« Il n'est pas nécessaire de croire à une origine surnaturelle du mal ; les hommes sont parfaitement capables d'inventer tout seuls n'importe quelle iniquité. »
Joseph Conrad
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Le monde de Jacques Janssens vient de basculer. Ce vieux poisson rouge qui s’ennuyait dans son aquarium vient d’être poussé sur le côté par ses collègues requins et piranhas. Il a tout donné pour son entreprise qui est devenue ce qu’elle est grâce à lui mais aujourd’hui il est qualifié de low performer. Il reste apathique, amorphe. En effet que peut représenter cette mise à l’écart, cette chute hiérarchique, par rapport au drame de sa vie : le départ définitif de son fils Bruno. L’adolescent révolté et idéaliste refusait la vie de ses parents, l’absence de rêves, des mous qui acceptent tout, qui subissent, alors un jour, il a dit adieu, adieu à ses parents, adieu à sa sœur, adieu le quotidien plus ou moins partagé, adieu les parties d’échecs, adieu. Mais le fantôme de Bruno reste omniprésent et le couple, Clara et Jacques, en souffre en silence, les deux jumelles de Corinne, leur fille, ne peuvent le remplacer. Il est peut-être temps de se poser les bonnes questions, de revenir sur son passé, son enfance, alors que Clara décide de faire un break et de partir très loin de Jacques. Seule petite lueur d’espoir, l’arrivée à la DRH d’une nouvelle collègue singulière et bizarrement très accueillante, mais Jacques reste méfiant (« La confiance, ça se sait, est complètement déplacée au sein d’une société à but lucratif. »). Un portrait débordant d’humanité d’un homme en fin de carrière qui s’interroge avec lucidité sur son destin, son enfance, sa famille, sa relation au travail, sa vie. Cela aurait pu être le triste portrait d’un looser déprimé en fin de parcours mais rassurez-vous, fidèles lecteurs de Verena Hanf, vous connaissez son optimisme pathologique, la fin sera heureuse et pleine d'espoir. Comme à son habitude, elle trouve le juste équilibre entre l'intime et les problématiques qui traversent notre société. Rien ne dure sauf l’émerveillement et Verena Hanf sait nous guider pour le découvrir et même si ce n’est "que" de la fiction, ça fait du bien !
« Le hasard n’existe pas. C’est toi qui définis le jeu. Toi et l’autre. »
Fiche #3007
Thème(s) : Littérature étrangère
L’équilibre d’une vie est parfois ébranlé par les mauvaises rencontres ou les préjugés et les personnages de « La fragilité des funambules » tentent tous avec plus ou moins de réussite d’avancer sur le fil de leur vie. Il y a tout d’abord Adriana, une jeune Roumaine qui a quitté traumatisée la Roumanie en laissant son fils Cosmin à ses parents qui s’en occupent avec beaucoup d’amour et d’attention. Elle s’est installée à Bruxelles et s’est éloignée de son passé en devenant nounou de Mathilde, petite fille d’une famille bourgeoise d’expatriés allemands : Nina, la mère, est psy et Stefan, le mari, souvent absent, a le portefeuille bien garni. Adriana a rencontré Gaston avec qui elle partage ses week-ends. Chacun tente de trouver son équilibre, Adriana avec son passé, Nina avec l’alcool et l'insatisfaction de son existence, Stefan enfermé dans sa rigidité, Mathilde qui tente d’attirer l’attention par ses caprices à répétition, seul Gaston semble mieux maîtriser les évènements et capable de réagir rapidement face aux évènements. Adriana garde constamment en elle une colère qui la rend dure avec les autres comme avec elle-même. C’est dans cet univers qu’arrive Cosmin contraint de quitter ses grands-parents. Il se fait une fête de découvrir Bruxelles et ses Diables Rouges, de retrouver sa mère à qui il rappelle un passé douloureux. Mais quand un évènement singulier se produit, les préjugés ont la peau dure… et l’équilibre va vite devenir instable pour chacun des personnages et leur vie tanguer dangereusement. Verena Hanf donne la parole à chaque personnage et nous permet de faire connaissance avec chacun d'eux, d'installer puis de creuser notre relation. Elle réussit grâce à sa finesse, sa justesse et son humanité, à nous faire rentrer dans leur univers, espérer continuer le chemin avec eux et entrevoir un destin positif et serein pour chacun de ses personnages.
Un nouvel opus qui vient brillamment compléter les deux précédents.
« La haine est un moteur puissant. On la sous-estime, pourtant elle a ses qualités. Une bonne haine ciblée tient éveillé et alerte, elle aiguise les sens, protège, avertit, vivifie. »
Fiche #2698
Thème(s) : Littérature étrangère
Certains moquent sa différence en l’appelant « Gros matou », elle, elle se dit « félinofille farouche ». Alma vit sur le côté, seule, à la marge. Peu lui font confiance, peu lui prêtent attention. Alors, oui, elle est farouche devant l’autre. Seule Emma, mère de substitution, a toute sa confiance. Alors quand elle disparaît, Alma se retrouve isolée, seule avec Pierrot son chat roux. Pourtant, quand Fred et Paul l’accueillent dans la cuisine de leur restaurant, la vie semble reprendre. D’autant plus, qu’une nouvelle voisine s’installe à côté d’elle. Peut-être le début d’une belle rencontre… Verena Hanf dans cette courte nouvelle réussit parfaitement à planter le décor, ses personnages, à nous émouvoir et à nous faire aimer Alma.
Fiche #2626
Thème(s) : Littérature étrangère
Simon est perdu. Sa compagne l’a quitté, brutalement, sans explication, « la déserteuse est partie, la bataille est finie, il n’y a plus que moi, un moi vaincu, à genoux ». Désemparé, il garde silence et décide de partir, « partir seul comme un grand, lécher ses plaies, essayer de se relever, de se refaire une fierté », de se ressourcer, sur les traces de son enfance et de retourner là où, enfant, il fut heureux avec ses parents. Le petit hôtel du village alsacien a bien changé, et Simon y croise rapidement Anna, une femme un peu austère et aussi perdue que lui. « Madame Non » se confie, Simon a le temps, il l’écoute et lui raconte également sa vie et ce qui l’a amené jusqu’ici. Au cœur de leur dialogue se retrouve évidemment la famille, ses non-dits et ses relations humaines parfois heurtées. Mais ensemble, en s’entraidant et se soutenant, ils prouveront que les épreuves peuvent être supportées et acceptées. Deux confessions qui les surprendront, les bousculeront, les aideront à surmonter leurs angoisses et surtout, leur ouvriront les portes d’une nouvelle vie. Un second roman à l’image de « Tango tranquille » qui trouve le ton juste et traite des épreuves de la vie avec humanité, humour et optimisme.
« Je la regarde et me dis qu’il y a des moments dans la vie qui sauvent le reste, qui valent le tout. Des moments de grâce qui font se volatiliser les routes désertes, les drapeaux en berne, les demoiselles hautaines vexées et l’abîme des années perdues. »
Fiche #1485
Thème(s) : Littérature étrangère
Violette est une femme « d’un certain âge, quel bel euphémisme », seule, en effet elle a choisi volontairement « le silence social ». Elle s’est isolée des liens familiaux (marre d’être « la tache grise » des réunions familiales) et sociaux. Elle n’attend rien des autres et préfère se parler vertement d’ailleurs, la dame est directe et n’a pas la langue dans sa poche ! Enrique jeune Bolivien exilé et sans papiers est seul également, mais il subit sa solitude comme sa pauvreté. Il ne comprend pas pourquoi les gens ont peur de lui. Mais « l’île déserte n’existe pas » et le hasard des rencontres illumine parfois les vies. Les deux se croisent, un sourire (« son sourire soulage mon silence social »), un regard, elle décide de l’aider, ce « maigrelet ». Elle repoussera les barrières dont elle s’était entourée, elle redevient humaine, elle renouera les liens avec le monde et le passé qui n’est jamais mort mais aussi avec l’homme qu’elle a quitté. C’est décidé, elle arrête de « mordre ». Enrique reconnaîtra dans « madame patate » sa grand-mère, trouvera une nouvelle famille, une protection, de l’amitié et une véritable place à leurs côtés. Un bel hommage aux rencontres lumineuses qui peuvent bouleverser nos vies et écorner les préjugés, à l’attention portée aux autres qui peut tous nous sauver. Un style vif et personnel pour ce très joli premier roman.
Premier roman
Fiche #1360
Thème(s) : Littérature étrangère