« Vous devriez plutôt vous passer un rêve sur le visage dès le matin »
Mia Couto
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« Désarrois » ou comment une vie peut être entravée par l’histoire familiale, par le poids de la religion, de la société et de la dictature. Le récit débute en RDA avant la chute du mur à une époque où dans la loi l’homosexualité peut encore être condamnée et sanctionnée par cinq années de prison. Né en 1933, le professeur Friedeward Ringeling est reconnu de tous ses étudiants et s’est construit une image sans aspérité, polie. Une image forgée par son éducation (« … il sentait nuit et jour, à chaque heure de sa vie, la dure poigne de son père sur sa nuque. ») : un père catholique intransigeant, dur, violent, terrorisant ses enfants, qui refuse naturellement l’orientation sexuelle de son fils. Pour sauver la face, Friedeward se mariera avec Jacqueline, lesbienne, couverture idéale pensent-ils... L’homme restera toute sa vie sur ses gardes, dans le désarroi, mais la Stasi sait tout, n’oublie rien et sait le faire payer cher quand elle le décide à ceux qu’elle désigne et Friedeward sera de ceux là. Un récit tendu, pudique, émouvant, d’une enfance, d’une adolescence et d’une vie percutées par les exigences familiales, politiques ou sociétales.
Ecouter la lecture de la première page de "Désarrois"Fiche #3198
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Nicole Bary
Le récit débute presque par « Il n’y a tout simplement rien dans ma vie qui vaille d’être raconté. Absolument rien. », Konstantin le rétorque à une journaliste qui souhaiterait qu’il lui relate le fil de sa vie. Et dès cette affirmation erronée, le lecteur est emporté par le tourbillon de vie, les décisions, les réflexions de Konstantin, et les 400 pages prenantes sont dévorées à un rythme infernal ! A 67 ans, Konstantin Boggosch né Müller se considère toujours comme exclusivement le fils de son père, nazi et criminel de guerre : « Je sais, je ne me libèrerai pas de ce père, de cet héritage. Je ne peux pas me libérer, je ne peux pas être libre. A cause de lui… J’ai peur que le démon survive en moi. » Le passé familial entrave sa vie dès le collège puis dans sa vie professionnelle et intime à l’âge adulte. C’est aussi sa décision, son frère n’appréhende pas de la même façon les actes et décisions de leur père. Il ne cessera de voir et lire dans le regard, dans les sourires des autres le passé de son père, son passé, « … j’étais celui qui m’avait conçu, celui qui était mon père. ». Alors il part, choisit l’exil. D’abord en France, à Marseille, trouve des petits boulots et côtoie un groupe d’anciens résistants. A la construction du mur, il suit le chemin inverse de beaucoup et revient s’installer en Allemagne de l’Est. D’un côté du mur, une société dirigée, oppressante et inique et de l’autre les anciens grands nazis restés au sommet du pays et du pouvoir économique. Il ne pourra jamais ignorer ou feindre d’ignorer les ombres du père et du passé et sa vie en sera le reflet. Un immense portrait d’un homme droit, intègre, cohérent que les fantômes du passé détenant son dossier personnel éprouveront toute sa vie mais qui choisira de rester debout et de « regarder l’enfer sympathique que vous avez si joliment construit. » « L’ombre d’un père » traverse soixante ans d’histoire allemande et européenne et démontre que les murs peuvent s’élever à tout moment, partout, en tous lieux, entre toutes personnes et cette histoire n’est pas terminée…
Ecouter la lecture de la première page de "L'ombre d'un père"Fiche #2282
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Nicole Bary