« … la saleté d’un riche est un style, celle d’un pauvre un stigmate. »
François Bégaudeau

Les comptes-rendus-avis de lecture de la librairie Vaux Livres

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Laurent Seyer

Laurent SEYER

J'ai pas les mots
Finitude

4 | 176 pages | 06-08-2024 | 17.5€

en stock

Jérémy à cause d’un cordon récalcitrant est né différent avec « un cerveau cerf-volant », il a aujourd’hui dix-sept ans, en a marre qu’on « lui parle comme à un bébé », mais son handicap mental n’a guère évolué. Or ses parents, sa soeur, Mélanie son AMP préférée, les médecins n’auront peut-être la chance qui vous est offerte : accéder aux pensées de Jérémy. Car comme il ne peut s’exprimer (à part quelques grognements et crachats, « Un Playmobil qui grogne comme un animal. »), personne ne sait ce qu’il comprend et le bougre, il comprend, il a même l’œil affûté (en période de COVID, Jérémy –et le lecteur– se demande qui sont les vrais handicapés !), une sensibilité à fleur de peau, et il rage intérieurement que ses proches ne le comprennent pas. Sa parole intérieure est différente, imagée, poétique, décalée, le flux est permanent, un bavard le Jérémy, et aucun sentiment ne lui est étranger. Nous partageons ses colères, ses joies, ses envies, c’est direct, sans fioritures, parfois naïf. Son état impacte naturellement la vie familiale mais les parents n'abdiquent pas, entre espoir et désespoir, et malgré quelques propositions du corps médical que Jérémy juge malhonnêtes jamais n’envisagent un placement. Le jour où Jérémy s’apercevra que sa sœur trafique et rencontre discrètement un homme casqué qui lui donne des enveloppes mystérieuses, il va bien falloir qu’il trouve un moyen de prévenir ses parents ! Original, touchant et drôle.

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Fiche #3222
Thème(s) : Littérature française


Laurent SEYER

D'étranges hauteurs
Finitude

3 | 253 pages | 18-09-2022 | 19€

Laurent Seyer a peu connu son père décédé alors qu’il avait cinq ans, cinquante années ont passé, délai certainement nécessaire pour que le fils rencontre à nouveau son père et lui ouvre de nouveaux espaces. Jean a eu au moins deux vies. Lorsqu’il s’engagea dans le maquis de l’Oisans, « une étrange armée dépenaillée de soldats aux allures de braconniers », il venait tout juste d’avoir une fille. Le récit relate l’engagement de ces hommes, leur quotidien, la beauté de la montagne, leur solidarité et amitié, leurs peines, leurs souffrances, le froid, la faim, la soif... Evidemment Jean avait pensé à la mort, s’y était peut-être préparé, mais un accident, la gangrène, une amputation, personne n’est prêt, « Depuis cinq ans, je suis entré progressivement dans la guerre… et voilà que d’un coup sec, sans prévenir, c’est elle qui entre en moi et s’y installe pour toujours. ». Blessé puis amputé, ses camarades ne peuvent plus le porter et l’abandonnent en pleine montagne à une mort promise. Pourtant, à son retour, sa femme n’acceptera pas l’homme qu’il est devenu et partira avec sa fille. Il n’est évidemment plus le même homme et souvent réduit à son infirmité. Il rencontrera Odette, une femme très croyante, qui parle plus à Dieu qu’aux hommes. Il mourra prématurément d’une crise cardiaque mais aura néanmoins quatre enfants avec elle. Le récit entremêle les vies d’Odette et Jean en chronologie inversée pour mieux souligner le croisement de ces deux destins marqués par l’histoire.

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Fiche #2918
Thème(s) : Littérature française


Laurent SEYER

Ne plus jamais marcher seuls
Finitude

2 | 200 pages | 28-03-2020 | 17€

Naomi Strauss est l’archétype de la Parisienne, trentenaire, bobo de gauche, prête à s’engager depuis le boulevard Saint-Germain pour toutes les causes humanistes, écologiques, progressistes comme on dit habituellement. Elle est journaliste dans un hebdo plutôt à gauche qui propose une rubrique dressant le portrait de personnes représentant des courants de pensée opposés à la ligne du journal. Le journaliste de cette rubrique absent, elle se porte volontaire pour un séjour en Angleterre pour rencontrer un pro-Brexit. Elle se réjouit de ce séjour, cela fait tellement longtemps qu’elle n’a pas revu Londres. Raté ! Ce sera Liverpool et ses quartiers pauvres ! Ce sera Nick Doyles, un chauffeur de taxi, supporter naturellement des Reds, buveur de bière, pro-Brexit et anti-immigration. Un autre monde ! Pourra-t-elle comprendre cet homme ? Envisager ses motivations ? Découvrir son histoire, son quotidien ? Alors qu’un feu dévaste un immeuble dans Liverpool et que les attentats frappent Paris, Naomi découvrira derrière ses choix politiques qu’elle juge erronés et archaïques, qu’il y a des hommes, des humains avec de vrais sentiments, leurs convictions et leurs contradictions. Mais, ne rêvons pas, ces deux mondes peuvent parfois, suite à un concours de circonstance, se croiser, et même parfois se comprendre le temps de cette rencontre ou d’un évènement particulier, ils n’en resteront pas moins deux mondes bien distincts, avec ceux qui restent persuadés de savoir, de représenter le monde d’aujourd’hui et de demain, qui conserveront leur mépris et les autres, ceux qu’ils jugent dépassés, rétrogrades, sans avenir et surtout abrutis ! Les évènements d’aujourd’hui (Coronavirus) feront peut-être douter et réfléchir les premiers au moins quelques secondes, mais rien n’est moins sûr ! Laurent Seyer nous propose un deuxième roman percutant avec ce face-à-face singulier entre deux mondes à nouveau sur fond de football. Les aspects humains, sociaux, politiques sont traités avec réalisme et parfois humour, les personnages crédibles et représentatifs, l'amour absolu des Reds parfaitement rendu. Un seul défaut, une extrême jalousie envers Naomi qui s’assoira malgré elle sur les gradins des Reds, un rêve, « You'll never walk alone » !

« Elle en avait pour plus de six cents euros de fringue sur elle, achetées dans les boutiques à la mode du boulevard Saint-Germain et ce plouc sapé comme un ado des années quatre-vingts trouvait qu’il lui manquait une écharpe de Liverpool pour être présentable ! »

« D’aucuns disent que le football est une question de vie ou de mort, mais c’est en fait beaucoup plus important que cela. »

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Fiche #2518
Thème(s) : Littérature française


Laurent SEYER

Les poteaux étaient carrés
Finitude

1 | 137 pages | 07-08-2018 | 15€

Le 12 mai 1976 sera un grand jour pour Nicolas Laroche, le premier, le dernier. A treize ans et demi, il s’apprête à vivre sa première finale de coupe d’Europe, de football naturellement, Saint-Etienne affrontant le tenant du titre, le Bayern de Munich dans l’Hampden Park de Glasgow. Adolescent passionné de foot, il nous raconte en parallèle l’avant-match, sa vie, ses copains, le collège (« D'ailleurs, je déteste être adolescent. Je n'aime pas ce temps où tout nous semble définitif alors que tout est transitoire.). Sa préparation du match est perturbée, quelques mois avant le jour J, sa mère quitte la maison, ses parents divorcent. Mais avant la rencontre, son père a déjà trouvé une remplaçante accompagnée d’une chose s’annonçant être son fils : « Maman est partie et papa l’a remplacée par Virginie, un peu plus tard. Moi je l’ai remplacée le jour même par une équipe de football. » Même si l’ASSE prend une grande place dans ses pensées, un questionnement récurrent revient concernant ses parents, leur rupture, le départ de sa mère, l’amour de son père. Il vacille et seuls les Verts le maintiennent en état de continuer à jouer ! Alors lorsqu’il s’installe avec son père, sa nouvelle femme et son fils (quelle tristesse de regarder avec ces ignares, et oui, regarder un match de football, c’est aussi une histoire de partage et d’amitiés), il est tendu, très tendu. La victoire doit être au bout, sinon comment supporter de vivre toute son existence en vaincu, à se poser sempiternellement les mêmes questions sans réponse, pourquoi cette défaite ? pourquoi ces maudits poteaux étaient-ils carrés ? ... Joli et émouvant portrait d’un adolescent sensible et toujours dans l'absolu, bouleversé sans avoir pu en parler par la séparation de ses parents et adulant (hélas peut-être) une équipe de football devenue mythe.

Premier roman

« C’est cela que j’aime le plus dans le football : se diluer dans une foule qui vibre à l’unisson et se laisser emporter par ses mouvements démesurés. Ouvrir la bouche pour crier et sentir les gradins vibrer sous la clameur démultipliée. Se dresser en levant les bras au ciel et voir la vague soulever une écume de milliers de mains tendues. Je suis entré en football comme on entre en religion, le jour où pour la première fois j’ai été secoué par cette jouissance éphémère de se sentir tout-puissant en disparaissant dans la houle d’une foule. C’est cette émotion que depuis j’aime ressentir au stade, ce moment océanique où l’on ne se laisse pas simplement emporter par la vague, mais où l’on devient la vague. »

« Finalement, c’est toujours la même histoire lorsqu’il s’agit de la foi, ce n’est qu’à la fin que l’on sait si on a eu raison d’y croire ou pas. »

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Fiche #2191
Thème(s) : Littérature française