quelle structure serait adaptée ? Et pourtant, face à l’accident, Henrique devient un enfant comme un autre et ses parents, des parents comme les autres, la peur, la douleur, l’angoisse, le fossé immense avec le monde médical... Un portrait éprouvant de parents face à la maladie, à l’incompréhension, aux progressions comme aux régressions, à un quotidien accablant mais aussi à la froideur des urgences servi par une écriture jouant parfaitement sur les rythmes et les répétitions.
Premier roman
Fiche #1873
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Elisabeth Monteiro Rodrigues
Un jeune garçon, le narrateur, nous raconte l’histoire de l’eau qui ne tombe plus et reste en suspens. Malédiction ou conséquences de l’usine située à proximité ? Il comprend que sa mère veut savoir et la voit partir vers l’usine. Mais pour comprendre le présent, le passé demeure souvent essentiel et, épaulé par son grand-père, l’enfant devra appréhender la légende de Ntoweni pour mieux connaître l’histoire de l’eau et de son pays. Ce court texte prouve à nouveau que la prose poétique délicate et envoûtante de Mia Couto est particulièrement adaptée aux contes.
« L’indécision de la pluie n’était pas motif de joie. Malgré tout j’inventai une facétie : mes parents m’avaient toujours traité d’ébahi. Ils disaient que j’étais lent pour agir, attardé pour penser. Je n’avais pas vocation à faire quoi que ce soit. Peut-être n’avais-je même pas vocation à être. Eh bien la pluie était là, clamée et réclamée par tous et finalement aussi ébaubie que moi. Enfin, j’avais une soeur tellement maladroite qu’elle ne savait même pas tomber. »
Fiche #1479
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Elisabeth Monteiro Rodrigues
Le père Silvestre vit à Jésusalem, un lieu isolé, clos, avec ses deux fils, et un serviteur, son beau-frère les visitant régulièrement, univers composé uniquement d'hommes à l’abri du monde, des femmes, des guerres et des horreurs. Le fils aîné a souvent été tenté de fuir ce lieu tyrannique mais jamais ne franchira le pas. Son jeune frère, Mwanito, accepte sa situation, il est l’accordeur de silences : « Je suis né pour me taire... J’ai un don pour ne pas parler, un talent pour épurer les silences. J’écris bien, silences, au pluriel. Oui, car il n’est pas de silence unique. Et chaque silence est une musique à l’état de gestation ». Il observe, écoute et démêle les fils de la vérité. Le groupe vit au milieu d’une végétation aussi luxuriante qu’oppressante, quasiment aussi violente que le père qui noie ses peurs et remords dans une violence aveugle, jusqu’à la folie. Mwanito attendra d’avoir onze ans pour rencontrer une première femme, Marta. Vision troublante, bouleversante, qui abattra les murs de ce monde clos, fera éclater la vérité, les transportera vers le monde des hommes, renaissance, nouveau départ. Splendide et envoûtante saudade, conte philosophique sur la vie, la mort et la tyrannie à la prose poétique et parfaitement maîtrisée.
« Les morts ne meurent pas lorsqu’ils cessent de vivre, mais quand nous les vouons à l’oubli. »
« Aucune guerre ne finit jamais. »
« …depuis le ventre du fleuve, je contemplai les éclats du soleil. Et ce scintillement m’éblouit dans un aveuglement enveloppant et doux. Si l’étreinte d’une mère existait, elle devait s’apparenter à cette perte de sens. »
Fiche #1036
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Elisabeth Monteiro Rodrigues