« Car vieillir, c’est être occupé par un étranger. »
Rosa Montero
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Le patient du docteur Hirschfeld
Bernard Campiche Editeur
24 | 296 pages | 21-06-2012 | 17€
Un docteur, une liste de patients, des mœurs sexuelles minoritaires et traquées. Le docteur Hirschfeld exerce à Berlin dans les années 30 en pleine ascension du nazisme. Sexologue, juif et homosexuel, il étudie pulsions, phobies, comportements et troubles sexuels, déviances diverses mais aussi complexes, troubles psychologiques qui en découlent ; il vient aussi en aide à certaines de ces personnes traquées, isolées. Le docteur est professionnel et tient scrupuleusement les dossiers de ces malades, une liste sensible, brûlante qui suscite l’intérêt de beaucoup, et notamment du côté des services étatiques allemands, israéliens... On retrouve des années plus tard à Tel Aviv, Karl, le narrateur, à qui le docteur avait fait remettre la liste et qui dut fuir Berlin sans jamais renouer avec une vie simple et paisible, à la vue de tous. Entre témoignage historique, roman policier ou d’espionnage, étude de mœurs, ce récit qui fait souvent froid dans le dos, montre aussi que l’intérêt des états pour l’intime est toujours source d’effets catastrophiques.
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Thème(s) : Littérature étrangère
Jacques-Etienne BOVARD
Une leçon de flûte avant de mourir
Bernard Campiche Editeur
23 | 215 pages | 11-04-2012 | 15.5€
A la veille de son exécution, Socrate aurait souhaité « une leçon de flûte avant de mourir » et Edouard reprend à son compte ce vœu ultime : « Alors moi, figurez-vous, d’abord je ne vois pas pourquoi je ne me comparerais pas à Socrate, en toute immodestie. Ayant le même âge, le nez gros, et étant pour ainsi dire en prison. Donc, j’apprends à jouer du violoncelle avant de mourir. Voilà ». En effet, l’âge ne lui permet plus de jouer avec autant de brio du violon et l’apprentissage de ce nouvel instrument lui offre une dernière très belle rencontre en la personne du jeune Gilles Vanneau, une belle et franche amitié où chacun dans sa différence soutient l’autre. La musique prend toute sa place au cœur de cette amitié apportant sérénité, paix et joies intimes, elle les unit, les rapproche, les soude indiciblement. Les deux amis habitent un immeuble délabré occupé par des personnes âgées accompagnées d'une concierge presque caricaturale. La démolition du bâtiment est programmée... Peur du départ en maison de repos... Peur de la mort hantent les plus âgés. Cette petite société offre entraide, solidarité, amitié, mais aussi mesquinerie, méchanceté, jalousie… Jacques-Etienne Bovard observateur attentif décrit avec tendresse et humour ce petit monde modeste et son quotidien jusqu’aux ultimes instants, en toute sa simplicité.
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Thème(s) : Littérature étrangère
Des nouvelles de la Mort et de ses petits
Bernard Campiche Editeur
22 | 475 pages | 23-01-2012 | 24€
Un monarque règne à une époque inconnue sur le pays Bougon, petite terre déshéritée et quelque peu délaissée. Archétype de ces souverains dont la préoccupation première est leur petite personne, la « Minjesté » a sous ses ordres le père du petit Islo qui revient sur ses premières années et sa longue éducation. Son père est le Grand Humeur, il surveille, épie, hume, pèse, inspecte les intestins royaux et leur précieux résultat. Et tout est prévu pour qu’Islo prenne sa suite. Mais le jeune homme a d’autres préoccupations que les excréments royaux ! Il préfère la vie, ses joies, les rencontres, les voyages et ces héros conquérants des mers et des lointaines contrées. Islo deviendra-t-il l’héritier de son père dévoué ? Le pays Bougon verra-t-il sa situation politique évoluée ? Cette longue confession est aussi prétexte naturellement à aborder moult thèmes implicitement ou explicitement. L’oeuvre d’Anne-Lise Grobéty s’achève avec ce long conte atypique où sa maîtrise de l’écriture atteint peut-être son apogée. La langue est riche et poétique, travaillée avec minutie et le lecteur ressent le plaisir qu’elle a pris à créer ses longues phrases, ces sonorités frappantes, ces jeux de mots ironiques, ces situations singulières, à cacher une métaphore au détour d’une phrase anodine, à placer le sublime comme le grotesque là où on ne les attend pas. Un bonheur d’écriture !
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Thème(s) : Littérature étrangère
Formidable portrait d’un gentleman cambrioleur, attentif aux autres, plus spécifiquement aux abîmés, aux blessés de la vie. Portrait en miroir puisque les personnages du roman sont ses amis, ses admirateurs, membre de la bande du Foyard, douze jeunes hommes et femmes unis autour de leur Dieu vivant, « il aimantait les gens, quels qu’ils soient, les petits comme les puissants ». Il les sauve, leur prend la main pour les emmener à la cabane du Foyard, les porte à bout de bras, ne les jugera jamais : « Emile était une brise qui emportait la réalité... » Sorte de philosophe voleur et de Robin des bois contemporain, entre deux emprisonnements, deux évasions, il les rejoint. Ils l’attendent. Il vole, cambriole mais ne fera jamais couler le sang. Tous l’admirent, le protègent, même le mari trompé s’effacera. Il « aime les gens qui ont mal aux autres » et ils lui rendent bien. Magnifique portrait d’un amoureux de la vie, homme libre maître de sa vie, sage moderne ayant préféré la marge et la poésie à la monotonie habituelle de la vie.
« La vie est légère il n’y a que l’homme pour la rendre pesante. »
« L’émotion suprême, c’est d’être vivant. »
« Ton temps est pressé par l’argent qui vole la vie, moi, je préfère voler l’argent pour gagner la vie et m’allonger dans le temps comme on s’allonge sur une plage. Je suis pour le soleil levant, le soleil couchant et les forêts profondes. »
« Emile, qu’est-ce qui fait les larmes qui pleurent et les larmes qui rient. »
Fiche #1037
Thème(s) : Littérature étrangère
Après le glaçant et perturbant « Poupée », Julien Burri revient avec six récits, aussi indépendants qu’interdépendants. Le jeune Ralf les traverse, miroir de chacun des personnages, point d’attraction, de révulsion des personnages des six histoires. Les personnages se croisent dans leur solitude, s’aiment, se déchirent, se quittent, disparaissent, le tout avec la distance et le froid que sait brillamment établir Julien Burri.
Fiche #969
Thème(s) : Littérature étrangère
Une femme évoque son angoisse du vieillissement, la fuite du temps mais surtout son passé depuis un lieu champêtre entre la nature et sa chambre aux mots où la quête des mots comme l’attente de ce jeune regard bleu et mâle qu’elle attendra indéfiniment occupent tous ses instants. La solitude constitue son mode de vie, recherchée et adorée mais aussi haïe et redoutée. Le temps file et le regard ne s’estompe pas, ni le souvenir du seul amour de sa vie, que les jeunes rencontres d’un soir ou deux ne remplaceront jamais (« … l’intrusion d’un homme, quel qu’il soit, puisque, de toute manière, je n’appartiendrai qu’à un seul d’entre eux, irremplaçable. »). Elle vit avec ce regard bleu et éclairant qu’elle attend, ses fantômes amis, Burgess et Henry Miller, Georges Belmont (le traducteur de Miller), Maurice Béjart, mais surtout sa faune, chats, chien, ses amours indéfectibles. Attentive à la faune et à la flore, elle vit dans un espace protégé, Eden sauvage et préservé, et nous fait partager son étonnement continuel face à la beauté naturelle confirmé par le passage de deux chats sauvages qu’elle accueillera à bras ouverts ! Asa Lanova dans une prose précieuse, précise et travaillée immortalise « l’approche du déclin » d’une femme isolée au cœur d’une nature luxuriante et adulée.
Fiche #965
Thème(s) : Littérature étrangère
Il y a toujours un rêve qui veille
Bernard Campiche Editeur
18 | 220 pages | 16-01-2011 | 17€
La narratrice a été élevée par sa grand-mère. Toutes les deux ont perdu très tôt leurs parents. Cette faille, ce manque inondent leur quotidien sans les empêcher d'avoir en elles tendresse et amour. La narratrice est photographe, collectionne les portraits, recherche les galeries pouvant exposer son travail mais surtout hurle sa recherche de l'Amour. Le récit est douloureux mais loin d'être désespéré, et surtout surprenant et attachant par sa forme, sa méthode, son style, ses références poétiques. Nathalie Chaix réussit parfaitement à montrer et faire ressentir le manque affectant chaque personnage installé depuis l'enfance et attendant l'apaisement.
"Mes rêves dévoilent ce que je tente de cacher. Je n'ai jamais cessé de me cacher. Cacher mon visage sous une frange épaisse, cacher mes lèvres sous le rouge à lèvres, cacher mes seins en courbant les épaules, cacher mes fesses sous de longues vestes, cacher mes jambes sous des bottes en hiver, des pantalons en été, cacher mon corps désirant."
Fiche #884
Thème(s) : Littérature étrangère
Un recueil de nouvelles primé en Suisse chez le toujours excellent éditeur Bernard Campiche qui plonge littéralement le lecteur dans une folie, loin, très loin, du commun, de l’ordinaire. Vous serez définitivement happé par ces histoires, ces trajectoires heurtées, dures, où l’absurde, la cruauté, le mal-être affleurent à chaque page. On est vraiment dans l’extraordinaire de la folie intime tapie au plus profond de chacun, une folie terrifiante, glaçante et dérangeante. Ces neuf fous vous bousculeront violemment !
Fiche #794
Thème(s) : Littérature étrangère
Laurence l’héroïne et la narratrice de Zéro Positif arrive à un âge où ses amies sont devenues mères et la pression familiale et de l’entourage lui rappèlent pesamment et constamment qu’elle et son mari demeurent un couple sans enfant, anormal donc. Pourtant, elle ne se sent pas prête et au cours de cette longue introspection au ton libre, direct et vrai, elle nous fait part de ses doutes de femme et de femme amoureuse, de son violent rejet de la maternité, de sa place qu’elle ne trouve pas dans ce monde étrange... Son mari passionné par son violoncelle et la musique ressent véritablement son trouble mais ne peut empêcher une dérive dangereuse et dépressive où l’alcool annihile toute tentative de réaction. L’écriture et le style toujours aussi remarquables comme la liberté de parole d’Anne-Lise Grobéty rendent cette histoire intemporelle et particulièrement attachante. Anne-Lise Grobéty un auteur majeur à découvrir absolument.
« … qu’est-ce qu’on veut de moi ? On me dit qu’il ne faut pas que je reste dans ma cuisine, que le talent se noie dans l’eau de vaisselle, que d’avoir des gosses ça vous empêche de vivre, qu’il faut s’épanouir dans sa profession ; on me dit : avoir un enfant, un petit fils potelé aux fesses de velours, quelle merveille, la femme doit, les enfants… J’avoue : je reste là comme une idiote, à ne pas savoir, et je me demande comment elles font les autres pour savoir, pour ne pas rester prostrées sur place en se demandant ce qu’il faut faire ; profession-bidon, geste mille fois répétés ici ou ailleurs, offrir son ventre à la vie… »
Fiche #762
Thème(s) : Littérature étrangère
« Un si beau printemps » pourrait être le livre bilan d’une génération, une génération pleine d’espérances et d’idéaux de justice, de fraternité et d’égalité qui a vécu des engagements avec vigueur sur la lancée des mouvements d’après-guerre. Pourtant elle a vu ses désillusions naitre, croître puis éteindre ses ardeurs. Une génération maintenant désabusée qui essaie de comprendre à quel instant la machine s’est grippée : « Une révolution a eu lieu. Pas celle que nous espérions ». Michel Bühler (chanteur romancier) nous offre un récit très contemporain dans un dialogue avec deux enfants de ses amis (une Française et un Africain) en tentant de les convaincre (ou de se convaincre ?) que leur destin est entre leurs mains, que le monde peut être changé quoiqu’en disent certains (« Pourtant, la première victoire de ceux qui nous ont imposé ce monde est d’avoir instillé dans la tête de gens l’idée qu’ils étaient seuls, et que se regrouper pour lutter était inutile, ridicule, voire néfaste.). Un livre bilan jamais ennuyeux, assez pessimiste, qui expose toutes les dérives suivies par nos sociétés au cours des dernières décennies.
Fiche #710
Thème(s) : Littérature étrangère
Rod est journaliste, quelque peu à la dérive et alcoolisé, hébergé par sa mère et lorsqu’il est appelé pour couvrir le meurtre d’un notable de Lausanne, le docteur Attila Szabo, il ne se doute pas qu’il vient de s’engager une pente plus que glissante. Attiré par la veuve du défunt, il se retrouve plongé dans le monde des notables lausannois, un monde aux mœurs légères et interconnecté avec la pègre locale. Attila faisait parti d’un petit groupe de la bourgeoisie mené par un homme douteux où tout s’échange mais, un à un voire deux à deux, les participants disparaissent. Hécatombe qui commence d’inquiéter la population et les communautés de Lausanne mais aussi de ridiculiser la police un peu perdue face à ces disparitions toutes plus violentes les unes que les autres… mais heureusement Rod, journaliste atypique, teigneux et têtu ne lâchera pas l’enquête pourtant particulièrement dangereuse…
Premier roman
Fiche #704
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Anne-Lise Grobéty nous revient avec ce recueil de nouvelles et son écriture toujours aussi poétique, une prose poétique qui chante et particulièrement soignée étayée par un vocabulaire précis et recherché mais sans lourdeur. Ces nouvelles concernent des femmes et des filles, le malheur et la souffrance ébranlent à tous les âges, avec une présence éclairante de la nature. Elles abordent nombre de sujets contemporains qui font notre monde : la séparation, le désir, la mort, le racisme, les rapports incestueux, l’amour, la haine, le désespoir, la maladie… Anne-Lise Grobéty un vrai écrivain que l’on n’oublie pas.
Fiche #667
Thème(s) : Littérature étrangère
Alberto NESSI
La semaine prochaine peut-être
Bernard Campiche Editeur
12 | 198 pages | 17-07-2009 | 17€
José Fontana est né le 28 octobre 1840 au Tessin et mort à Lisbonne le 2 septembre 1876 suite à son suicide alors qu’il est atteint de tuberculose. Une vie brève, mais remplie et engagée. Sur la fin de sa vie, il décide de tenir un journal, pour comprendre sa vie, comprendre ce qui l’a poussé à tant d’indignation face aux maux de ses prochains, face à son éclopitude (« se sentir boiteux avec les boiteux, bègue avec les bègues, misérables avec les miséreux ») mais aussi pour tenter de freiner le temps face à la progression inéluctable de la maladie dont il connaît l’issue. Il navigue alors entre le passé et le présent. Il est né dans le Tessin d’une mère portugaise et d’un père suisse. A la mort précoce de son père, il part chez son oncle dans le Jura suisse se soigner. Il est alors confronté à la pauvreté, à l’âpreté de la vie paysanne, aux superstitions religieuses, aux engagements de son oncle (« C’est peut-être dans les étables de l’enfance qu’est née mon éclopitude »). A la mort de sa mère et de sa sœur, il part pour le Portugal où il finit par tenir une librairie et décide de se consacrer à la politique et à ses engagements avec le mouvement ouvrier portugais, combat acharné, sans concession et non violent en faveur des humbles. Mais la maladie progresse et l’homme souhaite rester debout et toujours volontaire dans ses choix même ultimes (« Pourquoi se laisser consumer jusqu’à l’impuissance ? C’est moi qui déciderai ») et il part avec un certain espoir convaincu que « l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Un vibrant appel à la solidarité que cette belle fresque construite à partir de l’itinéraire exemplaire d’un anonyme solidaire et dévoué à la cause commune.
« Tant qu’il n’y aura pas d’égalité économique, l’égalité politique est un mensonge »
Fiche #608
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Anne Cuneo
Le pont dont il s'agit n'est pas le pont de la couverture du livre. C'est un pont à la fois plus modeste et plus vaste. Le pont entre le pays des Hommes et le pays des Sages crée un lien ou une séparation entre deux régions africaines. Les personnages forment aussi un pont entre l’Afrique et l’Europe. Trois personnages, trois destinées : Joos le journaliste venu pour obtenir des révélations sur le massacre de Kilimangolo, massacre symbolique, hélas maintes fois rencontré dans l’histoire mondiale ; Von Kaenel vieux colon suisse qui a trempé dans toutes les affaires plus ou moins saines du pays, toujours proche du pouvoir ; enfin, Alida, ancienne femme de ministre, devenue femme de ménage de notables suisses et exilée avec l’un de ses fils. Jean-François tisse habilement des liens entre ses personnages et deux continents au passé et au présent liés pour le meilleur et le pire.
« Je vais vous dire, moi : le seul charme du tourisme dans les pays pauvres, quand on ne s’est pas fait arnaquer par des truands, c’est de transformer le moindre pékin en maharadjah pendant une ou deux semaines. Ca n’a jamais été la meilleure façon de se cultiver. Si on voulait vraiment s’instruire, il faudrait commencer par reconnaître qu’on ne sait presque rien. Observer, écouter. Mais les gens sont vaniteux et pressés, ils songent surtout à se distraire vite fait et à épater leur entourage. Ca leur évite de se demander ce qu’ils foutent sur leur terre. »
Fiche #597
Thème(s) : Littérature étrangère
Petit texte percutant, et étrange à l’image de la couverture. Poupée est un petit garçon, petit objet jouet de sa mère et de sa grand-mère, et jouet intriguant pour son père. Une famille et un monde pervers que Poupée subit, ressent dans sa chair et observe. Une enfance cassée mais Poupée tel un automate ne peut réagir et accompagne impuissant son destin dans un silence déconcertant et bouleversant renforcé par l'écriture froide, directe et sans artifice de Julien Burri.
Fiche #589
Thème(s) : Littérature étrangère
Janine Massard suit le destin tragique d’une famille allemande du vingtième siècle. Pressentant la tragédie (quel rôle exact auront les hommes de la famille…), Kunigunde Sidonia dite « Mutter » rejoint en Suisse sa fille, Heide, quittant ainsi son mari, son fils, et l’Allemagne. La bête immonde s’installe en Allemagne, tandis que Heide fonde une famille. Histoire d’une nation, histoire d’une famille. Famille marquée également par la tragédie : des maladies terribles affecteront chacune de ses générations. Heide vieillit en assistant à la mort de ses descendants. Devant cette injustice (« Pourquoi notre descendance et pourquoi pas nous, les mères, l’ordre des choses serait respecté »), elle se questionne mais repousse l’idée simpliste d’une malédiction sur les jeunes générations, héritage d’un lourd passé. Un sujet essentiel et difficile traité avec humanité, tact et intelligence, sans aucune lourdeur.
Fiche #485
Thème(s) : Littérature étrangère
Venez rencontrer Raoul Latraviole, orphelin qui a perdu sa mère d’une pleurésie et son père d’un accident après qu’il a confondu la fenêtre et la porte de son appartement. Raoul prend la route, aventures et rencontres enrichissent ce voyage de l’inutile : « C’est tellement plus beau quand c’est inutile… J’ai hérité de mon père l’amour de l’inutile... ». Quinze chapitres, quinze témoignages de ses voyages illustrant une philosophie de vie où l’Homme reste le héros mais quelque peu en marge de la société actuelle (« Je fréquente le monde avec retenue »). Une tragi-comédie souvent à la limite du burlesque avec un héros attachant (« J’avais la gravité drôle. J’avais le drame clownesque. J’étais tragi-comique »). Une écriture imagée et poétique pour cet hymne aux rencontres imprévues, à l’acte gratuit, à l’amitié.
« J’aime ce qui ne se prévoit pas. Moi le hasard me va bien. J’aime ces petits riens du tout qui nous font trébucher dans la comédie ou le drame »
« Son sourire n’était pas rentable, donc menacé d’extinction, par ceux qui n’ont rien parce qu’ils ont tout ».
Fiche #486
Thème(s) : Littérature étrangère
Histoire d’une passion immédiate (« La première fois que je le vois. Je tombe en arrêt. Absorbée par ce visage, engloutie. Arrêtée. Plus de bruit. Seulement ce visage. Cet homme-là. Un éclair. Une brûlure. Consumation »), d’une fascination d’une femme pour un homme qu’elle nomme Adonis et qui ne l’aime pas et de son évolution durant cinq années. Narration au jour le jour de ses sentiments, de ses émotions et de ses troubles. Surprise par cette passion, elle se sent devenir esclave. L’histoire laissera des traces. Alors que l’héroïne s’aperçoit que cette passion devient néfaste, elle ne peut s’en détacher simplement et irrémédiablement. Peu à peu, le doute, l’angoisse et la peur de l’absence s’installent jusqu’à la délivrance totale (« Nous expliquons, nous déplions, nous démêlons, nous apaisons, nous rions, puis nous nous quittons »). Livre que vous lirez à un rythme élevé grâce à une écriture vive, directe, tranchée, une écriture recherchée mais moderne qui prend de multiples formes : prose, poésie, lettres, mails… Prix Georges-Nicole 2007 qui récompense un écrivain de langue française résidant en Suisse n’ayant jamais été édité.
Fiche #234
Thème(s) : Littérature étrangère
Trois vieilles dames suisses se lient lors de discussions et de rencontres de plus en plus rapprochées. Trois vieilles plus ou moins isolées qui se sont adaptées au monde moderne et qui se rapprochent les unes des autres et constatent qu’elles ont encore toutes l’appétit de la vie. Jusqu’à ce que l’une d’elles ait l’idée d’entreprendre un voyage en Egypte...
« ... ce que je veux dire c’est que rien, en France, n’a jamais l’air tout à fait fini et que c’est ça qui fait onduler les choses et les gens. »
« Elle est toute ridée mais ses rident sourient... »
« Je persiste à croire que sainte Etude délivrera notre espèce bien mieux que les Bons Sentiments affichés pour donner le change. »
Fiche #231
Thème(s) : Littérature étrangère
A-L Grobéty nous livre quinze nouvelles dans ce recueil de textes littéraires, riches, actuels, très personnels d’une langue travaillée qui flirte avec la poésie. Les nouvelles sont variées, douces ou violentes, cruelles ou tendres, parfois tristes mais une lueur d’espoir pointe souvent sur la fin. Conte des quatre fiancées, fiancée d’hiver, d’automne, d’été et de printemps, histoire d’une mère qui fait croire à sa mort pour observer les réactions de sa fille, sa rivale, récit ironique décrivant l’attitude des gens apeurés par l’Autre qui finissent isolés de tous et de tout, histoire d’une femme écrivain lassée d'avoir à justifier sa pause en écriture mais qui saura retrouver "ses plumes", "Quand Benoite cueille" un bijou poétique sur la flore et la faune… Un auteur à découvrir et à suivre avec attention.
Fiche #217
Thème(s) : Littérature étrangère
Luce, fille d’Isabelle et de Marc Gaston (dit Mongarçon) luthier, revient sur son enfance et son histoire familiale notamment pour intéresser, capter une seconde, une minute ou plus l’attention de son père qui semble ne pas se soucier d’elle. Le sentiment qu’il ne l’a pas suffisamment aimée l’obsède et fait son malheur ; elle reproche à ce musicien ses longs et lourds silences. Nous découvrirons leur vie croisée par une alternance de chapitres présentant la vie de Luce puis celle de Marc Gaston. La vie de ce père de milieu simple ne respire pas le bonheur : une naissance difficile, un père trop tôt disparu, un frère "différent" et qu’il croira longtemps disparu sa mère lui ayant annoncé qu'il devra "chanter pour deux", une femme trop vite épousée… Dès son plus jeune âge, la passion pour son métier grâce à sa rencontre avec deux frères luthiers semble le sauver. Il tentera d’en faire profiter son frère qui pourtant brisera un jour la corde de mi du violon provoquant la disparition de son âme. Marc Gaston n’aura alors de cesse d’atteindre la perfection pour retrouver cette âme (« à quoi sert-il d’être un puits de science si c’est pour que sans cesse le cœur y boive la tasse ? »). De cette préoccupation exclusive, sa fille souffrira et elle tentera constamment de l’apprivoiser, de l’attirer. Aujourd’hui, elle essaie encore de le comprendre et peut-être que les violons et le carnet de son père découverts après sa mort l’aideront. Un très beau livre par son thème et son histoire filiale mais aussi par son écriture superbe, un ouvrage qui chante par son vocabulaire (A-L Grobéty est suisse) et sa sonorité qui vous fera vibrer. Ne pas oublier de consulter
la fiche de lecture de l’excellent « Le temps des mots à voix basse », à lire absolument.
« Comment être aimée d’un homme si son propre père celui qui devait aimer sans condition, vous a ignoré, rejetée loin de son amour ? ».
Fiche #206
Thème(s) : Littérature étrangère
Elisabeth HOREM
Shrapnels, en marge de Bagdad
Bernard Campiche Editeur
3 | 206 pages | 02-02-2007 | 8.5€
Suite de tableaux qui représentent un an de la vie d’une femme à Bagdad où elle rejoint un homme déjà sur place. Ecrit à la troisième personne, il ne s’agit pas d’un vrai journal. A son arrivée, elle sait déjà qu’elle aura une vie retirée, quasi récluse. Elle l'accepte et le doit pour elle et pour son entourage. Elle vit enfermée entendant de plus en plus les bruits de la guerre qui demeure omniprésente et pesante. Les sorties sont toujours encadrées, surveillées. La vie continue lentement malgré tout et l’illusion de continuer à vivre est une lutte de tous les instants. De son côté du mur, les instants calmes continuent d’exister mais l’acceptation des événements se déroulant de l’autre côté du mur reste pourtant impossible et à chaque instant cette illusion de vie est remise en cause par l’horreur de la guerre. E. Horem réussit parfaitement à montrer l'opposition des deux mondes si proches et pourtant si éloignés l'un de l'autre. Eux survivent mais les autres ? Elle nous montre aussi simplement presque avec douceur comment la guerre et la violence vous transforment insidieusement jusqu'à vous entraîner à rejoindre le camp de la violence et à vous amener éventuellement à commettre l'irréparable. Un constat sans révolte d’une guerre dont l’issue semble plus qu’incertaine.
« Les gens disparaissent, mais les plantes, elles, pendant ce temps-là, elles continuent à pousser et on aura toujours besoin de quelqu’un pour s’en occuper »
Fiche #189
Thème(s) : Littérature française
Les Contes du tapis Béchir
Bernard Campiche Editeur
2 | 155 pages | 22-01-2007 | 7.9€
Nenni, enfant solitaire et bougon qui dit non à tout rencontre Cricri la souris coquette et Béchir le tapis d'Orient. Béchir lui raconte sa naissance, sa vie et ses aventures. Nenni est captivé et revient chaque jour écouter les histoires de Béchir pendant que Cricri s'endort à côté d'eux. Le tapis passe de mains en mains, de maisons en maisons et témoigne de la vie, du voyage, de l'aventure, de l'amitié, de la mort, des travers et trésors de l'être humain. L'enfant se plait à écouter et finit par s'ouvrir au monde et à l'amitié en renonçant à sa solitude. Livre construit comme une succession de petits contes à lire un à un chaque soir peut-être à voix haute pour partager un moment privilégié avant le sommeil réparateur ! Pour les petits et les grands.
Fiche #185
Thème(s) : Littérature française
Thierry Luterbacher nous conte l'histoire de Calvin, garçon qui veut "ne faire rien", exècre l'école et refuse d'entrer dans le monde des adultes. Par chance il rencontre deux amis sur lesquels il pourra compter en toute circonstance. Pierrot veut devenir tueur et a de bonnes raisons de l'aider et Héloïse Nuage petite aux yeux de cannelle qui court pour le plaisir. Ils décident de partir tous les trois sur les routes, enchantés de quitter ce monde qu'ils rejettent et heureux de profiter de "la liberté nomade" pour réaliser leurs rêves et rencontrer un monde sans entraves. Le monde adulte n'a pas la part belle. L'émerveillement du rêveur Calvin reste constant alors que Pierrot choisit la voie de la violence.
Douceur et douleur se mèlent dans ce texte poétique, hymne à l'amitié et aux plaisirs simples et gratuits, sans rivalité aucune. Rester enfant, rêve ou réalité, la fin du roman décidera !
"Je n'ai jamais été en attente de toi. Je n'ai jamais été en attente des autres. Je prends leur présence. Je la trouve agréable ou désagréable. Je ne la juge pas. Leur bien peut être mon mal et leur mal mon bien. J'aime une personne et peu m'importe ce qu'elle a en elle de bon ou de mauvais. Je l'aime, c'est tout. Je tombe en amour des gens qui n'exigent rien. Pas des gens qui offrent un cadeau et revendiquent un remericement en retour. J'aime les actes gratuits. Je t'aime, c'est tout. Je ne me suis jamais senti redevable."
Fiche #109
Thème(s) : Littérature étrangère
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