« C’est la guerre, c’est plus facile de tuer quand tu considères que l’ennemi vaut pas plus que du bétail. »
Peter Farris
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James Vann est de retour en Californie. Il débarque depuis l’Alaska et retrouve sa famille, parents, frère, ex-femme et David et Cheryl, ses deux enfants. Une famille inquiète. Son frère le prend en charge dès son arrivée à l’aéroport et tente d’établir le dialogue, de le soutenir. James en effet ne le cache pas, c’est certainement son dernier voyage, il a décidé d’en finir, il est venu avec son Magnum et il ne repartira pas. Il est en perpétuel questionnement, « Mais je n’arrive pas à interrompre mes pensées. Mon cerveau ne s’arrête jamais. » Pourquoi vivons-nous ? Quelle est notre place, pourquoi continuons-nous d’explorer le chemin ? Des raisons mercantiles ? égoïstes ? « Je pense que c’est le problème, cet instant où j’ai commencé à avoir besoin d’une raison. Qui sait pourquoi cet instant est apparu. » Un questionnement vertigineux. En outre, face à son passé, il considère sa vie ratée, deux vies de couple, deux séparations, un père à temps partiel, le fisc qui lui tombe dessus… Ses « cogitations sur l’existence, lancinantes et infinies, à toujours tout remettre en question » font que vivre devient une épreuve insurmontable. Mais Doug veille et le surveille, le prend sur son dos et tente désespérément de le ramener sur le chemin de la vie, tout vie mérite d’être vécue. Et naturellement la tâche est ardue, pénible. Le lecteur suit assidûment cette épreuve, les efforts de Doug et même parfois de James et espère jusqu’au bout que James déposera le Magnum au fond de sac, reviendra sur son choix définitif et retrouvera une place auprès de ses enfants et de la vie. Un récit qui plonge au cœur de la torture psychologique qui étouffe un homme sans réponse qui peut être lu comme un préquel ou un miroir à l’inoubliable Sukkwan Island.
« …il aimerait pouvoir la rassurer, être un père, être normal, être celui qu’il est censé être, mais c’est tout bonnement impossible. Comment réussissait-il à le faire avant ? »
« Comme ce serait incroyable de dormir, simplement. »
« Aucun néant ne peut être assez vide pour effacer tout ce que nous avons aimé ou tout ce qui nous manque. »
« Et un sentiment terrible de perte…. Une caverne en lui, insondable. Une pierre y tomberait pour l’éternité. »
Fiche #2361
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Laura Derajinski
Caitlin vit seule avec sa mère, Sheri. Même si sa mère fait tout pour elle, le quotidien demeure pénible. Sheri travaille beaucoup, un boulot inintéressant et éprouvant, des horaires impossibles, elle enchaîne les heures supplémentaires pour gagner quelques dollars de plus et tenter de satisfaire Caitlin. Mais elle s’use et craque périodiquement. Caitlin trouve son bonheur et un apaisement certain auprès de son amie Shalini mais aussi dans ses visites quotidiennes à un aquarium où elle s’immerge au milieu des poissons, ses véritables amis, « le monde entier est contenu dans ces bassins ». Elle devient experte et rêve d’un métier en lien avec eux. C’est là qu’elle rencontre un vieil homme, qui, comme elle, peut rester des heures, le visage et le nez scotchés sur la paroi d’un aquarium à observer le comportement anodin d’un poisson que seul lui connaît. Ils se rencontrent chaque jour, dialoguent et une certaine complicité s’installe entre eux. Jusqu’au jour où Caitlin naïve et pleine d’espoir espère partager son amitié et son ami avec sa mère qui reconnaît immédiatement le vieil homme et qui, après lui avoir révélé le secret de cet homme, plonge dans une folie destructrice incontrôlable. Ce secret est en effet lié à l’enfance de Sheri, saura-t-elle pardonner ? Saura-t-elle oublier même partiellement les blessures du passé pour repartir vers une vie apaisée, « parfois, les pires moments mènent aux meilleurs » ? David Vann après une longue introduction où il fait preuve contrairement à son habitude d’une grande douceur et d’un apaisement évidents, nous plonge dans une tempête voire au cœur d’un ouragan en nous posant la question du pardon mais aussi de la reproduction par une victime des violences subies et dans l’extrême, David Vann excelle ! Chaque roman de David Vann fait mal, bouscule mais c’est si bon !
« Que sommes-nous tenus de rembourser pour ce qui s’est déroulé avant nous, dans les générations passées ? »
« Tout est possible avec un parent. Les parents sont des dieux. Ils nous font et nous détruisent. Ils déforment le monde, le recréent à leur manière, et c’est ce monde-là qu’on connaît ensuite, pour toujours. C’est le seul monde. »
« Chaque chose qui nous arrive, chacune d’elles laisse sur nous une indentation, et cette indentation restera à jamais. Chacun de nous est un accident sur pattes. »
« Ce sont les meilleures questions, celles qui restent sans réponse. »
Fiche #1866
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Laura Derajinski
Automne 78, ouverture de la chasse, au nord de la Californie. Ils sont quatre, le grand-père, le père, le petit-fils et un ami. Ils rejoignent leur zone habituelle et isolée de chasse. Impatients. Le gamin rêve de tuer son premier cerf. A leur arrivée, au loin sur le coteau d’en face, ils observent à travers la lunette de leur fusil un braconnier. Le père tend le fusil à son fils qui scrute cet intrus, leurs regards se croisent, et pan ! Le gamin appuie sur la gâchette et l’irréparable est commis. En un centième de seconde, le séjour s’achève, la vie s’estompe, les liens entre ces quatre explosent. L’homme abattu, ces quatre devant le corps l’observent et s’observent. Qui restera humain ? Qui continuera de suivre les règles ? Qui sombrera dans l’animalité ? Où trouver de l’aide ? Dans les Ecrits ? Qui est le gibier ? Qui est le chasseur ? Un David Vann en très grande forme toujours aussi fort pour glacer le lecteur en le plongeant au plus profond de l’âme humaine, et en décrivant froidement sa violence extrême.
« Mais bien sûr, il n’y a pas de diable. Nous voulons juste qu’il y en ait un. Nous voulons un responsable. L’enfer, c’est l’anarchie, chacun de nous responsable de tout et de rien, n’entendant jamais la voix des autres. L’isolement, bien plus terrifiant que la punition. »
Fiche #1488
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Laura Derajinski
Après le glaçant et terrifiant "Sukkwan Island", David Vann continue son exploration des grandes espaces glaciaires et de la noirceur de l'âme humaine. Cette fois, le puzzle est plus dense, le rythme plus lent, les protagonistes plus nombreux et leurs liens aussi variés que leurs caractères. Pourtant la noirceur comme le poids de la famille et du passé demeurent. Irene et Gary forment un vieux couple, leurs enfants sont maintenant adultes. Mark est un marin aguerri, une vie dissolue avec sa femme Karen et a quelque peu rompu avec ses parents. Gravite autour de la famille un couple de touristes, Carl et la troublante Monique. Rhoda leur fille espère enfin se marier et fonder une famille avec Jim, un dentiste plus âgé qu'elle. Proche de ses parents, quand elle apprend le nouveau projet de son père, l'inquiétude la gagne immédiatement : Gary a décidé de construire sur un îlot isolé, loin de tous et sans aucun habitant et moyen de communication, une cabane au confort rudimentaire faite de rondins de bois. Obsédé par son projet, rien ne peut le freiner ou le retenir. Irene malgré la folie de ce projet l’accompagne comme toujours, l’épaule, l’handicape parfois voire souvent, et le couple (et la famille) est mis à l’épreuve. Le passé rode… Encore une vraie réussite ! Page après page, David Vann est vraiment expert dans l'art de déranger et troubler le lecteur !
« Pourquoi ne peuvent-ils pas se contenter d’être des hommes ? Pourquoi sont-ils obligés de le devenir ? »
Fiche #982
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Laura Derajinski
Deux hommes. Un père et son fils. Jim a décidé d’emmener son fils de treize ans dans une île déserte pour une vie solitaire, à deux, éloignés de tout et de tous et surtout de toutes. Jim en effet espère digérer ses multiples échecs, échecs personnels, amoureux, professionnels mais également renouer les liens avec Roy. Ecoute, affrontement, compréhension, rejet... Roy observe son père, le découvre avec inquiétude, un Robinson de plus en plus défaillant. Ils tentent cependant de préparer le long hiver qui les attend lorsque le drame survient. Un drame inattendu et terrible qui transforme leur séjour en drame. David Vann nous offre avec ce premier roman ténébreux et terrifiant un suspense insoutenable et le portrait noir d’un homme à la dérive, épuisé et sans espoir. David Vann réussit à toucher à la fois l'épouvantable et la beauté lumineuse, du grand art. Une tempête glaciale va vous emporter !
Premier roman
Fiche #701
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction :
Laura Derajinski