« Renoncer n’était jamais au fond qu’une affaire d’habitude. Comme tout le reste. »
Clélia Anfray
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Mk Deville et Philippe Nicloux nous offre une adaptation de deux histoires courtes de R Akutagawa. Dépaysement assuré ! Deux histoires qui se répondent à la frontière de la réalité, des illusions. Dans la première, Tajômaru attend devant la porte de l’enfer et regarde la pluie tomber. Qui est cet homme, et qu’attend-il réellement ? Dans la seconde, un bûcheron découvre le corps d’un samouraï, Takehiro, apparemment assassiné. Tajômaru reconnait les faits et demande à être pendu. Masago, la veuve du samouraï, s’accuse également du meurtre. Takehiro, le mort, annonce par la voix d’une sorcière qu’il s’est suicidé… Où est la vérité ? Peut-être existe-t-il plusieurs vérités ? Mais la vérité est-elle si importante… Une vraie réussite en partie due à la concordance parfaite entre les thèmes de l’histoire et le trait de crayon. A découvrir.
Fiche #413
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Futuropolis excelle pour nous offrir de superbes albums alliant le graphisme aux textes. Clément Belin a choisi d’adapter un roman de JC Izzo. « Les marins perdus » se déroule à Marseille où un cargo, l’Aldébaran, est à quai, immobile et personne ne sait jusqu’à quand. L’armateur s’est fait saisir le bateau et les marins attendent depuis cinq mois un repreneur. Trouvant le temps long, l’équipage quitte le cargo avec une prime mais Abdul et Diamantis, le capitaine et son second, décident de rester et de veiller sur l’Aldébaran. Un troisième marin suite à une mésaventure dans Marseille les rejoindra. Diamantis a quitté dans sa jeunesse son premier amour dans cette ville à laquelle il est encore attaché et décide de partir à sa recherche... Ambiance de marins avec leurs secrets et leurs amours, de villes portuaires et de leurs bas-fonds, de brigands… Le scénario et les illustrations s’épaulent pour ce superbe album très humain qui présente parfaitement l’état d’esprit des marins sur terre et sur mer. Intime et émouvant.
Fiche #409
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Un superbe album pour ce premier tome chez un nouvel éditeur. Thriller où la manipulation est omniprésente : la fille de Kim Wong est retrouvée assassinée alors qu'elle transportait des cobayes humains pour son scientifique de père : scientifique, généticien ou apprenti sorcier ? Modernité ou eugénisme ? Ambition totalitaire et personnelle ou humaniste ? Mia Vélickovic se lance à corps perdu dans cette enquête périlleuse qui risque d'être ardue et ne la laissera pas indemne. On attend déjà la suite prévue pour octobre 2008.
Fiche #407
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Sur la grande île des Terres bleues, le peuple des Clivens vit paisiblement depuis les temps les plus anciens. Agriculteurs et pêcheurs, la vie s’écoule jour après jour. Mais les Norwegs, marins belliqueux, décident d’envahir l’île et d’en annexer une partie. Ewen, le frère du dragon, guerrier légendaire, combat désespérément mais avec une certaine réussite les Norwegs. Pourtant, une nuit, le rebelle disparaît dans les flots. Il est recueilli par un vieil homme et une jeune femme superbe en même temps qu’un troubadour norweg. Il aurait été aperçu en direction des montagnes en compagnie d'une jeune femme et de deux voyageurs. L’équipe est guidée par les rêves d’Alis qui lui ont dicté de mener Ewen à la cascade du saut du dragon… Une œuvre d’art ! Le cahier de croquis en supplément est un petit bijou graphique.
Fiche #408
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Eric Blakeley, vieil ado banlieusard, partage sa vie entre Alice et Pendule son cacatoès fin psychologue. Il gagne sa vie comme portier dans un hôtel de luxe parisien mais sa passion est l’écriture et son troisième roman noir se précise. Ecrivain exceptionnel, puisqu’il est atteint d’agraphie et se voit contraint de requérir les services d’un dictaphone pour son écriture ! En outre, l’insomnie le gagne après des cauchemars récurrents où trois personnages (une femme nue, un homme en smoking et Buffalo Bill) l’interpellent sur son passé et son présent. Chaque épisode s’achève par un étrange cri… Ces insomnies le transforment, le minent et son quotidien personnel et professionnel s’en voit bouleverser. Que signifie ce rêve ? Une enquête est nécessaire… Un univers à la fois étrange et réaliste et une écriture au rythme rapide vous feront dévorer ce premier roman.
Premier roman
Fiche #406
Thème(s) : Littérature française
Amanda, jeune veuve américaine, revient sur les traces de sa jeunesse en Italie qu’elle souhaite faire découvrir à sa fille Lisa. Lors d’une excursion au hasard des routes italiennes, elles se retrouvent totalement isolées, coupées du monde, après un violent orage ayant provoqué un éboulement. Elles y font la connaissance du marquis Eduardo Carleone, ingénieur à la retraite et sculpteur amateur alors que le village est remué par le passé. En effet, un groupe de touristes allemands s’est installé dans le village et le terrible passé rejaillit. Quinze ans auparavant, les bataillons nazis occupèrent le village et leur barbarie ne peut être oubliée par les villageois. Leur haine est extrême envers l’ex- capitaine Herr Grussmann et certains décident de faire justice eux-mêmes. Tensions, émotions, amours, vengeance et pardon, tout y est !
Fiche #405
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Samuel Sfez
Louis et Fanny se rencontrent à l’hôpital. Il accompagne sa belle-sœur pour un accouchement alors qu’elle est veuve depuis peu. Il est professeur d’économie et de piano. Elle est sage-femme et sera bientôt sourde. En donnant vie à ses enfants, elle a perdu et continue de perdre peu à peu l’ouïe (maladie de Beethoven). Comme une dernière épreuve, un dernier plaisir, elle retrouve Louis (mais pas l’ouïe) pour apprendre le piano. Louis est solitaire, secret et certainement blessé. Au fil de leurs rencontres où la parole est loin d’être maître du jeu, ils vont se dévoiler, se désirer, elle témoignera des naissances qu’elle accompagne chaque jour, il sera exigeant dans l’apprentissage (apprentissage de la musique avec le silence omniprésent et si bien rendu par l’écriture de H. Boris) mais lui dévoilera son intimité la plus profonde. Ces rencontres, le vocabulaire employé, la trame, tout se noue avec réussite pour créer un pont, une concordance entre ces deux métiers et ces deux vies a priori si éloignés. Un texte poétique, sensible et émouvant sur la naissance, la vie, l’amour, le handicap et la mort. Hugo Boris nous propose deux romans à ce jour (La délégation norvégienne), de thèmes totalement différents (la marque d'un vrai écrivain) et à découvrir absolument en attendant le troisième !
Premier roman
Fiche #404
Thème(s) : Littérature française
Monsieur Théodore est un employé modèle de la Poste. Solitaire, célibataire à la vie bien rangée dans le calme et la sérénité... Tous les midis, il retrouve dans le café du coin quelques amis pour des discussions simples sur l’actualité. Il a l’air satisfait de son quotidien et n’en demande guère plus. Cette vie irréprochable va peu à peu se dérégler : un vieil homme le contredit lors de l’une de ces discussions amicales, puis le suit... Enfin la Brigade de Répression des Abus en Matière d’Etre l’enlève pour le retenir prisonnier sur une île. Comment le Théodore soumis, irréprochable va-t-il réagir dans cette situation extrême ? Monde ou grand cirque où les Hauts Placés gèrent, par des règles précises et inviolables, absolument tout pour le bien être et le bonheur évidemment de la population… ("Un morceau de terre où tout serait parfait, entièrement sous contrôle... Notre rêve à tous, n'est-ce pas ?") Un monde où Théodore, si peu attentif aux autres, égoïste, se complaisant dans sa solitude, rencontrera l’amour hélas impossible dans cet environnement totalitaire. Mais même dans ces mondes des grains de sable peuvent enrayer la machine temporairement ou durablement là est peut-être la question… Novella de Griffe d'Encre une collection vraiment à suivre.
Fiche #403
Thème(s) : Littérature française
Guy BECHTEL
Le siècle de Tégédor
Editions du Mont
145 | 265 pages | 21-05-2008 | 20€
L'action de ce récit se déroule tout au long de quatre saisons à la fin du XIXème. Tégédor en est son héros, héros mystérieux, sauvage, rebelle, libre et attachant. Son parcours est exceptionnel : ses aventures débutent dans les Cévennes en compagnie de la Lapine, passent par New-York puis par Paris et s'achèvent en héros (mais tragiquement) au point de départ cévenol. Une belle écriture au service d'un bon roman d'aventure (postface élogieuse de Jean-Claude Carrière) qui expose une palette de sentiments humains toujours d'actualité.
Fiche #401
Thème(s) : Littérature française
Miror KKRIST
Tsiganes, 1940-1945 le camp de concentration de Montreuil-Bellay
Emmanuel Proust
144 | 94 pages | 21-05-2008 | 21€
Le gouvernement de Vichy mit en oeuvre avec application (...) le décret du 6 avril 1940 qui astreint à résidence sous surveillance policière tout nomade... Le temps n'était pas à la tendresse et Mirror Kkrist nous décrit au jour le jour la vie du camp de Montreuil-Bellay près de Saumur où plus de 3000 gitans furent internés sous la surveillance efficace et terrible de gendarmes français zélés. Un dessin particulièrement réaliste pour cet album noir et blanc qui nous propose un retour essentiel sur le passé au goût amer...
Fiche #402
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
L’auteur-narrateur est Irakien et passionné de cinéma. Il est persuadé qu’Hollywood l’attend et décide de quitter l’Irak. Le récit est donc constitué de deux parties : la première concerne son épopée pour finalement atteindre Paris puis son vagabondage parisien et la seconde un retour sur son enfance. Son voyage passe par Beyrouth, Damas, Tunis, Aden, Nicosie… Voyage éprouvant, terrible, nulle part il n’est le bienvenu et le scénario du film de sa vie est terrible. Il subira les pires épreuves avec humour et détachement sans jamais perdre espoir. Puis, obtenant l’asile politique en France, après un passage au Rocheton tout près d’ici, il se lance à l’assaut des bas-fonds parisiens sans chercher à s’installer (« J’aspire à cette vie de vagabond »). Il entraîne alors le lecteur dans son errance pleine d’émotions, de découvertes et de références cinématographiques. Il écrit au jour le jour sa vie comme un scénario même si « Dieu est le plus grand scénariste ». Cette errance sera suivie par un retour sur la passé dans le récit de son enfance particulièrement émouvant. Un livre original composé de deux parties totalement différentes.
Fiche #399
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Stéphanie Dujols
Ce texte n’est pas un roman, mais un récit ou plutôt le témoignage d’une femme face à ses angoisses, ses doutes alors que tous ses enfants et son mari l’ont quittée et qu’elle se retrouve seule dans une maison qui, à chaque instant, dans chaque pièce, chaque lieu, lui rappelle l’un d’eux. Une femme qui pense au passé avec mélancolie et parfois tristesse et désespoir : « Irrémédiablement je vais à ma perte. Je suis en train de perdre la mémoire. Je perds mes forces. Je perds ma vie. J’ai perdu ma joie. ». Elle sent sa vie s’éloigner (« Méfiez-vous, la vie passe et ne repasse pas »). Sa seule béquille demeure l’écriture (« Ecrire, c’est tenter de sourire à nouveau. Les mots sont des abris. ») qui lui permet d’exposer tout, du dérisoire au plus profond mais même cette béquille est incertaine puisqu'elle éprouve toutes les difficultés à noircir les pages de ses carnets. Ce petit livre (154 pages) très dense par les thèmes abordés (l’absence, la solitude, la vieillesse, la perte de mémoire, la trahison, l’écriture…) confirme encore les talents de Françoise Lefèvre pour nous faire partager ses sentiments et ses doutes.
Fiche #400
Thème(s) : Littérature française
J'avais découvert Dorothée Piatek avec le superbe album "L'horizon bleu", émouvante récit épistolaire sur la guerre 14-18. Et depuis, je suis cet auteur, et jamais je n'ai été déçu. Deux albums sortent simultanément chez Petit à Petit et valent le détour. L'allumeur de rêves est un conte poétique et attendrissant sur le thème du développement durable, sur la protection de notre environnement et sur l'espoir que la terre immortelle peut toujours renaître. Il s'agit de la quête d'eau d'un enfant accompagné du géant allumeur de rêves afin de nourrir sa graine de tournesol. Le monde est triste, gris, sans couleur mais de cette fleur du soleil jaillira peut-être une vie meilleure si les hommes le souhaitent vraiment. Superbe !
"La fleur possède en son coeur,
comme un secret bien gardé,
les clés de notre bonheur."
Fiche #397
Thème(s) : Jeunesse
Une nouvelle petite sorcière, Violette Dumalasourire, arrive dans une classe de CE2. Elle est glaciale, peu souriante, petite bêcheuse qui regarde de haut ses camarades qui vont évidemment la prendre en grippe. De plus, elle se fait remarquer par ses réponses multiples et toujours en juste en classe. Mais peut-être y-a-t-il une raison derrière ce comportement...
Fiche #398
Thème(s) : Jeunesse
Encore une belle découverte dans cette collection de polars venus du nord. Erica Falck, 35 ans, écrivain spécialisée dans les biographies est revenue sur le lieu de son enfance, petit port de pêche de la côte suédoise. Elle découvre le cadavre d’une amie d’enfance les poignets tailladés dans sa baignoire d’eau gelée. Elle écarte rapidement l’hypothèse du suicide et son enquête débute et les pièces d’un puzzle immense s’emboîteront les unes après les autres. Elle retrouve un ancien camarade devenu policier, toujours amoureux transi d’elle et ils s’épauleront dans cette enquête et dans la vie… Très bon polar au suspense maîtrisé et aux multiples rebondissements qui dépeint façon Chabrol les habitants de cette petite bourgade : la famille riche à la tête de l’entreprise locale, les habitants des grandes villes voisines venant en villégiature dans le petit port, les exclus, les familles implantées de longue date, une petite vie tranquille avec ses petits secrets… Pour notre plus grand plaisir, quatre autres enquêtes d’Erica sont déjà sorties en Suède. Impatience à la retrouver…
Fiche #394
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction :
Lena Grumbach, Marc de Gouvenain
Gary Victor dans ses odyans (histoires racontées devant un auditoire) nous fait rencontrer des haïtiens au centre de la lutte pour le pouvoir mais aussi pour la vie. Un roman sous forme de fables ou de contes qui dresse un tableau acide des politiques haïtiens avides de pouvoir et de richesse et peu préoccupés du quotidien du peuple. Humour, ironie, réalisme, spiritualité, fantastique, voyage au centre de la magie haïtienne et des croyances vaudoues, tout y est ! Une série de personnages inoubliables accompagnent la tentative de prise du pouvoir d’Hannibal Sérafin, que de luttes féroces pour le pouvoir. Vivifiant ! La Fontaine ne renierait pas ce texte ! Gary Victor, un auteur incontournable à découvrir absolument (cf. "Les cloches de la Brésilienne")
« L’histoire de ce pays ne s’écrit pas dans les livres. Elle n’est même pas transmise oralement. L’histoire ici s’écrit dans la boue des cimetières, dans les pactes qui se nouent dans les corridors où pullule la vermine. L’histoire de ce pays, c’est la victoire perpétuelle du Mal sur le bien. »
« Combien d’hommes valables et patriotes n’avaient-ils pas payé de leur vie le fait d’avoir négligé la puissance des forces maléfiques dans ce pays où, d’après les manuels d’histoire, il avait fallu une cérémonie occulte pour conquérir l’indépendance ? »
« Le général recommanda à Hannibal Sérafin d’installer toute sa famille à l’étranger, car ce pays n’était qu’un lieu de passage où l’on s’enrichit vite pour filer ensuite sur d’autres rives »
Fiche #395
Thème(s) : Littérature étrangère
Après la mort de leur père, dans une Amérique encore et toujours traumatisée par les événements du 11 septembre, une famille d’exilés norvégiens est en deuil. Erik Davidsen, psychiatre divorcé et sa sœur, Inga, jeune veuve dévastée d'un écrivain célèbre, découvrent une lettre qui leur apprend un pan inconnu de leur père et un secret passé. Pas à pas, les personnages vont se lancer dans leurs souvenirs et leurs rêves pourront aussi les épauler dans cette enquête qui est une enquête à la fois sur leur identité profonde et singulière comme sur leur pays et ses fondements, pays en dépression (« On aurait dit que la Dépression ne finirait jamais ») et en interrogation. Roman psychologique profond, puissant et dense.
“Nous sommes des créatures fragmentées que nous cimentons comme nous pouvons, mais il y a toujours des fissures. Vivre avec les fissures, ça fait partie d’une vie, mettons, relativement saine.”
“En même temps, réalité est devenue en Amérique synonyme d’ignoble et de sordide. Nous pratiquons le culte de l’histoire vraie, de la confession intégrale, de la téléréalité, des gens réels dans leur vie réelle, les mariages de célébrités, leurs divorces, leurs vices, l’humiliation offerte en spectacle – notre version des pendaisons en publics.”
“Il est aussi blanc que vous, mais ses origines sont mêlées. Sa grand-mère était à moitié noire, avec un peu de sang cherokee, ce qui faisait de lui un Noir dissimulé, comme il disait. Vous savez, une seule goutte de sang. Miranda me lança un coup d’œil ironique. C’est ça l’Amérique.”
Fiche #396
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Christine Le Boeuf
Pete Hautman nous emmène en 2074 dans un pays (ESA, les Etats Sécurisés d’Amérique) où le risque, le danger ont disparu. Nouvelle version de "1984", la société est régie d’une main de maître et la population totalement « encadrée » : « Je pense que ce pays a commencé à partir en brioche le jour où on a décidé qu’on préférait la sûreté à la liberté ». Fiction ?
Bo Marsten, 16 ans, nous raconte son histoire dans ce monde sécuritaire. La danger n’existe plus puisque le risque est banni. Le sport est trop dangereux et pourtant, Bo féru de course à pied entend bien continuer de l’exercer. Les lois de sûreté s’enchaînent les unes après les autres et les délits provoquent emprisonnements à répétition. Mais Bo a décidé de résister et s’exilera dans un pays voisin où l’on peut encore courir et vivre, même dangereusement !
Fiche #392
Thème(s) : Jeunesse Littérature étrangère
Traduction : Marie Cambolieu
Tarek et Vincent Pompetti s'étaient déjà associés pour la trilogie "Raspoutine". Nous les retrouvons dans un conte de corsaires et pirates. L'Angleterre et la France sont en paix et les corsaires du Roi de France s'ennuient. Jusqu'au jour où des pêcheurs rapportent au capitaine la Guigne une fiole mauresque d'où s'échappe un génie qui leur offre la possibilité de réaliser trois voeux. Unique occasion de partir à la recherche du célèbre et mystérieux trésor de Rackham ! Les planches de Vincent Pompetti sont vraiment de petits bijoux !
Fiche #391
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Nous retrouvons avec grand plaisir Guillaume Lebeau pour le deuxième volet de sa trilogie La dernière guerre 2008-2011. Après Pentagone, l'action d'Hexagone se déroule en France en 2009 alors que Nicolas Sarkozy est toujours au pouvoir épaulé par son équipe de conseillers omniprésents. Le livre s'ouvre sur une série d'attentats kamikazes meurtriers en plein centre de la capitale. Le colonel Jean d'Estavil, héros du premier volume, se trouve aux premières loges puisqu'il avait reçu une mystérieuse convocation d'une organisation d'informateurs très discrets (WOPR) et particulièrement bien informés des agissements étatiques et souterrains. N. Sarkozy et ses conseillers tentent de gérer la crise mais dans le même temps, au Moyen-Orient, la situation empire et devient catastrophique. Les Américains bombardent Téhéran... L'escalade vers le pire semble enclenchée et irrémédiable. Jean d'Estavil, en compagnie de Vigdis, la journaliste islandaise, plonge à corps perdu dans l'enquête sur ces attentats qui en annoncent peut-être d'autres et encore plus terribles... Le colonel n'a toujours pas fait le deuil des disparitions étranges et subites de sa femme et de son enfant. Il continue de chercher des explications et ce qu'on lui cache. Deux enquêtes qui progressent en parallèle ou conjointement... Guillaume Lebeau réussit encore avec brio à tenir en haleine le lecteur dans ce deuxième opus de politique fiction hélas si réaliste !
Fiche #388
Thème(s) : Littérature française Polar/Thriller/Noir
Super album venu du Canada qui met en image une ritournelle ou comptine présentant l'alphabet ("Crème glacée, limonade sucrée, Dis-moi le nom de ton cavalier !"). Des illustrations fraiches et adorables et il ne vous reste plus qu'à chanter maintenant !
Fiche #389
Thème(s) : Jeunesse
Ludovic MASSÉ
Pip et la liberté
Pierre Mainard
132 | 82 pages | 01-05-2008 | 13€
"Pip et la liberté" est un conte, une fable de Ludovic Massé (1900-1982) qui sous la forme d'une aventure d'animaux échappés d'une ferme révèle la destinée humaine et le cheminement des hommes avides de liberté et désireux de donner un sens à leur vie. Evidemment la période à laquelle fut écrit ce court texte n'est pas innocente, 1939 avait déjà vu la guerre civile espagnole et quelques "faits d'armes" mussoliniens, le tout ébranlant le destin des hommes. Une belle et grave parabole à redécouvrir.
Fiche #390
Thème(s) : Littérature française
Olivier FERRA
Sylvain SANCHEZ
Où la neige ne fond jamais
Lion des Neiges
131 | 24-04-2008 | 15€
Une association de la vallée de Chamonix nous offre une BD en deux tomes explorant la question tibétaine (préface du Dalaï-Lama). Trois destins de tibétains, trois résistances, trois refus de capituler face au rouleau compresseur chinois, mais aussi trois drames... Dolma, jeune fille khampa finira en exil, le vieux moine Tsewang pour avoir manifester et crier "Vive le Tibet libre" se retrouve en prison, et Norbu s'engage dangereusement après moult hésitations et réflexions. Une BD humaine, émouvante et réaliste qui témoigne du destin d'un peuple prisonnier d'un conflit de longue date... A soutenir !
Fiche #387
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Henri Vallès est un ancien flic bordelais. La mort de sa femme l’a mis à l’écart et l’a plongé dans une folie sans retour. Il est totalement démoli, instable, incontrôlable (il n’hésite pas à employer l’imparfait du subjonctif !), sa mémoire lui fait défaut et quelques hallucinations répétitives hantent son existence. Pourtant, des flics ou agents spéciaux viennent le rechercher pour élucider une affaire obscure liée au monde sectaire. Bizarre, non ? Vrai enquêteur ou pigeon de service ? Hervé Vallès ne s’en inquiète pas et n’est même pas conscient de cette interrogation… Le premier cadavre d’une jeune femme sacrifiée qui en annonce d’autres lui permet de rencontrer la belle et insaisissable Edmonde, une femme aussi étrange que lui et qu’il retrouve étonnamment tout au long de ses déplacements… Ce Don Quichotte enquêteur inconscient arrivera-t-il à sauver sa peau parmi ces êtres machiavéliques, sans limite et fous ? Un roman dense sur fond de folie, de conditionnement, de sectes et de barbouzes.
Fiche #386
Thème(s) : Littérature française Polar/Thriller/Noir
Geoffroy GUYOT
Gaëtan DEFFRENNES
La salle des pendus
Ouest-France
129 | 48 pages | 17-04-2008 | 6€
en stockUne bande dessinée dont l'histoire se déroule dans un lieu au top de l'actualité ! Le Nord mais à une époque où les mines survivent tant bien que mal, sous De Gaulle, en 1962. Le jeune Daniel bon élève souhaite à tout prix suivre son père et ses amis à la mine. Il se souviendra de sa première journée sous terre puisqu'à l'issue de cette journée, le Beau Léon sera retrouvé pendu et assassiné dans la fameuse et bien nommée salle des pendus. L'enquête est ensuite prétexte à plonger le lecteur dans ce monde disparu. Le coup de crayon de Gaëtan Guyot est vraiment superbe et particulièrement adapté à cette histoire et à son thème.
Fiche #384
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Encore un superbe album jeunesse pour cette rencontre après 45 années d'absence entre Wei-Ming le marin et Mémé Xiao. Ils se sont connus enfants mais ont suivi des chemins différents. L'appel de la mer a été plus fort que tout pour Wei-Ming. Ces retrouvailles les transportent littéralement dans leurs souvenirs, souvenirs heureux de jeunesse ou chagrin d'amour. Pourtant, aujourd'hui, dans ce retour sur le passé, tout est source de bonheur. Superbes illustrations et joli conte. A découvrir.
Fiche #385
Thème(s) : Jeunesse
Patricia HUET
Sophie DUFEU
Le secret de Coqueline
Gulf Stream
127 | 11-04-2008 | 9.5€
Une petit album au texte et aux illustrations vivifiants. Qui ne sait pas demander un jour comment la lune tenait en l'air ? Pourtant une nuit, elle tomba sous les plumes de Coqueline. Superbe cadeau pour cette poule qui n'a jamais pondu d'oeuf... mais pourra-t-elle la protéger et la conserver, rien n'est moins sûr...
Fiche #383
Thème(s) : Jeunesse
Une jeune fille de quinze ans vit au Liban pays au destin toujours aussi tragique. Tout concourt à son enfermement : enfermement dans son pays, enfermement dans la guerre et dans la mort, enfermement par les tabous de la société libanaise et par la religion, enfermement familial. Sa mère (française) est partie et a quitté brutalement la famille (« …cette mère si admirable qui bravait les vagues comme elle bravait quotidiennement les interdits d’une société : avec panache. Une attitude que seuls les gens passionnés peuvent avoir, ou les déments. »). Son père ne survivra pas à ce départ mais la protègera jusqu’à son dernier souffle (« Avant de mourir, il a exigé que je dispose d'une part d'héritage égale à celles de mes frères alors que le droit musulman ne prévoyait qu'une demi-part pour les femmes. Je me suis accrochée à cet épisode pour imaginer le père que j'aurais aimé avoir, complice, jaloux de ma liberté, faisant barrage entre moi et les diktats de la famille qui me voulait rangée et docile »). La guerre est omniprésente. Même si elle fait partie intégrante du quotidien et même si la population l’a finalement apprivoisée, elle empêche les enfants de profiter ou plus simplement de vivre pleinement leur enfance. La jeune fille affronte avec vigueur ces deux guerres, guerre familiale et guerre de son pays. Pourtant au milieu de ce tableau noir, l’amour persiste à éclairer sa vie. Amour éclair qu’elle rencontrera au milieu des ruines et des morts qui se révèlera vicié sans réussir à l’abattre. Histoire d’une adolescente indestructible, rebelle, d’une énergie folle qui veut continuer envers et contre tout à mordre la vie à pleines dents, « libre et rebelle, une enfant nomade en devenir, en partance », et dont l'exil facilitera peut-être l'oubli ("Pas de pardon, je n'y crois pas mais l'oubli, un jour, pour alléger la mémoire...").
Fiche #381
Thème(s) : Littérature étrangère
La petite collection ‘Texte au carré’ vous invite à nouveau au voyage et à la rêverie, dans un style à la fois renouvelé et conforme à la collection. Un court texte préfacé par Cécile Wajsbrot qui vous laissera rêveur, suscitant questionnement et interrogations. Un train bleu recouvert de glace passe chaque soir dans une gare. Un homme et un enfant l’observent. Ce train fantôme recouvert de glace, sans destination connue, ne s’arrête pas. Aucun passager ne semble avoir pris place dans les wagons. D’où vient ce train ? Où va-t-il ? Où sont passés les voyageurs ? Où mène ce voyage ? Voyage dans les rêves ou dans l’histoire ? Tant de questions que l’atmosphère invoque et suggère à tous. L’enfant silencieux parait avoir quelques réponses, mais d’ailleurs qui est cet enfant ? Rêve ou retour sur le passé ? Un passé tragique nous relie-t-il à ce train ? Cadex nous gâte encore, les Textes au Carré, une collection indispensable.
Fiche #382
Thème(s) : Littérature française
Une femme est dans sa voiture. Elle conduit accompagnée par une fillette installée sur la banquette arrière. Elles roulent sans but de villes en villages à travers les collines piémontaises. Qui est cette gamine qui semble être liée étroitement à cette femme ? Fille, amie, rencontre, enlèvement, ou… Peu de dialogue, de l'observation, du silence... ("L'enfant n'est pas habituée à la consolation des adultes. L'enfant ne connaît que la négligence des hommes"). Cette errance que seule la contemplation des paysages italiens interrompt renforce jour après jour ce lien. Voyage impérieux pour se retrouver et se libérer enfin des silences d'une enfance meurtrie. Un beau texte tout en pudeur agrémenté des superbes illustrations de Patricia Cartereau.
Fiche #380
Thème(s) : Littérature française
Le narrateur originaire des Flandres vit à Marseille. Il reçoit un jour un courrier de la mère de son ancien ami Dino qui vient de se suicider la veille de ses trente ans. Comme Dino l’a souhaité, elle le prie de venir mettre un peu d’ordre dans les notes de son fils. Retour sur une jeunesse perdue, une jeunesse masculine festive, libre, jouissive, dépendante à l’alcool, aux filles et aux drogues. En découvrant page après page le contenu des carnets de Dino, le narrateur retrouve sa jeunesse passée, son histoire, son identité acceptée ou non. Il revient sans complaisance mais avec chaleur, sans idéaliser le défunt mais avec mélancolie, sur cette amitié pesante qui unit les deux jeunes hommes. Amis et pourtant si différents. Le passé d’une jeunesse folle croquant à pleines dents la vie (« Il s’était parfait et fatigué ») et un présent morne et triste s’entremêlent chapitre après chapitre. Peu à peu, ce retour sur le passé et l’environnement se referment sur le narrateur jusqu’à l’étouffer (« Tomber malade de la tête est tout de même, je le sais, la chose la plus facile qui soit dans cette affreuse Flandres ») et seul un retour définitif vers la lumière du sud le sauvera. Un beau texte pas du tout larmoyant sur la mort, l’amitié et l’insouciance.
« … la vie n’est qu’un apéritif, on en reste toujours à l’apéritif des choses et la mort arrive »
Premier roman
Fiche #379
Thème(s) : Littérature française
Benoît DU PELOUX
L'oiseau qui fait la pluie et le beau temps, Tome 1
MPF
122 | 46 pages | 01-04-2008 | 12€
Un royaume paisible où le roi est adoré de ses sujets. Exceptionnel, non ? Le roi doit sa popularité à l'oiseau magique qui fait la pluie et le beau temps. A la demande des habitants, le temps s'adapte à leurs besoins, jusqu'au jour où l'oiseau tombe malade et la pluie ne cesse alors de tomber. Pato le blaireau et Fino le lapin, deux courageux habitants du royaume, décident de partir en quête d'un gland magique, seul remède efficace pour soigner l'oiseau. Mais quelques conspirateurs mal intentionnés veillent... Un joli conte et de belles illustrations pour cette bande dessinée pour petits et grands.
Fiche #378
Thème(s) : Jeunesse Bandes dessinées
La famille Raab coule des jours heureux à New York. Le père, Benjamin, revendeur d’or, assure un train de vie aisée à sa femme et ses trois enfants. Kate, plus âgée que ses frère et sœur, est chercheur dans un laboratoire. Jusqu’au jour où le FBI débarque dans le bureau du père avec un mandat d’arrêt. Il aurait participer au blanchiment d’argent au profit de trafiquants colombiens. Presqu’instantanément l’édifice Raab s’écroule. Le père doit témoigner avant d’être condamné. La famille est contrainte de prendre part à un programme de protection du FBI et doit déménager et changer d’identité. Sauf Kate qui refuse et ainsi se sépare définitivement de ses proches. Mais les règles d’honneur du cartel colombien ne permettent pas de se perdre dans la nature si simplement. Ces tueurs sans pitié sont sur les traces du père, de la famille et de leurs proches. Qui tirent les fils de cette traque ? Pourquoi Benjamin après avoir témoigné et purgé sa peine disparaît-il ? Il vous faudra attendre les dernières pages pour démêler les rôles et responsabilités de chacun et ce qui est sûr, c’est que vous y arriverez très vite tant l’intrigue, le suspens et la tension habitent chacune des pages. Un thriller palpitant, très cinématographique, au rythme échevelé que vous dévorerez aux côtés de Kate qui lutte pour sauver sa peau à chaque instant.
« Blue zone : Expression employée par les agents du programme de protection des témoins quand le sujet protégé a disparu. Quand personne ne sait s’il est mort ou vivant. »
« La zone bleue, répéta le directeur adjoint en le foudroyant du regard. C’est quoi ça ? Du jargon Witsec pour dire "j’en sais foutre rien" ? »
Fiche #376
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction : Alexandre Boldrini
Charles Balanda, 47 ans, est architecte, homme moderne, hyper pressé, vie professionnelle étouffante mais qui semble le satisfaire. Il partage sa vie avec Laurence et sa belle-fille Mathilde. Sa relation avec Mathilde éclaire son couple triste et en dérive. Alors qu’il rend visite à ses parents, une lettre de son ami d’enfance, Alexis, lui annonce la mort de sa mère, Anouk. La nouvelle le bouleverse et marque un tournant définitif dans sa vie. Anouk représente son enfance, point de référence joyeux pour les deux amis pourtant si différents, elle leur a appris la vie (sous toutes ses facettes) épaulée parfois par le fameux Nounou, vieux travesti baby-sitter à ses heures perdues. Pour se retrouver, retrouver son passé et sa vie, il part à la recherche d’Anouk et d’Alexis. Un long voyage dans le passé, pas toujours gai, jamais désespéré, qui permettra à Charles de se réconcilier avec lui-même. Il rencontrera Kate, réincarnation ou héritière d’Anouk, et les cinq enfants qui l’accompagnent. En leur compagnie (que serait Anna Gavalda sans les enfants ?), il retrouvera la vie simple et sans artifice à laquelle Anouk les avait initiés. Anna Gavalda excelle pour nous transporter dans cette nouvelle histoire si humaine et si contemporaine, un bel hymne à la vie, « la vie. Ce privilège. ».
« Il y a la première manche, la deuxième, la belle, la revanche et la consolante. C’est une partie pour rien… Sans enjeu, sans compétition, sans perdants… Pour le plaisir, quoi… »
« Mais tout est histoires, Charles… Absolument tout, et pour tout le monde… Seulement, on ne trouve jamais personne pour les écouter… »
Fiche #377
Thème(s) : Littérature française
Vaux Livres vous avait vivement conseillé (et vous conseille encore) à sa sortie le premier roman de Sylvie Aymard et le deuxième était donc attendu avec impatience. Le style demeure intact (l’humour en moins), toujours aussi fluide et agréable dans son dépouillement. Venus du nord, une mère et son fils vivent dans un petit village du midi (« Le soleil ne résout pas tout, même si le linge sèche plus vite ici qu’à Dunkerque, où je suis née »). Toni quelque peu en marge est en quête de son père qu’il n’a jamais connu, sa mère lui assurant qu’il était décédé. Cette mère aimante à l’extrême lui ment et le protège par amour et par peur (« Bien sûr je fais semblant de m’intéresser au reste, comme tous les vivants qui s’agitent. Ecouter les autres parler d’eux, pour s’oublier, ne demande pas d’effort. Mais seul mon fils est mon cabanon sur terre… Tout cet amour pour lui me dévore. »). Mais le mensonge et le silence sont rarement salvateurs ; le drame se noue inexorablement, jour après jour, jusqu’à cette nuit de juin où Toni va disparaître… Encore une réussite, un auteur à suivre absolument.
Fiche #375
Thème(s) : Littérature française
Une bande dessinée qui ravira les amoureux de Paris entre autre puisqu’elle nous transporte dans le Paris de 1910 alors que la terrible crue s’est installée, une crue qui crée l’inquiétude et bouleverse le comportement habituel de ses habitants. La Seine et Paris sont au centre de cette histoire (Sequana nymphe, fille de Bacchus, ayant donné naissance à La Seine et à ses affluents). Les explications avancées à ce cataclysme ne sont pas toutes météorologiques… Le scénario s’intéresse aux destins de trois personnages très différents : Monseigneur Chelles, évêque à Notre-Dame, Jean Faure, malfrat dangereux en cavale et Alice Treignac, jeune femme, fille de médecin, étudiant ardemment pour devenir la première femme médecin.
Léo Henry signe son premier scénario dans cette remarquable collection TriLoGies d’Emmanuel Proust alors que les habitués de Vaux Livres retrouveront l’excellent Stéphane Perger déjà rencontré avec plaisir dans l’exceptionnelle trilogie Sir Arthur Benton. Son coup de crayon nous permet une visite de Paris de l’époque incomparable. Superbe ! On attend la suite avec impatience.
Fiche #374
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
« La Réserve » en bordure d’un lac des Adirondacks accueille une population privilégiée de l’Amérique des années trente. L’histoire débute lors d’une soirée organisée par un célèbre neurochirurgien newyorkais. Parmi ses invités figure Jordan Groves un peintre qui vient regarder les œuvres que le Dr Carter Cole a acheté à l’un de ses collègues. Le destin de Jordan Groves basculera lors de cette soirée après sa rencontre avec la fille adoptive du docteur, Vanessa Cole, femme sulfureuse, survoltée, habituée de la rubrique fais divers des journaux, troublante et quelque peu inquiétante voire dérangée. Attraction inéluctable qui malgré son attachement à sa femme et ses enfants bouleversera son quotidien, provoquant confusion et déroute. Comme un papillon devant la bougie, Jordan sait qu’il va se brûler mais il ne peut réprimer son attirance (« Soit on était attiré par elle comme par un aimant, soit on éprouvait de la répulsion vis-à-vis d’elle ; et dans le cas de Jordan, c’était les deux »). Dans le cadre magnifique et sauvage de la Réserve, la folie de Vanessa entrainera son entourage vers un destin tragique inéluctable. Loin de là, l’Histoire s’oriente également à la tragédie. Quelques écrivains américains célèbres amis de Jordan Groves ont déjà rejoint la guerre civile espagnole aux côtés des républicains. Parallèle entre histoires personnelles et collectives que le célèbre zeppelin Hindenburg relie…
Fiche #373
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Pierre Furlan
Sorj Chalandon nous fait rencontrer Jacques Rougeron, douze ans, bègue et fils unique d’un père dur et à la main lourde et d’une mère en retrait. La famille est pauvre et habite Lyon. Malheureux de son bégaiement, sa vie est plus légère grâce à son ami, à son frère, à son confident, Bonzi qui l’aide et le soutient. Ils ne font qu’un. Jacques tente de se soigner grâce aux herbes jusqu’à en être malade. Son bégaiement ne l’empêche pas d’être amoureux des mots (et de Guignol). Le lecteur suit avec intérêt les aventures de ce gamin et sa lutte contre ce bégaiement qui n’en finit plus. Un livre touchant sur l’imaginaire des enfants, sur le langage et le bégaiement.
Fiche #372
Thème(s) : Littérature française
Thomas d'Entragues aurait voulu être écrivain et il n’est que nègre pour le compte d'anciens sportifs ou autres vedettes en mal d’autobiographie. Depuis vingt ans, Thomas demeure dans l'ombre de ces sujets d’écriture. Son premier roman n’a jamais trouvé d’éditeur et il se contente de copier la vie des autres : « Vous écrivez bien, parait-il. Biographies, autobiographies, vous reprenez les vies, vous les refaites, vous les arrangez. Je me contente de les réécrire, dis-je, un peu surpris de sa présentation. Sur le fond, je ne change rien. Une vie est une vie. ». Un jour, son éditeur lui fait rencontrer Victor Dantès, homme d'affaires au parcours singulier, qui lui confie plus qu’un livre (« Faites moi sa biographie et donnez-moi ainsi ma part manquante ») : écrire sur son fils, Paul Moreira-Dantès disparu aux Etats-Unis où il était parti pour adapter au cinéma le roman de Céline, "Voyage au bout de la nuit". Thomas part sur ses traces, provoque les mêmes rencontres que lui, et esquisse progressivement un portrait d'un homme insaisissable. En parallèle de cette quête, la vie de Thomas apparaît avec son isolement, ses doutes et échecs. Peu à peu, il se sent proche de Paul, de ses dérives et de sa chute, et une certaine connivence les relie, double quête d’identité. En découvrant Paul, Thomas se découvre aussi jusqu’à la rencontre des deux hommes. Une enquête parsemée de nombreuses références littéraires qui baigne dans une mélancolie attachante.
Fiche #371
Thème(s) : Littérature française
Rébecca Dautremer servie par les superbes illustrations d'Arthur Leboeuf nous conte une version new-yorkaise revue et corrigée du petit chaperon rouge. Un enfant doit traverser New-York pour retrouver son grand-père et naturellement, chemin faisant, il rencontrera le célèbre Chili Vince, le loup du quartier qui saura lui soutirer l'adresse du grand-père. S'en suit une course entre les deux pour rejoindre le vieux Johnson mais celui-ci a plus d'un tour dans son sac !
Fiche #370
Thème(s) : Jeunesse
Toussaint Legoupil est né noir en Chine puis fut adopté par Léon Legoupil maire de Croquefigue-en-Provence et sa femme Mado qui croque un peu plus que des figues ! Le ton est donné ! Pourtant Toussaint écrasé par l’amour maternel décide d’en savoir un peu plus sur ses origines et entreprend un voyage en Chine accompagné de Mimi sa promise imposée et de sa chauve-souris. Voyage périlleux riche d’enseignement à tout point de vue ! Il lui révèlera la vérité et une terrible machination au terme d’aventures dignes des plus grands OSS 117 mais avec un humour déjanté en plus. Entre roman interactif et interpellations du lecteur, toujours loufoque et plus fou, un roman léger pour partir dans un long voyage hilarant. On sent vraiment que J-M Erre s’est fait plaisir et vous le suivrez avec entrain et bonheur dans sa folie.
Fiche #364
Thème(s) : Littérature française
Alors que chaque jour est édité un nouveau livre concernant mai 68, Didier Daeninckx propose un angle original et attachant de quelques acteurs anonymes de cette période. François et sa femme Dominique (prénom neutre) ont une vie paisible et heureuse, leur couple résiste avec succès au temps. Seul François ressent une certaine lassitude face à son environnement professionnel de plus en plus déshumanisé et périlleux. Un message électronique arrive un matin dans sa boîte mais Dominique le lit et y répond à la place de son époux. Il s’agit d’une prise de contact d’un ancien camarade de lycée abonné au site « camarades-de-classe.com ». Dominique devient prisonnière de cette première réponse et suit avec intérêt les échanges de ses anciens amis présents sur une photographie de voyage scolaire. Les échanges révèlent l’histoire terriblement humaine et attendrissante de la banlieue rouge des années 60 à 70 mais dévoilent aussi un autre mystère fondateur de ce couple attachant…
Fiche #365
Thème(s) : Littérature française
Histoire d’une folie. Folie d’Esther, ou d’Esther et de Blandine, ou de Blandine et d’Esther… Ou plutôt folie de sa (leur ?) mère ? Destinée d’une famille allemande qui quitte l’Allemagne au lendemain de la défaite de 1918. Etats-Unis, eldorado promis. Déception, retour désespéré dans l’Allemagne nazie. Internement, électrochocs, recherche d’une vérité, d’une histoire au milieu d’indices véridiques ou non. Folie sans retour, voyage dans un pays dont on ne revient pas servi par une écriture dépouillée, hachée en harmonie parfaite avec cette tragédie.
Fiche #366
Thème(s) : Littérature française
Trois voix pour une disparition. Maurice Gil, marié, une fille, part brusquement aux Antilles, à Marie-Galante pour des motifs professionnels, clame-t-il tout du moins. La date de retour n’est pas fixée mais implicitement prévue. Pourtant il ne reviendra pas et disparaîtra même après quelques temps passés à Marie-Galante. Fuite ou révolte, sa disparition demeure inexpliquée. Un nouveau départ pour tracer sa voie d’homme libre ? Trois voix expriment leurs sentiments sur ce départ et ce mystère. Lucie sa petite fille qui ne l’a pas connu part quelques jours à Marie-Galante pour suivre ses traces, le chercher sans le chercher vraiment. Ses yeux indigo la font immédiatement reconnaître par les Antillais qui ont connu son grand-père mais ils conserveront le silence. Sa fille Isabelle également aux yeux indigo n’a jamais accepté ce départ et cette disparition. Le deuil reste impossible et un espoir même tenu subsiste. Enfin, l’Antillais qui a proposé à Maurice ce poste et qui l’a accueilli sur l’île, parle de cet homme qui reste pour lui une légende malgré le sentiment de culpabilité qui l’habite. Un beau texte sur un homme absent mais dont on ressent terriblement les sentiments si humains et si actuels qui le torturent.
Fiche #367
Thème(s) : Littérature française
La narratrice d’une quarantaine d’années vit depuis six mois dans le Cotentin à la Hague. Professeur de biologie, elle participe à un programme du Centre Ornithologique de Caen mais vient aussi oublier son passé et peut-être en guérir. Peu à peu, au rythme des marées (ou des déferlantes), Claudie Gallay installe magistralement une atmosphère singulière à mesure que la narratrice découvre les habitants de ce bourg. Solitaire, elle observe la mer et fait corps avec elle, lui crie son désespoir et sa douleur. Pourtant les habitants l'accepteront et elle découvrira les histoires enfouies et tues du village ; étrangère au village, elle s’intéresse malgré tout à tous et à leurs trajectoires. Elle loge dans une maison balayée par le vent et les embruns où vit également Raphaël sculpteur insatiable et passionné qui regarde avec circonspection le monde et en propose sa vision d'artiste. Il vit une relation privilégiée avec sa soeur Morgane, belle femme de 30 ans admirée de tous les hommes. Autour d’eux s’animent une série de personnages (« A la Hague, les vieux et les arbres se ressemblent pareillement torturés et silencieux ») comme Nan une vieille folle habillée de noir qui a vu disparaître toute sa famille en mer ou La Cigogne une petite fille décharnée au quotidien difficile mais qui continue de rêver… Jusqu’au jour où Lambert arrive au village pour vendre la maison où il venait en vacances avec ses parents. Le passé va ressurgir… Nan prendra Lambert pour un autre, un certain Michel. Progressivement se révèleront les liens exacts qui unissent tragiquement Lambert à ce village et peu à peu, le miroir se brisera et chacun aura son rôle ou sa vision des évènements… Un grand roman fait de rancunes, de haine, de mensonges, de non-dits où la mer est omniprésente (« Ces vagues les déferlantes. Je les ai aimées. Elles m’ont fait peur »), la mer cruelle qui broie et détruit mais qui accueille aussi les passagers éphémères que sont les hommes et les oiseaux.
« C’est son rêve et les gens qui ont des rêves ne risquent pas grand chose. Et ceux qui n’en ont pas, ils risquent quoi ? Je ne sais pas… mais c’est moins facile pour eux »
"Des oiseaux par milliers volent vers les feux
Par milliers ils tombent par milliers ils se cognent
Par milliers aveuglés par milliers assommés
Par milliers ils meurent.
Le gardien ne peut supporter des choses pareilles
Les oiseaux ils les aiment trop
Alors il dit tant pis je m'en fous
Et il éteint tout..."
Jacques Prévert, le gardien de phare aime trop les oiseaux
Fiche #368
Thème(s) : Littérature française
Deux hommes devenus célibataires sont solitaires. Ils vivent tous les deux dans le souvenir d’une femme (l’une est morte et l’autre a quitté son mari) et séparés par une cloison. Ces deux fantômes errent dans une résidence désertée. L’un a plus de 80 ans et occupe ses journées à écouter le même air au piano, "Les scènes d’enfant" de Schumann, un air que sa femme jouait et rejouait avec perfection comme une obsession. Les deux hommes se rencontrent régulièrement et chacun renvoie à l’autre son image et l’image de la femme absente. Le silence tranche avec cet air de Schumann et la mélancolie du jeune homme trouve son double dans ce vieil homme élégant et patient. Peu à peu, ils dévoilent à mots couverts et discrètement leur histoire, timidement, par petits indices. Une complicité indéfectible les unit dans ce temps qui passe inexorablement. Un beau texte mélancolique sur deux hommes naufragés unis face à la solitude, à l’amour perdu et au temps qui passe.
Premier roman
Fiche #369
Thème(s) : Littérature française
Moïra est au chevet de sa sœur Amy plongée dans le coma depuis cinq ans. Elle lui parle, lui raconte ce qu’elle est, ce qu’elle a été et ne sait si sa sœur l’entend et mieux, la comprend. Moira est tenaillée par les remords, extrêmement sensible, écorchée vive, elle ne s’est jamais acceptée. Petite sauvageonne, elle vit au bord de la mer, sa grande amie, son double : la nature, les oiseaux, la mer éclairent sa solitude. Lorsqu’âgée de onze ans, sa petite sœur naît, c’est la rupture. Elle s’éloigne de sa famille et part loin en internat étudier. Sans amis, elle y demeure isolée. Elle ne se sent aimée et proche que de sa tante Til qui pourtant ne sera pas là lorsqu’elle en aura vraiment besoin. Femme toujours en souffrance, l’amour et l’aide de son mari la laisseront également insatisfaite : elle est différente et demeurera différente des autres. Sa vie est racontée délicatement, avec pudeur et retenue, confession douloureuse de sa vie d’enfant à sa vie de femme, du sentiment de culpabilité depuis l’accident de sa sœur. Récit au féminin envoûtant.
« Quoi qu’il en soit. J’avais appris une leçon, une leçon que tu n’as sans doute pas encore apprise toi-même, et que tu n’auras pas le temps d’apprendre, et c’est la suivante : on suit son cours. On est toujours soi, et on persévère, malgré les deuils, les erreurs. Les femmes, en particulier. Nous savons garder des secrets. Nous lestons d’un poids nos culpabilités, nos passions, nos haines, nos mensonges, et nous les laissons s’enfoncer, au point qu’on pourrait croire que rien de tout cela n’a jamais existé. Mais nous ne sommes pas dupes. Mes secrets, je peux tous les compter. »
Fiche #363
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Marie-Claude Pasquier
Un écrivain participe à de nombreuses conférences et en devient blasé : aucun imprévu, il connaît à l’avance chaque question et les réponses attendues et finalement émises. Une vision réaliste et quelque peu désabusée de ces rencontres, ni l’auteur ni le lecteur ne sont épargnés. Pourtant avant l’une d’elles, son regard erre et laisse libre cours à son imagination. Chaque visage est observé et entraîne des divagations concernant chaque personne. Il imagine, il invente, des vies, des sentiments, un quotidien, avec une tendresse féroce parfois enrichie d'humour léger. L’écrivain retrouve sa passion, créer des histoires, jeu dangereux parfois, surtout lorsqu’il observe plus précisément la femme qui lit son texte avec tant de sensibilité… Un beau texte parfois ironique, parfois désabusé, toujours modeste et réaliste, sur la création littéraire, la force de l’imagination.
« Mais pourquoi écrire sur des choses qui existent indépendamment de toi ? Comment rendre l’indicible par des mots ? … Ecrire le monde tel qu’il est, tâcher d’emprisonner une nuance, un parfum ou un son dans des mots, c’est un peu comme jouer du Schubert en présence du compositeur qui ricane dans la salle obscure. »
Fiche #362
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Sylvie Cohen
Après avoir enchanté ses lectrices et lecteurs avec son ‘Mal de pierres’, Milena Agus nous offre à nouveau un portrait de femme, une femme indépendante et incomprise, à la recherche d’un amour (impossible ?). La côte sarde est au centre du roman : cette femme y possède un terrain et une maison très convoités qu’elle refuse de céder quitte à rester dans la pauvreté. Occupée à résister aux promoteurs, Madame multiplie pourtant les rencontres au grand dam de certaines… Une femme hors norme que nous fait découvrir sa jeune voisine, narratrice de quatorze ans. Un deuxième livre toujours aussi charmant sur les femmes, la différence et l’amour.
Fiche #361
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Dominique Vittoz
Serge Joncour vous propose dix-sept rencontres, entre amour et solitude, dix-sept personnages qui n'en finissent pas d'aimer. Dix-sept instantanés parfaitement ancrés dans la réalité et la modernité et vous avez déjà certainement rencontré l’un des personnages de S. Joncour !
Fiche #360
Thème(s) : Littérature française
Hubert Nyssen nous emmène à la rencontre des trois frères V : Vincent, Victor l’aîné et Valentin le plus jeune narrateur de cette histoire. Valentin s’est installé à proximité de Victor marié à Colette. Victor a toujours repoussé son jeune frère, s’en est éloigné. Lorsque Victor disparaît lors d’un accident de voiture, Valentin cherche à expliquer le comportement de son frère et se rapproche de sa belle-sœur. Elle a aussi l’envie de se confier, de parler de son couple, de son entourage. Valentin sait l’écouter et découvre des faits singuliers restés inconnus de lui qui concernent son frère et ses parents. Colette raconte tout, sans retenue, avec ironie, avec détresse, avec inquiétude… Leurs dialogues les rapprochent irrésistiblement bien que Valentin soit homosexuel. Il apprend que son frère fut amoureux d’une professeur d’art Julie Devos. Cet amour platonique demeurera tu mais l’ombre de Julie obscurcira constamment les relations du couple. Valentin rencontre Barbara qui a connu Victor à qui il s’était confié. Elle lui dévoile la fin possible tragique et horrible de Julie provoquant la culpabilité infinie de Victor. Un texte fouillé sur la mémoire, mémoire consciente ou inconsciente, subjective ou interprétée, mémoire familiale partagée ou non, sur l’écriture et la langue (« Ecrire, je le découvre, c’est s’éloigner de ce qu’on voulait écrire »), sur l’appréhension d’un récit, les relations et sentiments humains, la fiction et la réalité.
Fiche #359
Thème(s) : Littérature française
Paul Lambion pousse un jour la grille de l’école Sainte-Rouge et dès lors le malaise s’installe jusqu’à ce que l’atmosphère devienne étouffante. Il remplace un ancien professeur respecté et admiré de tous. Il reprend son cour sur le temps et assurera un cours de questions sans réponses. Dès son arrivée, il apprend que deux camps s’opposent dans l’établissement : la chapelle ou la salle du Manifeste et chacun jure sa fidélité au camp de son choix. En l’accueillant, le directeur lui montre la chimère qui protège l’établissement, une catastrophe s’abattrait sur l’établissement si elle venait à disparaître. Peu à peu, Paul se détache de l’établissement occupé par des élèves de plus en plus insupportables et de moins en moins intéressés, de son métier, de sa vie. En outre, les évènements vont se précipiter : la chimère disparaît, une élève se suicide, un feu se déclare… Son enquête révèlera la véritable personnalité de son prédécesseur. Pourtant, les vacances de la Toussaint (et de la mort) assureront une longue pause à Paul Lambion… Luc Baba excelle pour installer progressivement une atmosphère étrange et pesante tout en parsemant avec réussite son texte d’ironie et d’humour noir.
« On ne devrait jamais les ouvrir. Quoi ? Les cadeaux. Pourquoi ? T’imagines la collection de rêves qu’on se ferait en l’espace d’une vie ? »
Fiche #358
Thème(s) : Littérature étrangère
Pascal GILLES
Pavot JACQUES
L'Irlandaise
Editions du Point d'Exclamation
101 | 48 pages | 31-01-2008 | 12€
En 1862, en pleine guerre de sécession, Eva O'Connel, pure irlandaise, débarque aux Etats-Unis. Elle est vite confrontée aux horreurs de la guerre. Ces évènements tragiques lui imposent un destin qu'elle reprend, en bonne irlandaise, rapidement en main en partant à la recherche de son oncle Richard, brebis galeuse de la famille. Premier tome de cette héroïne de western.
Fiche #357
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Toute une famille fut assassinée, en 1920, à Tannöd, un hameau de Bavière. L’affaire n’a jamais été résolue et Andrea Maria Schenkel s’en est inspirée pour son premier roman. Il situe le drame aux lendemains de la seconde guerre mondiale, les rancœurs et la pauvreté perdurent. Le nazisme rode encore et la religion demeure bien ancrée dans le quotidien de ces campagnes. Dans une ferme isolée, une famille complète et son employée, vivant quelque peu en marge et n’échappant à quelques rumeurs, sont assassinées sauvagement à la hache. Sans témoin, l’enquête semble vouée à l’échec. Comme à la barre du prétoire, différents témoins vont fournir un à un, chapitre après chapitre, dans un kaléidoscope de voix discordantes ou non, leurs avis et éclairages sur cette affaire. Seules les prières de la mère créent un intermède à cette litanie renforçant cette atmosphère étrange. Une réussite dans la forme et le fond pour ce premier roman classé meilleur roman criminel du printemps 2006 par les libraires allemands.
« Je te le dis, on est tout seul toute sa vie. On naît seul et on meurt seul. Et entre les deux, j’étais prisonnier de mon corps, prisonnier de mon désir. Je te le dis, il y a pas de Dieu dans ce monde, il y a juste l’enfer. Et l’enfer, il est sur terre, dans nos têtes, dans nos cœurs. Le démon est en chacun de nous et chacun peut le faire sortir à tout moment. »
Fiche #356
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction : Stéphanie Lux
BRIAC
Armen
Le Télégramme
99 | 49 pages | 27-01-2008 | 10.1€
Une version bretonne du "Silence de la Mer" à découvrir. L'action se déroule en 1943 dans le phare d'Armen au large de l'île de Sein. Fanchec gardien du phare doit partager son mince espace de vie et son quotidien avec le lieutenant Kloetz et ses sbires. Ce huis clos propice aux confessions suscitera progressivement une étrange relation entre les deux hommes. Un scénario intéressant éclairé par un beau coup de crayon.
Fiche #353
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Points de suspension excelle pour nous faire découvrir des contes venus d'ailleurs. Chae Insun nous propose ce conte coréen où maman lapin partant au marché lui interdit d'ouvrir la porte et de sortir de peur qu'il rencontre le loup. Mais évidemment, lapinou désobéira puisque le loup ne vient pas, il ira le chercher ! Il rencontrera le petit loup prostré chez lui car sa mère lui a interdit de sortir de peur qu'il rencontre le tigre. Ils partiront donc à la rencontre du tigre... Morale de l'histoire : toutes les mamans et tous les papas se ressemblent...
Fiche #354
Thème(s) : Jeunesse
Cathy DUTRUCH
Flow BASSOT
L'enfant qui avait une mésange sur la tête
Editions d'à côté
97 | 27-01-2008 | 12€
Un jour, une mésange bleue se pose sur la tête d’un enfant, rencontre qui bouleversera leur vie. Ils vont apprendre à se connaître, à s’écouter pour devenir inséparables au grand étonnement de leur entourage. Un livre tout en hauteur et tout en poésie (Prévert rode encore) avec des illustrations très fines qui évoque l’Amitié et réveillera l’imagination des petits et des grands.
Fiche #355
Thème(s) : Jeunesse
Mondia Laser, entreprise performante, est vendue à l’Inde par un fonds spéculatif américain. Lors de la négociation, les dirigeants de l’entreprise, sans volonté devant les banquiers et autres actionnaires, cherchent d’abord à sauver leur patrimoine. Les employés sont licenciés et l’occupation de l’entreprise suite à une trahison tourne court. Gary l’un des employés subit dans le même temps un second drame : son fils stagiaire, sous-payé, exploité, malgré les engagements de son employeur n’est pas embauché et se suicide. Il laisse des documents permettant à son père et sa petite amie d’organiser « une rencontre » avec les dirigeants de Mondia Laser… Ils entrent en action, ils n’ont plus rien à perdre (« Nous ne sommes pas des enfants malades et nous n’avons pas besoin d’appareils pour vivre »), leur destin est tracé. Le Nausicaa, navire de luxe, accueille les dirigeants et leurs amis (le monde politique et le monde du spectacle sont naturellement bien représentés) pour fêter une année de bénéfices records. Gary et ses amis prennent possession du bateau afin de montrer à ceux qui les ont anéantis ce qu’est la peur, l’angoisse de l’avenir lorsque son destin est dans d’autres mains. Les caractères et faiblesses vont se révéler. Le lecteur est happé par l’histoire, ressent ce désespoir et ce découragement devenus si courants dans notre société et attend de découvrir jusqu’où cette aventure les mènera. G. Mordillat nous livre une version contemporaine d’une révolte, révolte des salariés humiliés et méprisés qui ont tout perdu et décident de répondre à leur hiérarchie et à cette société qui les a expulsés et condamnés. Le contraste entre ces deux mondes est gigantesque, il s’agit bien de deux mondes totalement opposés, deux mondes déconnectés, l’un se servant de l’autre. Un roman social essentiel, miroir d’une lourde réalité que l’on lit d’une traite. A méditer…
« C’est l’enfer des pauvres qui fait le paradis des riches », Victor Hugo
Fiche #352
Thème(s) : Littérature française
Quelques années plus tôt, l'apocalypse a réduit à néant l'humanité. Survivants, un père (malade) et son fils suivent la route du sud. Une route grise, infinie, encombrée de ruines, de cendres et de cadavres. Un chaos terrible dont on ignore les raisons, McCarthy n’explique pas, il décrit. Végétaux et animaux ont disparu. Quelques survivants, apeurés ou agressifs, effrayés ou violents, affamés ou cannibales... Ecoute et attention permanentes, instincts de survie… Peur constante, peur de la mort, peur de l’autre… Des fantômes se méfiant de tout et de chacun. La recherche de la nourriture, d’un abri sont des épreuves quotidiennes, éprouvantes et dramatiques. Pourtant, le père influe à son fils la force de se lever chaque matin et de repartir. Ils progressent vers le sud appuyés sur leur caddie contenant toute leur richesse, vers la mer mais avec quel espoir, quel but ? Le père (l’Homme) le sait-il seulement ? Destinée humaine… Dans ce monde hostile et barbare, ils tentent de conserver leur humanité au cours de cette épopée quasi-biblique, chacun restant attentif à ce que l'autre ne tombe pas dans la barbarie. La fin de l’humanité n’est cependant pas définitive et un léger espoir filtre encore… La narration oscille entre récits, descriptions et dialogues épurés, réduits au strict minimum, le rythme du livre s’adapte parfaitement au rythme de progression des deux survivants auxquels le lecteur s’attache irrémédiablement. Le lien et la relation (la fusion) entre son père et son fils, sans mots inutiles, sont particulièrement réussis.
Prix Pulitzer 2007
Fiche #351
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Hirsch
A la fin du XVIIè, sur une plage française, s'échouent les restes d'un navire. Seule une petite Sarrasine à la peau mate survit. Elle ne parle plus. Ceux qui la recueillent la nomment Garance mais l'échangent rapidement contre une dette de jeux. Elle est ensuite accueillie par un couple d'aubergistes en mal d'enfant. Elle tombe amoureuse d'un jeune garçon, enrôlé tambour dans l'armée du roi de France qui finira aux galères. Elle assurera seule l'éducation de leur fille dans ce monde en perpétuelle ébullition... Superbe album (prix Baobab de l'album 2007), les illustrations de François Place sont toujours aussi exceptionnelles et en parfaite harmonie avec l'histoire.
Fiche #350
Thème(s) : Jeunesse
Pour son neuvième roman, Yves Ravey nous offre un court texte, direct, franc, vif adoptant les règles classiques. Unité de lieu : un bar glauque où quelques jeunes femmes « offrent leurs services », un appartement où un homme les observe et la rue qui les sépare. Unité de temps : l’action se déroule sur quelques jours. Unité d’action : une intrigue bien définie au rythme très cinématographique. Les gendarmes débarquent chez monsieur Rebernak, l’interrogent mystérieusement et remarquent sur sa voiture, une Ambassador 72, une trace qui pourrait provenir du choc avec une jeune fille en vélo. Coupable idéal que cet étranger qui regarde à l’aide de ses jumelles le bar peep-show d’en face et qui devient chauffagiste de l'établissement ? Pas un mot de trop pour déméler les fils de cette intrigue pseudo-policière sur un thème d’actualité…
Fiche #349
Thème(s) : Littérature française
Réédition d'un texte publié anonymement en 1861 qui nous transporte dans l'univers des ouvriers de la sidérurgie en Virginie-Occidentale. Paysage et atmosphère brumeux, ouvriers exploités et méprisés... Hugh Wolfe est l'un d'eux et avec les résidus de métal, il sculpte, il sculpte des personnages hyper-réalistes, aux expressions et aux attitudes humaines, en attente... Lors d'une visite de bourgeois encadrés par les cadres de l'entreprise, une sculpture représentant une femme attire leur attention. Entre admiration, condescendance et mépris, leur dialogue avec Hugh éveillera sa conscience politique et sociale pour son plus grand malheur...
Fiche #348
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Carole Zalberg
Un livre bien frais ! La petite mouffette Chanel a tendance de faire profiter un peu trop souvent ses amis de son odeur si particulière... Jusqu'au jour où lassés, ils l'aspergent de parfum, du meilleur. Chanel est désespérée, elle ne peut se débarasser de cette odeur ! Mais heureusement, ses parents trouveront la solution ! Vivifiant !
Fiche #347
Thème(s) : Jeunesse
Une maison de santé à Montana en Suisse accueille de jeunes rescapées des camps nazis lors de l’été 1945. Elles sont entourées par une équipe médicale attentive et soucieuse de les ramener vers la vie. L’un des médecins nous livre son journal. Un an, un an à épauler, lentement, pas à pas, ces femmes qui ont subi, vécu, vu le pire. Enthousiaste et même optimiste, il ressent cependant les difficultés de ces femmes à repartir vers un avenir éclairé. Peu à peu, il établira une complicité avec l’une d’elle et son journal traduira leurs échanges, leurs espoirs et attentes en montrant que chacun y puise des ressources qui lui permettront de (re)vivre ou qui le transformeront. Qui a besoin de l'autre ? Chacun sans l’autre n’est rien.
Premier roman
« L’intimité avec soi-même est une liaison que d’aucuns évitent toute leur vie. D’autres y sont contraints, luttant contre de terribles souvenirs qui ne se laissent pas faire. Qu’on ne s’y trompe pas : la clairvoyance rend libre. ».
Fiche #345
Thème(s) : Littérature française
Amok et Shrapnel sont nés en Afrique alors qu’Amandla vient des territoires d’Outre-mer. Des trajectoires différentes mais un point commun, leur couleur de peau, le noir, pour le meilleur et le pire. Une couleur pesante, qui modifie le regard des autres, biaise les relations, qui ne sera jamais transparente. Elle ne permet pas de s’installer, de prendre racine et les renvoie encore et constamment à des racines plus que lointaines. Cette couleur permet-elle de trouver son identité propre ? Chaque membre du trio la considère différemment : Amandla rasta convaincue la glorifie avec son histoire, Amok la repousse et pourtant appartient viscéralement au monde « noir », Shrapnel en est fier mais ne sait trop où se situer et sa vision est quelque peu brouillée par son amour des femmes blanches... Shrapnel espère en une unification du monde noir intra- et extra-Afrique alors qu’Amandla ne croit qu’en un développement intra-muros. Roman riche, dense, d'une écriture travaillée, sur un thème rarement abordé.
Fiche #346
Thème(s) : Littérature étrangère
Un matin d’hiver, Coldhaven, petit village écossais, se réveille dans l’horreur. Moira certaine que son mari est le diable se tue avec ses deux plus jeunes enfants, et seule Hazel sa fille aînée est épargnée. Ces disparitions bouleverseront la vie de Michael le narrateur. Ses parents se sont installés à Coldhaven quelques décennies plus tôt et comme eux, il s’y est toujours senti étranger. Cet événement entraînera Michael vers un retour dans le passé et sur lui-même qui lui confirmeront ce qu’il avait découvert à la mort de ses parents : le destin tisse ses fils bien loin dans notre passé et se met en place, tranquillement, par petites touches que seuls quelques indices ténus évoquent. John Burnside démontre ici tout son talent de conteur dans une ambiance écossaise noire et étrange.
« J’aurais dû me rendre compte que tout récit est une contamination, d’une façon ou d’une autre. »
« La seule chose qui compte, de toute façon, c’est le présent. C’est la seule chose qui compte, car le présent est la seule chose qui existe. La lumière. La mer. Le vent. Quel que soit le moment où on s’arrête pour regarder, il n’y a que le présent. Le présent dure toujours. Je secouai la tête. Je ne le croyais pas. Ou plutôt, je ne croyais pas que lui croie ce qu’il disait. Il avait beau me confier un témoignage de mourant, je crus qu’il ne faisait que philosopher. »
Fiche #341
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Catherine Richard
A la mort de Stig Warren publiant les livres de B. Osborn, écrivain mondialement connu, sa femme et sa dernière maîtresse se retrouvent. Cet écrivain a toujours eu l’obsession du secret et de la discrétion, discrétion face à son histoire personnelle et politique, mais également discrétion devant son œuvre : « L’époque n’est pas au secret n’est-ce pas ? On ne veut plus de secrets. Tout doit être élucidé. ». Sa femme le découvrira progressivement selon les informations que son mari voudra bien lui distiller mais de larges zones d’ombre subsisteront. Maître pour brouiller les pistes, ses identités furent multiples, identités motivées par son histoire politique en RDA et par son désir d’écrivain de s’effacer devant son œuvre et toujours attentif à ne pas brouiller son œuvre par son image. Il cherchera toujours à faire partager au plus grand nombre son œuvre tout en masquant au mieux son identité et son histoire. Les deux femmes entreprennent un voyage pour se rendre sur la tombe de Stig qui leur échappera également. Elles se dévoileront, se raconteront pour tenter de percer les secrets de cet homme qu’elles se sont partagé (« Stig ne s’était pas caché pour le plaisir de se cacher ») mais cette traque (aidée par Thomas Ahorn « spécialiste des écrivains qui effacent à grandes eaux les traces d’eux-mêmes ») ne leur permettra pas jamais de lever le mystère de cet homme et de son passé : « Il a fait le maximum de concessions à l’anonymat et n’a pas pu aller plus loin. Vouloir la gloire pour un moi nimbé de mystères, un moi sans nom, dont on ignorerait la genèse. Pourquoi ? Parce que l’auteur doit être fiction lui-même, fiction bâclée, mutilée par lui-même ? Ne pas donner prise au moindre biographe, le plonger dans le brouillard pour que l’œuvre domine, ensoleillée au-dessus des brumes, tel un dieu qui aurait obtenu le silence des ego, le sacrifice de l’homme… ». B. Osborn serait bien perdu dans le monde littéraire français contemporain…
« Un écrivain est un être immatériel, une pensée qui se déroule, et vous vous escrimez à localiser un être de chair en un point sur la terre. Ce que vous avez entrepris n’a pas de sens. »
Fiche #342
Thème(s) : Littérature française
Florian Courson est cameraman spécialiste des documentaires. Il travaille souvent avec Mona Rochedelle mais réaliser des documentaires n’est pas une longue route tranquille aujourd’hui. Son dernier projet est « l’art et l’effroi » et nécessitera plusieurs tranches de tournage faute de financement suffisant. Pour subsister, Florian accepte des tournages d’évènements sportifs. Lors des championnats d’athlétisme se déroulant à Paris, il croise Amina Kazera seule athlète représentant le Swahingu quelque peu égarée dans ce grand cirque. Ce petit pays d’Afrique centrale supporte le règne d’un pouvoir fort, l’opposition réelle ou provoquée entre deux ethnies crée de graves troubles (euphémisme) et la France, pays des Droits de l’Homme (…), gère au mieux ses intérêts au milieu de tout ça. La rencontre d’Amina sera pour Florian un éclair, une fulgurance. Il lui promet d’aller à sa rencontre dans son pays puisque le projet « l’art et l’effroi » doit le conduire au Swahingu pour filmer des statues aux visages traduisant l’effroi ou la douleur. Jusqu’à présent, Florian est peu au fait de la réalité des pays africains, du quotidien des populations et des relations franco-africaines. Son voyage lui ouvrira les yeux, d’abord progressivement puis brutalement et tragiquement. Il sera confronté à la réalité et à l’instabilité constante de ce pays. Il découvrira mais trop tard l’implication de la France dans ces évènements et dans l’état déplorable de certains pays africains. Il ne pourra demeurer inactif devant ces évidences… Un roman fort, émouvant, réaliste, parfois violent et brutal, qui nous transporte au sein d’un drame que de nombreux pays africains continuent de vivre sous l’œil intéressé des diplomaties occidentales… A lire absolument.
Fiche #343
Thème(s) : Littérature française
Une petite chance est l’histoire d’une attente, attente interminable et douloureuse d’une petite fille et de sa mère. Le père médecin humanitaire part dans des contrées lointaines et dangereuses. La petite fille commence à ressentir le danger de ces expéditions. Sa mère tente de la rassurer mais il faudrait qu’elle soit elle-même totalement convaincue pour y réussir… Même le recours aux probabilités s’avère inefficace… Un livre grave et léger, émouvant, teinté d’humour et de candeur.
Fiche #344
Thème(s) : Jeunesse
Mortimer et Constance Boulu dits les Capouilles habitent en marge de Cons sur Lombe dans une maison en ruine. Personne ne sait exactement d'où ils viennent, ni qui ils sont. Pauvres, ils vivent modestement au jour le jour et sont appréciés des Consiens. Jusqu'au jour où le Maire décide de leur faire cadeau d'une belle maison au centre du village et de leur assurer gite et couvert. Une cérémonie "grandiose" est préparée dans le plus grand secret pour la remise des clés. Tous se félicitent de cette générosité qui pourtant ne sera pas aussi bien reçue par les Capouilles... Cette chronique agréable, pleine d'humour et de tendresse, nous mène à la rencontre d'un petit village et de ses habitants les plus attachants et originaux. Comme quoi les meilleures intentions du monde peuvent provoquer les conséquences les plus tragiques ("Ce n’est pas parce qu’on n’a rien qu’on n’a rien à cacher").
Fiche #339
Thème(s) : Littérature française
Ce texte est une conversation entre Alberto Moravia et Dacia Maraini romancière qui fut sa femme. L'enfance de Moravia nous est toute dévoilée : son père, sa mère, ses deux soeurs, son frère... famille omniprésente et pourtant trop étriquée pour lui. Il parle de sa maison, de ses vacances, de ses lectures, de ses souvenirs d'enfant solitaire et malade ("Isolé et séparé de la vie commune par ma maladie, j'étais devenu sauvage. J'avais une timidité pratique..."), de ses engagements... Aucun de ses sentiments ne nous est caché et sa femme saura lui montrer le lien entre ses personnages romanesques et lui-même ("Toute mon enfance a été un long et inexplicable malaise. Jusqu'au jour où je me suis mis à écrire"). Entretiens qui nous rendent l'homme attachant et nous incitent à (re)découvrir ses romans.
"Non, j'ai refusé ce monde. C'est pour cette raison que je suis ouvert à toutes les nouveautés. Il n'y avait absolument rien qui me plaisait dans la vie de famille. Pour moi la vraie vie était en dehors de la maison ; c'est-à-dire libre, autonome, aventureuse.".
Fiche #340
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : René de Ceccatty
William Andy est un loser ordinaire quelque peu déprimé ("Or, moi, je voulais être différent. Comme tout le monde"). Sa vie est occupée par de petits métiers jusqu'au jour où, en distribuant des journaux à la sortie d'une bouche de métro, il devient prophète médiatique en proposant des solutions pour supporter la fin du monde ("La fin du monde, je ne suis ni pour ni contre. Je ne m'en réjouis pas bien sûr. Je ne la déplore pas non plus, ça ne sert à rien."). Evidemment remarqué par les grands patrons des médias, im se retrouve face aux caméras pour annoncer, préparer ou contenir la fin du monde ("Notre 'no future' n'était pas agressif, il se voulait apaisant")... Comédie grinçante, ironique, réaliste, apocalytique, tout y est ! Pour bien débuter cette nouvelle année...
"A l'ère du slogan, il vaut mieux pondre 'just do it' qu'Ulysse. La preuve : j'ai des Nike et j'ai pas lu Joyce."
Fiche #336
Thème(s) : Littérature française
Le salon de Montreuil m'a permis de découvrir un nouveau petit éditeur espagnol qui vient d'être traduit. Tous ses livres sont des petites merveilles, un catalogue exceptionnel : des vrais contes originaires de divers pays avec des illustrations toujours superbes et au service de l'histoire. Je ne vous en présente qu'un mais vraiment les autres sont aussi à découvrir (site de l'éditeur). Un berger garde ses moutons et sauve un jour un corbeau d'une épine douloureuse. Nous suivons alors les périgrinations du corbeau de maison en maison ce qui lui permettra par un chemin détourné de trouver une compagne au berger. Superbe !
Fiche #337
Thème(s) : Jeunesse
La production de Gecko est toujours aussi parfaite. Il s'agit cette fois de la rencontre entre un garçon et une petite fille malade. Elle est atteinte du syndrome de XP qui l'oblige à se protéger du soleil, seule la lune est son amie. Le risque de cette maladie incurable est aussi de l'oublier et de se trouver confronter plus longtemps qu'il ne faut aux rayons du soleil. Superbe et émouvant.
Fiche #338
Thème(s) : Jeunesse
Alice Grangé a trente ans et n’a pas connu sa mère disparue alors qu’elle avait quatre ans. Elle crie et hurle sa douleur de ne pas se souvenir d’elle, de son visage, de son corps. Aucune image ne vient l’aider. Le style du texte traduit cette douleur extrême qui l’empêche de vivre. Seule une couleur bleue occupe ses souvenirs. La narratrice nous conte sa jeunesse accompagnée par son père, présent mais muet. La parole n’est pas au centre de leur relation et il ne lui parlera pas de cette mère disparue. Au côté de son amie Hannah (« Hannah est la sœur que je n’ai pas eue et qui m’a choisie ») qui sait l’écouter, elle tente de remonter le passé. Quelques instants avant de mourir, son père lui murmure que sa mère a aimé un autre homme, un peintre dont il lui révèle l’identité. Pour connaître sa mère mais aussi pour se connaître et achever le livre de sa vie, Alice part immédiatement à la recherche de cet homme.
Les phrases sont courtes, le style vif et le lecteur participe, ressent la douleur d’Alice. Un livre que l’on lit d’une traite. On n’oublie pas les livres de Laurence Tardieu.
Fiche #335
Thème(s) : Littérature française
Béatrix Beck nous offre un conte enchanteur qui ravira les lecteurs amateurs de chat ou non(« Ecrire comme on rêve »). La narratrice, Olga Bredaine, prof de lettres à la retraite, veuve, sans enfant, reçoit un petit chaton (Soizic) en cadeau. Olga va conserver le chat et sa place va devenir de plus en plus grande ; d’abord près d’elle puis contre elle. Un jour d’orage, le miracle se produit : il parle ! Et ce n’est que le début… Le chat exprime ses désirs (d’enfant) et ses peurs. Olga s’y habitue rapidement, l’écoute et l’observe avec attendrissement, même si Soizic reste et restera un chat (« C’est normal, ne pouvant être une vraie enfant, elle se veut une vraie chatte »). Une vraie écriture au service d’un conte merveilleux sur une nature toute en poésie et en harmonie avec les humains.
Fiche #334
Thème(s) : Littérature française
A force de contempler chaque nuit, le petit homme tombe amoureux d'elle et va la décrocher. Il essaiera alors de la rendre heureuse mais sans succès, la lune tombe malade. Il préfèrera la remonter dans le ciel mais on saura enfin pourquoi la lune s'absente une fois par mois... Superbe !
Fiche #332
Thème(s) : Jeunesse
Un homme arrive sur la plage. Il est seul et s'assoit face à la mer. Immobile, il l'observe, en attente. Seuls deux gamins s'approchent et tentent de lier connaissance. Le village s'inquiète. Qu'attend-il dans ce lieu proche de l'Espagne ? Quelqu'un ? Quelque chose ? Jérôme Lafargue dans ce tout petit texte montre son habileté à établir un cadre et une atmosphère qui emporteront le lecteur. Une réussite.
Fiche #333
Thème(s) : Littérature française
Après l’inoubliable immeuble Yacoubian, Alaa El Aswany nous emmène à la rencontre des Egyptiens résidant à Chicago. Férocité, tendresse et humanité éclairent la description de ses congénères. Les chapitres se succèdent en donnant la parole aux personnages qui appartiennent à plusieurs générations : exilés dans les années 60 ou installés après les attentats du 11 septembre… des exils qui traversent les générations mais dont les causes n’évoluent guère. Chaque personnage est lié à l’Université de Chicago, ville omniprésente dans le livre et leur vie quotidienne reste marquée par les douleurs de l’exil, jamais l’Egypte ne les quittera, les Américains étant aussi là pour la leur rappeler (ils ne seront jamais vraiment américains, exil et sérénité sont-ils compatibles ?), cette Amérique disparate entre amie et ennemie… Comme dans l’immeuble Yacoubian, la religion est évidemment présente, pesante, biaise les relations et hante les couloirs de l’Université autant les esprits de la diaspora égyptienne que les relations américano-égyptiennes. Fresque magistrale aux multiples facettes qui prolonge avec brio l’immeuble de Yacoubian.
Fiche #331
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Gilles Gauthier
Annie SAUMONT
Anne Laure SACRISTIE
La rivière
Editions du Chemin de Fer
74 | 42 pages | 25-11-2007 | 15€
Deux enfants s'en vont pêcher. Vincent le plus âgé accompagne Joseph curieux de tout. La narratrice les observe tout en lisant Bachelard... L'eau et la nature prennent toute leur place dans ce récit mais d'autres acteurs apparaissent subrepticement : un couple, un promeneur, une jeune fille disparue... Les illustrations superbes s'accordent parfaitement à ce texte qui dévoile par petites touches un drame.
Ce livre fait partie de la collection à deux voix des Editions du Chemin de Fer qui consacre la rencontre inédite entre un auteur et un artiste.
Fiche #329
Thème(s) : Littérature française
Albert Pêcheur a dédié sa vie à son travail et à son Bureau. Il se désespère de n'être pas reconnu et de ne pouvoir obtenir une promotion en regard de son investissement. Et puis, un jour, un Ministre doit visiter leur bureau. Visite au pas de course, évènement insignifiant qui va pourtant bouleverser à jamais la vie d'Albert... ambiance kafkaïenne...
Ce livre fait partie de la collection à deux voix des Editions du Chemin de Fer qui consacre la rencontre inédite entre un auteur et un artiste.
Fiche #330
Thème(s) : Littérature française
Olaf CANDAU
Un an de cavale
Guérin
72 | 261 pages | 24-11-2007 | 14€
en stockOlaf Candau et sa femme vous proposent de les accompagner dans leur tour du monde en vélo (20000 km) pendant lequel ils graviront également quelques sommets dont un 8000 m ("...il s'agit de contourner un premier gendarme en passant dans une vertigineuse pente gelée que Marianne n'ose regarder en face Bernard l'assiste, taillant des marches, la rassurant dans l'escalade de deux autres gendarmes, installés ici comme par abus de pouvoir."). Le vélo se révèle un moyen de transport idéal pour sortir des grandes routes touristiques et ouvrir ces portes dévoilant à chaque fois un monde différent. Un voyage à la rencontre des autres, accueillants, amicaux ou non, toujours décrits avec humour et simplicité : "En parcourant le monde, nous avons découvert qu'il est peuplé de salopards. De tous types et de toutes variétés : d'adorables et d'authentiques, d'exotiques et de ternes, de tendres et d'arrogants ; le monde en est peuplé... Certains endroits du monde sont plus riches d'autres... Etre un bon élément ne dépend pas forcément du PNB...". Qui de l'adorable salopard chilien, des salopards rouges tibétains, des minis salopards éthiopiens préférerez-vous ? Il vous faudra lire ce petit carnet de route pour le savoir.
Fiche #328
Thème(s) : Littérature française
Emmanuel Pons l’an dernier tua sa femme et eut quelques difficultés à rédiger les faire-part ! Cette année, son ami, Patrick Barrault, est soulagé : sa mère si haïe vient enfin de mourir (« Ma mère est morte. L’autre bonne nouvelle, c’est qu’elle est morte riche… »). Son père ne la supportait plus non plus et se suicida quelques années plus tôt sous l’œil bienveillant de sa femme. Fils unique, il hérite donc de la fortune colossale de sa mère. Dès l’enterrement, Patrick montre sa différence et son détachement : « Ils m’ont dévisagé froidement quand j’ai garé ma Ferrari jaune à côté du corbillard. Je les comprends. Moi aussi, je l’aurais préférée rouge, mais c’est une sportive de location, et je n’ai pas eu le choix ». Mais Patrick se trompe en pensant qu’il est débarrassé de cette mère si éloignée de lui, elle continuera de lui gâcher chaque instant de son existence. Il entreprend de gérer sa nouvelle fortune et devient rapidement un home trader averti et efficace. Si efficace qu’il invente une méthode permettant de prévoir les évolutions des cotations. Mais quand il s’aperçoit que cette méthode et ses indices et courbes s’appliquent à tout, y compris aux humains (« Si j’achète quelqu’un, c’est parce qu’auparavant, je l’ai vendu et que je dois remettre ma position à zéro. Il n’y a pas d’achat sans vente à suivre, pas de vente sans rachat. C’est une question de temps ») et donc à son entourage, le dérapage, spécialité d’Emmanuel Pons, n’est pas loin…
Fiche #327
Thème(s) : Littérature française
Une enfant nait dans la campagne. Heureux évènement et pourtant, ni elle, ni le lecteur ne connaitront ses parents : « Un jour, ils m'ont poussée dans un placard, puis ils ont refermé la porte. Et je ne les ai jamais revus. Ni la femme qui m'a sortie de son ventre. Ni l'homme qui me portait un peu.J'aurais dû en mourir, s'il n'y avait eu cette bête, entrée par la foret, sous le carreau cassé. ». La survie devient évidemment dès ses premiers jours sa préoccupation première à laquelle la Chatte contribue principalement. Elle lui apprendra tout, innocemment. La sauvagerie et le retour à l’état d’animal la gagnent et la transforment rapidement. Au fil des lignes, le lecteur se sent à la fois si proche d’elle dans cette lutte pour la survie et si éloigné devant les moyens mis en œuvre. Et puis, un jour, au détour du chemin, elle retrouvera l’Homme. Un retour dans ce monde sera-t-il possible ?
« La vérité, c’est que le chat forestier devient la bête avant le cri. Il est comme le tapis de feuilles où la proie imprudente est allée se motter. Quand il s’élance soudain, on dirait que les arbres le suivent. Qu’il entraîne après lui un bout de forêt. »
« Si bien qu’il faut partir. Ici aucune bête ne reste hors d’oreille trop longtemps. Narine flairante, elle se coule aux passe justes, retourne à ses sentiers de discrétion. »
« Jamais je n’aurais cru qu’il y avait tant de manières de souffrir pour désapprendre la forêt. »
Fiche #326
Thème(s) : Littérature française
Taiwan, dans les années 1950. Tiemin est parti à la guerre quelques années plus tôt alors que son idylle avec Wenhui prenait une place prépondérante dans leur vie. Wenhui l’attendit et à son retour, ils se marièrent. Pourtant, Tiemin vivait avec ses souvenirs de guerre et était gravement atteint de tuberculose. Wenhui lui est alors totalement dévouée et se consacre exclusivement à sa guérison. Pourtant lors de sa convalescence, Tiemin va rencontrer des personnes engagées politiquement qui vont le détourner peu à peu de sa femme qui, dans le plus grand désespoir ("Elle eut peu à peu le sentiment que tout vie demeurait solitaire") et en espérant les sauver, commettra l’irréparable. Un texte mélancolique et triste sur le destin tragique d’une femme amoureuse et d’un homme qui la délaisse pour son engagement.
Fiche #324
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Marie Laureillard
La vie s’ouvre devant Samuel Tristan lorsqu’il quitte sa famille à quinze ans («Fuguer est le contraire d’un suicide : on part pour vivre»). Il aime la nuit et la lecture. Ces deux passions l’entrainent dans des mondes autres que les pays qu’il découvre au gré de ses pérégrinations. Le style et la lecture de ce livre sont à l’image de cette fugue ou fuite infinie qui se vit à un rythme effréné. Cet adolescent en construction, en quête d’absolu et miné par la peur court sans pause après la vie alors que le passé s’accroche toujours à lui. Sa vision négative du monde et des hommes lui permettront-elles de trouver sa place et pourra-t-il se satisfaire de ces rencontres ?
Superbe et court récit poétique et métaphorique que vous lirez d’une traite.
« Tout commence et tout finit par un voyage dans l’inconnu. »
« Nous passons chaque jour et chaque nuit à nous perdre et toute notre vie à nous chercher. »
«
La vie s'arrête lorsque la peur de l'inconnu est plus forte que l'élan. »
«
Fuguer est le contraire d'un suicide : on part pour vivre et ce n'est pas une tentative de vivre, mais l'unique essai pour le faire. »
Fiche #325
Thème(s) : Littérature française
Les larmes étaient leur pardon
Le Navire en Pleine Ville
67 | 269 pages | 02-11-2007 | 17€
Un laboratoire pharmaceutique découvre une piste pour l’élaboration d’un vaccin contre le sida en manipulant des tissus vivants mais hélas, il s’agit d’un prélèvement de dugong. Or ces animaux placides et pacifiques qui peuplaient les rivages des iles indonésiennes semblent disparus. Ne subsisterait il pas quelques animaux dans des lieux reculés ? Les enjeux sont grands et la compétition féroce… Chris accompagnée de la mystérieuse Amélie se lancent à leur recherche avec quelques concurrents mal intentionnés à leur poursuite. Roman d’action, réflexions écologique et sociale, thriller d’anticipation écologique, « Les larmes étaient leur pardon » tiendra les ados et adultes en haleine du début à la fin.
« … les blancs n’ont plus de rêves, de visions ou d’espoirs à transmettre à leurs enfants pendant les longues soirées d’hiver. A la place, il y a aujourd’hui les programmes (TV, ordinateurs), les réseaux, les plans : les sacrements sans âme d’un intellect désacralisé »
Fiche #323
Thème(s) : Jeunesse Littérature française
Victor a adopté Micha le pingouin du zoo de Kiev qui ne pouvait plus le nourrir (« J’ai pas de chance aves les femmes. J’en ai eu marre, j’ai pris un pingouin et je me suis tout de suite senti mieux »). Ce manchot royal cardiaque et dépressif rompt la solitude de Victor. Victor rêve d’être écrivain mais journaliste, il écrit des notices nécrologiques de personnes encore vivantes afin que son journal soit le premier à les publier le moment venu. Peu à peu, il perd toute liberté dans son travail : on lui choisit les personnalités à chroniquer, on lui impose des phrases à intégrer… Puis, peu à peu, les personnes concernées par ses chroniques disparaissent… Il évite de se poser des questions même s’il apprendra plus tard le fin mot de l’histoire… Humour glaçant et grinçant pour ce premier roman traduit de A. Kourkov. A (re)découvrir.
Fiche #317
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Nathalie Armagier
Ava est commande de l’astronef L’Explo II alors en mission de reconnaissance. L’accident fatal se produit alors et deux survivants se retrouvent avec Ava sur une planète hostile. L’eau y est quasiment absente comme la vie. Les trois compères se lancent alors dans une grande marche, longue marche pénible et interminable, toute notion de temps disparaissant dans cette novella. Equipés de scaphandres qui semblent autonomes et les diriger, ils errent peut-être à la recherche d’une renaissance, d’une nouvelle vie véritablement humaine… Un petit texte par la taille qui provoquera chez le lecteur un riche questionnement personnel.
Fiche #322
Thème(s) : Littérature française
Un matin, le commissaire Benoît Lorand se retrouve seul, enfermé dans une cave. Il ne se souvient de rien. Il est prisonnier d’une femme qu’il a rencontré la veille. Elle lui est inconnue mais il apprendra à la connaître ! Qui est-elle ? Quelles sont ses motivations ? Pourquoi joue-t-elle avec perfection ce rôle de tortionnaire ? Pourquoi y prend-elle tant de plaisir ? Elle lui parle enfin de sa sœur, violée et tuée quelques années plus tôt et l’accuse de ce meurtre. Elle exige qu’il avoue avant de mourir mais il persiste à clamer son innocence. Ses collègues restent sans piste et dépourvus. Ils connaissaient ses frasques amoureuses extra conjugales et leur seule piste demeure Gaëlle, sa femme... Huis clos efficace entre une tortionnaire et son prisonnier qui vous tiendra en haleine.
Fiche #321
Thème(s) : Littérature française Polar/Thriller/Noir
Sur le même modèle que le jubilatoire « Le mec de la tombe d’à côté », Katarina Mazetti met à nouveau en scène une histoire d’amour à première vue impossible. L’opposition riches-pauvres remplace l’opposition campagne-ville, les relations hommes-femmes demeurant le point d’ancrage de cette histoire. Mariana, prof d’arts plastiques, est mère de deux enfants en bas âge. Mikael, son grand amour, s’est envolé du foyer, dans une énième crise due à sa schizophrénie. Mariana attend son retour mais la vie n’est pas tendre et elle peine à assurer simplement le quotidien à ses enfants du fait de finances très réduites. Un jour à la plage, alors qu’elle joue avec ses enfants à se lancer au bout d’une corde, elle heurte de plein fouet Janne, jeune homme très riche et qui aime le montrer. Cette rencontre brutale va renverser Janne : il se sent très attiré par cette fille simple bien sur terre et la surnommera Mariana Tarzan en hommage à leur première rencontre. Deux mondes s’opposent, Janne n’a pas idée des difficultés de Mariana et ne suppose même pas que cela puisse exister. Lorsqu’il s’en rendra compte, il endossera le rôle du père noël sans toutefois vraiment savoir pourquoi il reste attiré par cette femme. K. Mazetti nous ravit encore en mêlant humour et sérieux dans cette chronique sociale et humaine.
Fiche #319
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Catherine Marcus,
Lena Grumbach
Carole s’installe comme gouvernante chez Monsieur Vincz violoniste qui ne vit que par et pour son instrument. Dès leur première rencontre, il la prévient qu’ils ne se rencontreront guère, qu’il ne cherchera pas à la connaître, elle sera transparente et seules ses tâches ménagères constitueront les traces de sa présence. Elle vient d’un petit village de Lozère où elle travaillait, coupée du monde, dans un institut pour handicapés profonds. Elle les soignait, les lavait, les nourissait, « monstres » étaient exclusivement dépendants de ces femmes. Elle réussira à ne pas haïr son métier même si la lassitude et la mélancolie ne seront pas absentes. Seule l’amitié avec Marie éclairera son quotidien comme le passage éclair de Léandre, l’enfant inachevé qu’elle aimera et à qui elle fera découvrir l’odeur de la menthe. En abandonnant ce lieu de vie et de mort, elle pensait oublier ces ou plutôt ses malades, ses collègues et leur chef froide et cassante… Mais le passé reste toujours là, présent, obsédant et ses souvenirs et rêves le lui rappelleront constamment. Un beau texte émouvant sur le passé qui s’accroche, la vie, la mort dans une ambiance nostalgique et mélancolique.
Premier roman
Fiche #320
Thème(s) : Littérature française
1937, en pleine guerre sino-japonaise, Macao est la plaque tournante de tous les trafics. A la tête de cet empire chinois périlleux, monsieur Yasuda, « le roi sans couronne », dirige d’une main de fer son casino très prospère l’Eldorado. Sa fille ultra-protégée mademoiselle Kasuko, est de retour d’un pensionnat huppé de Hong-Kong. Un jour surgit Werner von Krall, ex-officier de l’armée allemande et marchand d’armes accompagné de son lieutenant Munroe. Il a déjà rencontré Yasuda dans le passé et la rencontre a laissé un goût amer au roi sans couronne. Pour conclure un nouveau marché, von Kroll projette de faire sauter la banque de L’Eldorado et à sa surprise, il rencontrera sur son chemin la jeune, jolie et discrète Kasuko. Une tragédie dans l’enfer du jeu !
Après « la Madone des Sleepings », voici « Macao, enfer du jeu », adapté au cinéma par Jean Delannoy et immortalisé par Erich von Stroheim dans le rôle de Werner von Krall.
Fiche #318
Thème(s) : Littérature étrangère
Erika Wallmann vient de mourir. Jupp Scholten travaille pour son mari mais se sentait très proche d’Erika : « Les gens croyaient à l’accident. Scholten, lui, n’y croyait pas ». Quelques indices lui font penser que Kurt Wallmann a réalisé le crime parfait : mise en scène efficace, accident simulé, alibi en béton… Le quotidien de Jupp lui est encore plus pesant après cette disparition : un patron omniprésent plus humiliant que jamais, une femme laide, geignarde et tyrannique, pas d’amis. Ses seuls réconforts se trouvent auprès de prostituées et de son chat. Mais Jupp obsédé par cette disparition décide de mener l’enquête et de tirer au clair cette affaire. Seul problème, une fois la culpabilité de Wallmann évidente, Jupp décide de reproduire la mise en scène avec comme acteur principal sa femme…
Fiche #316
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction :
Marie-Claude Auger
Jakob Arjouni nous dépeint une part de la société allemande d’après-guerre. Pur produit de l’après 68, Joachim Linde est professeur d’allemand et il affronte son entourage personnel et professionnel qui semblent s'acharner contre lui. Son sujet sur les prises de position des écrivains allemands d’après-guerre sur le Troisième Reich crée polémique, il est accusé d’avoir eu un comportement trouble avec sa fille, son fils prend partie contre lui et le frappe avant d’avoir un grave accident qui le plonge dans le coma… Joachim revient sur les rares moments de bonheur du début de sa vie qui sont peu par rapport aux difficultés futures. Dans cette analyse des relations familiales où les non-dits et les faux semblants règnent en maître, Jakob Arjouni arrive à introduire le doute chez le lecteur qui hésite à accorder sa confiance à Jakob ou à l’accuser de tous les maux.
« Voilà en effet une des répercutions les plus significatives du Troisième Reich sur notre vie actuelle : la négation, ou plus exactement le camouflage, la dissimulation de notre origine. Nous ne pouvons toujours pas être fiers et contents, comme un Français ou un Anglais, dire d’où nous venons. »
Fiche #314
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Marie-Claude Auger
Cécile Wajsbrot nous offre un récit ambitieux proche d’une étude sur la création et l’art (côté créateur et côté spectateur), sur le silence et les sons, sur les artistes, leur isolement et la musique. La narratrice a rencontré autrefois « le maître ». Elle se rendait régulièrement chez lui et ne faisait que l'écouter attentivement, longs monologues consacrés à sa vision de l'art, de la musique et de la création qui la marqueront à jamais sans qu'elle ne le soupçonne. A sa disparition, une personne proche du maître vient lui demander de conter cette rencontre. Ce retour au passé lui ouvrira des perspectives inattendues. L’analyse de cette rencontre sera toujours mise en parallèle avec les bouleversements et catastrophes du monde (l’art au service de l’analyse de notre monde) mais entrainera également la narratrice dans un isolement encore plus fort qu’elle tentera d’amoindrir en s’efforçant de converser avec des invisibles. Elle raconte sa fascination, son écoute pour cet homme qui lui offre ses pensées et vit par et pour la musique, la sienne et celles des autres (« Nous sommes tous à la recherche d’une chose qui nous dépasse, disait-il, ou plutôt, nous en avons l’intuition et la vie se passe à essayer de reconnaître cette chose. Pour moi, c’est la musique. »). Ce roman est le premier d'une série autour du thème « l'œuvre d'art et sa réception ».
« Avez-vous éprouvé cette sensation, disait-il, cette sorte de douleur, ce serrement de cœur quand on vous dit quelque chose de particulièrement juste ou d’effrayant, d’émouvant, quelque chose qui vous atteint ? Cela arrive dans la musique et c’st ce que je cherche à produire, cette douleur douce. »
« …le chant, disait-il, est une tentative d’atteindre l’infini »
Fiche #315
Thème(s) : Littérature française
La déprime touche un grand corbeau noir. Il est las de sa couleur. Le noir le désespère et il envie les autres oiseaux colorés. Pourtant la rencontre avec un poète lui permettra de s'accepter et de repartir vers la vie en acceptant sa différence vécue alors comme une force. De la poésie à chaque page renforcée par quelques touches de couleurs parmi le noir et blanc.
Fiche #310
Thème(s) : Jeunesse
Le père Grégoire est un vieux jardinier qui partage son existence avec Gamin, son chien, petite boule de poils. Pour s'endormir, le vieil homme compte les roses à rebours. Et puis, un soir, le ciel rosit comme les teintes de cet album. A l'issue du décompte, il vivra une aventure extraordinaire et incroyable accompagné de son fidèle compagnon. De jolies illustrations, de belles teintes et une histoire attendrissante.
Fiche #311
Thème(s) : Jeunesse
Basile, jeune lapereau, s’éloigne de sa famille. Le risque ne l’effraie pas. Et pourtant, rapidement, il va d’abord rencontrer le renard. Mais le plus rusé des deux n’est pas celui que l’on croit ! Ils vont continuer leur chemin et rencontrer le loup, puis l’ours… puis de multiples prédateurs alléchés par la famille nombreuse de Basile. Heureusement ces prédateurs ne sont pas partageurs et Basile saura retrouver son terrier et ne dira rien de son expérience périlleuse…
Fiche #312
Thème(s) : Jeunesse
Un joli conte qui nous transporte dans le désert à la rencontre d'Ibrahim. Il vit seul, sa femme étant décédée. Un matin, en ouvrant sa porte, il découvre une petite fille qui a été déposée là. Il la recueille et s'en occupe à merveille. Il reprend goût à la vie jusqu'au jour où un perroquet vient leur annoncer qu'un arbre magique au milieu du désert peut exaucer les voeux des villageois qui deviendront fous en imaginant que leurs rêves vont bientôt se réaliser. Leïla est prise à partie par les villageois mais l'arbre saura la protéger au grand soulagement d'Ibrahim...
Fiche #313
Thème(s) : Jeunesse
Carlos Vallejo maire de Tamesis et homosexuel grand amateur d’hommes se lance dans la campagne électorale que son frère, le narrateur, va nous faire partager. Carlos est le cinquième enfant d’une large fratrie qu’il entraîne dans son aventure, chacun d’eux y trouvant son rôle tout comme son amant, le dentiste Memo. Il est entouré également de la première dame, Mailu Vasquez Velasquez et du curé, le père Sanchez, personnages tous plus truculents les uns que les autres. Une période de campagne électorale qui autorise toutes les dérives : la tournée du cimetière pour faire voter les morts est vraiment un bijou dans son genre. Ironie, humour et réalisme éclairent ce récit qui nous fait partager sourire aux lèvres le quotidien des Colombiens.
Fiche #309
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Jean-Marie Saint-Lu
Le seigneur et sa femme vivrait heureux s’ils avaient une descendance. Un jour, un nourrisson est déposé devant les portes du château. L’enfant est adopté et sa mère lui devient dévouée corps et âme. Elle l’entoure de gentillesse et de tendresse. Mais le seigneur espérant un fils combattant et conquérant n’envisage pas son éducation du même œil. Il va progressivement éloigner sa femme de son fils. Avant de mourir, il lui demandera d’aller conquérir le monde mais auparavant, comme son père, le fils cherchera femme pour assurer sa descendance. Il sera moins chanceux et cette quête l’obligera à devenir « le cavalier bleu », cavalier en fuite éternelle. Un joli conte (triste) pour petits et grands.
Fiche #308
Thème(s) : Jeunesse
Jeune, Vincent a une vie hors norme partagée avec son ami et colocataire Etienne jusqu’au jour où il rencontre Susan (« Il m’a fallu Susan pour m’arracher à Etienne et à la lose »). Il la suit en Angleterre, se marie avec cette fille de la bourgeoisie britannique, fonde une famille et réussira professionnellement. Egoïsme, arrogance, désir de réussite occupent son existence. Il oublie son passé, le rejette et l’exècre. Le mépris pour sa famille, ses parents, son frère, la France perle à chaque phrase. Mais sa femme décide de partir avec leurs enfants une semaine chez ses parents et lui propose de retourner en France revoir les siens. Vincent qui souhaitait oublier son passé et sa jeunesse se retrouve confronté à tous ses démons. Il renoue avec « …des parents transparents, une belle-sœur hostile, un frère saint, cocu et stérile… » qui vont pourtant réussir en sept jours à faire vaciller ses certitudes même si les familles préfèrent souvent le silence et occultent les conflits qui couvent. Il apprend par sa belle-sœur que son ancien ami Etienne devenu SDF est mort seul le long d’une voie de chemin de fer. Après le départ de Vincent, son frère et sa belle-sœur l’ont hébergé et se sentent encore responsables et coupables de cette disparition. Sa belle-sœur lui assènera la réalité sans fioriture et dans leurs rencontres, chacun cherchera un moyen de survie face à cette responsabilité. Une écriture directe, ciselée et rythmée, un ton amer et dur. Un livre parfois dérangeant et âpre sur notre passé et nos origines, nos espoirs, notre famille, nos responsabilités et culpabilités.
« Est-ce qu’on reste responsable des gens avec lesquels on a vécu, une fois que notre histoire commune s’est terminée ? Est-ce qu’on se doit d’accompagner ceux qui nous ont accompagnés, doucement, jusqu’à la porte de sortie de notre existence pour que leurs fantômes ne viennent plus jamais s’interposer ? »
Fiche #307
Thème(s) : Littérature française
Hugo Van Helsing réunit en 2011 le Club Van Helsing pour annoncer à ses membres que la menace de l’apogée de Leviathan (« il est le serpent des profondeurs, la bouche des enfers qui avale les âmes ») est immense. Après l’effondrement des tours du World Trade Center, la Freedom Tower a été construite et elle n’est rien d’autre que son incarnation (« Leviathan, dans son infinie malice, a pris l’apparence d’une construction, mais aussi de son locataire »). Il va falloir combattre un monstre d’acier sans le détruire pour éviter qu’il ne renaisse encore plus puissant. Le monstre est donc identifié. Pour l’affronter, Van Helsing fait appel à Kathy Khan descendante de Gengis Khan maitrisant parfaitement les techniques des ninjas. Une violence extrême dans un corps de rêve ! Elle se lance à l’assaut de la tour et découvrira qu’elle abrite une seconde tour cachée occupée par les forces de Léviathan. Son acharnement est constant et efficace mais elle s’apercevra un peu tard qu’elle est au centre d’une machination qui la dépasse…
Fiche #306
Thème(s) : Littérature française Polar/Thriller/Noir
Un marin aventurier est chargé par un certain Orhan Bey de lui procurer le célèbre tableau de Courbet. Pour le cacher, il fait appel à Gauguin qui est chargé de le recouvrir et il choisit un paysage avec un petit chien. Cette aventure permet à Bruno Le Floc’h de mêler réalité et fiction tout en rendant compte efficacement de l’ambiance de l’époque. Il nous emmène dans ce polar à la rencontre de Gauguin et de ses amis et de la Bretagne.
Fiche #305
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Nathan Love ex-profileur du FBI, expert en victimologie (« C’est une technique de profiling consistant à étudier la victime pour en savoir plus sur l’agresseur »), anti-héros poète pratiquant les arts martiaux et enquêteur du « Dernier testament » est de retour ! Sa philosophie très zen et très réaliste de l’humanité n’a pas changé. De mystérieuses disparitions se multiplient aux quatre coins de la planète. Jeunes diplômées, belles et brillantes, les victimes occupent des postes clés auprès de chefs d'Etat ou de riches industriels mais se volatilisent par temps de pluie sans laisser aucune trace. Sylvie Bautch, profileuse belge, convainc Nathan Love de sortir de sa retraite sur une île au nord-est de la Terre d’Arnhem pour s'intéresser à cette affaire qui le conduira au Japon et dans le sud de la France en passant par l'Afrique, les Balkans et la mer de Chine... Existe-t-il vraiment un lien entre ces disparitions, les pouvoirs politique et économique sont-ils visés... des questions auxquelles Nathan tentera de répondre. Un roman très cinématographique au rythme effréné ! Efficace, très efficace...
Fiche #304
Thème(s) : Littérature française Polar/Thriller/Noir
Deux hommes aux parcours totalement différents se retrouvent dans un hôpital psychiatrique en Allemagne en 1917. Hans Singer (inspiré de Georg Cantor père des mathématiques modernes et de la théorie des ensembles) est un vieux mathématicien de renom sujet à des crises de folie. Il en est à son neuvième séjour. Matthias Dufour jeune soldat français, mort d’être encore en vie, ancien conducteur de locomotive, libertaire en perdition se sentant en contradiction avec ses convictions et dont les espérances en l’humanité se sont écroulées, ne sait pas trop comment il s’est retrouvé dans cet endroit. Ils vont devoir partager ce petit espace qu’est leur chambre. Après s’être ignorés, nous allons assister à l’établissement d’une relation étroite entre les deux hommes. Le mathématicien va peu à peu apprivoiser le jeune français par de longues discussions abordant tous les sujets, chacun dévoilant progressivement son vécu, ses ambitions personnelles et collectives. Etrangers l’un à l’autre, ils vont devenir d’une intimité extrême. Evidemment dans ces dialogues, les mathématiques reviennent de manière récurrente à la fois sur le fond (« Pour les mathématiques, le monde est constitué d’un seul et unique pays. Les frontières sont contraires à sa nature ») mais aussi par le vocabulaire employé. Ces deux hommes rebelles à leur façon ont deux existences à la fois opposées et parallèles : l’un s’est mis en marge du monde des mathématiques par ses théories qui les remettaient en cause et que ses collègues repoussaient et l’autre s’est attaqué aux fondements de la société : deux infinis qui se rejoignent dans un ping-pong où chaque problème mathématique trouve son équivalent dans l’humanité... L’un comme l’autre seront donc déclarés comme fous (« Pourquoi faut-il que nous soyons fous ? Vous croyez qu’il y a une réponse ? »)... La société n’apprécie pas les individualités qui la bousculent… Un joli texte sur la folie, contre la guerre et pour l’humanité : « Si l’on ne croit pas que les hommes seront un jour égaux, si l’on ne croit pas qu’ils seront un jour heureux, il n’y a qu’à se foutre en l’air ».
« Satisfait, votre ami ! Et de tout ! De ce qu’il avait, de ce qu’il n’avait pas, de ce qu’il était, de ce qu’il n’était pas, de son poste, de sa maison, de sa sœur, de son frère ! Si les hommes étaient tous comme lui, rien n’aurait bougé, jamais, depuis la nuit des temps. Il y a pour chaque homme un devoir d’insatisfaction, Herr Singer. On se doit d’être insatisfait. Insatisfait de l’état du monde, insatisfait de la pauvreté, de la famine, de l’oppression, de l’exploitation, de l’injustice, insatisfait de l’abandon des enfants. Insatisfait de l’état du monde, non parce que l’on le hait, mais parce qu’on l’aime. Et d’autant plus insatisfait qu’on l’aime. Oui, le transformer et l’aimer, le transformer parce qu’on l’aime. Bien sûr, cela empêche de se poser, de se reposer. »
« Monsieur Singer, je ne connais rien de plus beau que la révolte. C’est là qu’il y a le plus d’humanité, de tendresse, une tendresse immense et vivante. Je souhaite à chacun de vivre au moins une fois dans sa vie un moment de révolte, et de s’en souvenir, c’est de la bonne eau. Se révolter contre l’oppression, on ne le fait pas par devoir, on le fait par conviction, par passion. »
Fiche #303
Thème(s) : Littérature française
Un petit éditeur de l'est de la France nous offre un petit bijou ! Till est un jeune lutin gourmand et intrépide qui décide de se rendre avec son ami Billy le Bourdon chez Morillette pour le goûter. Ils décident de faire la course et le premier arrivé sera déclaré vainqueur. Désobéissant à sa mère, il prend un raccourci pour semer Billy et alors... l'Aventure avec un grand A commence et le parcours prendra quelques détours ! Le conte est joli, les illustrations superbes et de multiples clins d'oeil tout au long de l'histoire feront rire les petits et les grands lecteurs. On attend avec impatience la suite des aventures de Till !
Fiche #302
Thème(s) : Jeunesse
Après le remarquable « Les cerfs-volants de Kaboul », Khaled Hosseini nous convie à nouveau en Afghanistan où le destin de deux femmes nous permettra de (re)découvrir une société dominée par les hommes (« De même que l’aiguille d’une boussole indique le nord, un homme qui cherche un coupable montrera toujours une femme du doigt. Toujours. ») et écrasée par les conflits et la religion. Les quatre parties du livre présentent quatre tranches de vie de ces deux femmes de 1960 à nos jours. Mariam vit à la campagne seule avec sa mère. Elle adore son père et attend avec impatience ses visites trop courtes. Il la mariera pourtant de force à un homme de trente ans son aîné habitant Kaboul. Elle subira alors quotidiennement la violence de cet homme surtout qu’elle ne pourra lui assurer une descendance (masculine). Laila est une enfant de Kaboul, protégée par son père, homme de savoir, ouvert et progressiste (« …Je sais que tu es encore jeune, disait-il, mais je veux que tu comprennes une chose dès maintenant : le mariage peut attendre. Pas l’éducation. Tu es une fille très, très intelligente. Vraiment. Tu pourras faire ce que tu veux plus tard, Laila. Je le sais. Et je sais aussi que lorsque cette guerre sera terminée, l’Afghanistan aura besoin de toi autant que de ses hommes, et peut-être même davantage. Parce qu’une société n’a aucune chance de prospérer si ces femmes ne sont pas instruites, Laila. Aucune chance. ». Sa famille disparue, elle rejoindra le foyer de Mariam pour en devenir la seconde femme. Mariam verra en elle dans un premier temps une rivale mais peu à peu, une complicité indéfectible unira ces deux femmes jusqu’au sacrifice ultime de l’une d’elles. Deux portraits émouvants de femmes auxquelles le lecteur s’attache progressivement complété par un regard objectif et franc de la réalité afghane (« Elle est sidérée de voir combien le destin de chaque Afghan est marqué par la mort, le deuil et la douleur. Et pourtant, force lui est de constater que les gens réussissent à survivre ») qui rend ce roman essentiel et passionnant.
Fiche #301
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Valérie Bourgeois
En attendant Nathan au musée Victor Hugo de Paris, Kara se remémore sa rencontre avec cet homme dont elle ne peut se détacher. Peu avant leur rencontre, elle reçut un courrier qui lui apprenait son licenciement, premier coup dur. Souhaitant des explications, son patron lui assura que ce licenciement était souhaité par l’ensemble de ses collègues, seconde nouvelle, terrible qui la plongea dans un profond désarroi. Les sentiments d’inutilité, de solitude, d’humiliation l’envahirent et dans cette mauvaise passe, sa vulnérabilité fut extrême. Un ancien camarade de classe lui proposa alors de rencontrer Nathan dont elle deviendra immédiatement dépendante. Le magnétisme de Nathan l’aveugle. Sous influence, elle intègre une petite communauté aux services de Nathan et ne pourra plus se passer de lui. La pression psychologique ira croissante. Pia Petersen décortique avec précision les méthodes appliquées par Nathan pour maintenir les membres de son groupe sous pression et sous dépendance et montre comment il réussit finalement à ce qu’ils nient eux-mêmes leur propre identité et leur existence. Kara épaulée par un ami prendra conscience de son enfermement psychologique mais pourra-t-elle aller jusqu’à rompre cet attachement ?
Fiche #300
Thème(s) : Littérature étrangère
Une petite fille fréquente tous les mercredis une librairie et y rencontre un homme âgé qui s'installe et lit un gros livre, sans image, qui semble beaucoup moins drôle que ses BD. Chaque mercredi, il revient avec la crainte que le livre soit vendu et ait disparu des rayons. Ces rencontres dureront jusqu'au dénouement de l'histoire au moment de Noël. La tendresse de cette histoire est renforcée par les illustrations et leur ton pastel qui en font un superbe album.
Fiche #297
Thème(s) : Jeunesse
Nasreddine est de retour ! Son père blessé lui confie la tâche d'aller vendre leur production sur le marché de la ville avoisinante. Tout fier, il s'y rend accompagné de son âne. Il va faire preuve d'une remarquable efficacité. Pourtant au moment de repartir, l'âne a disparu ! Comment faire ? Un joli conte illustré par R. Dautremer sur la ruse, l’ingéniosité et la confiance en soi.
Fiche #298
Thème(s) : Jeunesse
L’histoire débute dans un palais vénitien, le palais Asanti en mi-ruine sous une lumière sombre. Saria est au chevet de son père en train de mourir. Avant de s’effacer, il lui confie un coffret contenant trois clés qui, utilisées sur la Porte de l’Ange, donnent accès, l’une au paradis, l’autre aux enfers et la troisième au néant. Mais évidemment, ces clés sont très convoitées tout comme la porte de l’Ange ! Aussitôt partie avec Orlando un domestique dévoué à son père, le palais est visité par quelques personnages dangereux à la recherche du coffret. Quelques années plus tard, le doge de Venise est toujours à la recherche de ce coffret pour accroître encore son pouvoir sur la ville. Une première BD chez cet éditeur qui mérite le détour !
Fiche #299
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Paris, fin du dix-neuvième siècle, le départ vers d’autres aventures d’Arthur Rimbaud laissent des insatisfaits. Le monde littéraire pleure l’homme et ses vers, surtout que certains annoncent son retrait définitif de la vie littéraire. Son œuvre a marqué à tout jamais la poésie. La revue « Le Décadent » n’ayant plus d’inédits à publier les remplacent par des faux écrits par Adrien. Celui-ci, poète amateur, est admirateur de Rimbaud et cette expérience le bouleversera, surtout que la réaction de Verlaine à ces publications mensongères sera violente. Un album de toute beauté !
Fiche #296
Thème(s) : Adulte Bandes dessinées
Tom est mort accidentellement, de manière inattendue et définitive ! Il avait quatre ans et demi. Sa mère nous livre ses sentiments dix ans après. Peut-on combler cette absence si pesante et infinie ? Peut-on faire le deuil d'un petit bout de quatre ans ? D'ailleurs qu'est-ce que c'est que cette expression "faire le deuil" ?... Comment survivre en Australie encore entourée de deux enfants et d'un mari ? Le nouveau fantôme de Marie Darrieussecq est cette fois bien présent et encore bien vivant malgré sa disparition. Marie Darrieussecq met son style inimitable qu service d'une dissection pointilleuse des sentiments d'une mère brisée à jamais.
"Le deuil qu'ils décrivent est un processus naturel qui dégoûte. Une digestion. On entre dedans et on avance, qu'on le veuille ou non, comme à travers une série de boyaux. La mort de Tom passe à travers nos corps. On n'a pas fini, je ne dis pas qu'il faut dix ans. Je ne dis rien. Est-ce que je souffre moins qu'avant."
"Avant il s'appelait Tom Winter, maintenant il s'appelle Tom est mort. Il est mort depuis bien plus longtemps qu'il n'a été vivant. Mon petit garçon est mort. Je ne dis pas que j'aie gardé la raison."
Fiche #295
Thème(s) : Littérature française
Trudi Montag vit à Burgdorf, près de Düsseldorf. Née au début de la première guerre mondiale, elle est rejetée rapidement par sa mère, elle se sent vite différente des autres, sentiment confirmé lorsqu’elle apprend que sa taille restera celle d’un enfant. Dès son plus jeune âge, elle devient experte dans l’observation des autres, observation facilitée et influencée par sa différence : elle est ignorée et chacun se laisse aller à des confidences qu’il n’aurait pas exprimées en présence de quelqu’un d’autre. Elle les observera donc avec lucidité, toujours et encore, tentera de déterminer sans complaisance leur mode de pensée et mettra à nu leurs comportements, leurs sentiments, leurs faiblesses… La société allemande est auscultée au plus près. Chaque chapitre du livre couvre une période de 1915 à 1952, des lendemains de la première guerre jusqu’à la reconstruction en passant évidemment par la montée du nazisme et par son règne, tout y est : ceux qui résistent, ceux qui adhèrent, ceux qui se taisent, ceux qui se laissent entraîner… Rien n’échappe à son œil acéré et personne n’est épargné. Peut-être de par son statut différent, sa vision de la progression lente du nazisme et le glissement vers la barbarie n’en sont que plus réalistes, démonstratifs et pleins d’enseignement.
Une écriture très vivante pour cette fresque qui retrace avec brio l’histoire d’un pays à partir de la vision de personnages particulièrement humains et attachants en accompagnant Trudi et son entourage tout au long de sa vie. Un pavé (664 pages) que vous ne lâcherez pas !
"Enfant, Trudi Montag croyait que chaque être humain savait ce qui se passait dans la tête des autres. C'était avant qu'elle comprenne en quoi sa différence faisait force. Et son angoisse."
« Folle de joie d’être enfin entourée d’autres enfants, elle ressentit plus que jamais sa différence, aussi. Ce n’était pas seulement la taille de son corps et les vêtements mal ajustés, dessinés pour des enfants de trois ans, qui faisaient d’elle une étrangère ; c’était aussi sa volonté farouche d’être admise. »
« Les gens murmurent de plus en plus… Tu sais que lorsque ce genre de messes basses commence à apparaître, c’est qu’on se dirige tout droit vers une guerre. La rumeur de la ville, du pays tout entier, baisse d’un ton… Même le fleuve, les oiseaux… »
« "Nos jeunes, dit Léo, sont facilement entraînés par tous ces discours… Ils ont été frustrés pendant tellement longtemps qu’ils sont maintenant séduits par les promesses, par la camaraderie instantanée. Il y a toujours quelqu’un pour les inspirer, pour les persuader…" Il secoua la tête. "De vrais petits soldats, y compris les filles, avec leur fierté de ce drapeau vulgaire, à faire froid dans le dos. Je suis content que tu ne fasses pas partie de tout cela. Ils ne voudraient pas de moi." »
Fiche #294
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Clément Baude
Un vieil écrivain reconnu rencontre lors d’une conférence une jeune femme de vingt ans qu’il n’ose aborder. Il l’admire et l’observe mais trop vieux, il a perdu la langue d’amour, aussi il va lui parler (par écrit) d’autre chose, de sa famille de cœur. Comme un testament à toutes les femmes à toutes les femmes qu’il n’a pas aimées (« Et puis, parce que j’atteins la limite d’âge qui ne laisse plus à l’homme le loisir d’oublier ce qui lui tient à cœur. J’ai peu de temps. A peine ce qu’il faut pour tenter de s’accrocher à quelque chose ou à quelqu’un avant de s’en aller. Juste ce qu’il faut pour se souvenir, chasser la mauvaise part, et espérer à toute vitesse »). Il lui contera sa jeunesse entourée de trois figures, l’Historien, l’Etranger et Raoul. Ils vivaient tous les quatre à Port-au-Prince dans une pension (« La pension était notre monde et l’on n’y rentrait pas avec un patronyme ») et se rencontraient constamment pour de longues palabres sous l’arbre d’une cour. L’Ecrivain traquait la nuit les femmes absentes de sa vie dans ses poésies mais sa vraie vie était sous l’arbre avec ces rencontres. L’Etranger bien que maniaque les faisait rêver, toujours en attente d’un départ repoussé faute d’un passeport en règle, les comptes-rendus de ses voyages (« Chaque phrase était un long voyage… ») et de ses rencontres féminines éclairaient le quotidien de ses trois amis. L’Historien vivait dans un milieu bourgeois, notable installé, il profitait d’une belle carrière, de sa femme et de sa fille jusqu'au jour où il abandonna tout. Personne n’en connaît les raisons. Raoul maintenant en retraite installait des conduites d’eau et continue de rendre hommage à ces travailleurs de force au-delà de leur mort. Mais quel lien unit donc ces hommes ? Malgré ses longues et interminables discussions, chaque personnage ("les Ainés", l’écrivain est le plus jeune) a son secret, chaque vie est un roman et l’écrivain ne les découvrira que plus tard à l’approche de leur mort et les révèlera par son écriture. Des personnages d’une admirable humanité, des histoires attachantes, une langue superbe et une poésie marquée font de ce roman une grande réussite.
« Oui, même écrire peut devenir un acte dangereux. Qui peut dire à l’avance quel côté de la rue habite le cœur de l’autre ? »
Fiche #292
Thème(s) : Littérature étrangère
Richard MORGIÈVE
Miracles et légendes de mon pays en guerre
Denoël
36 | 331 pages | 30-08-2007 | 20.3€
Fin de printemps 40 en France, l’exode bat son plein. Sur la route, un quintet inhabituel : un proxénète, trois putes et un enfant ! « Les Benz » sont partout. Le bébé meurt mais Saint-Jean, le proxo, en retrouve un abandonné au bord de la route et l’adopte. Et l’histoire d’amour entre ces adultes et cet enfant est lancée. L’exode les amènera dans un lieu magique, étrange, au bord de marais et d’un fleuve, où Saint-Jean annexera une maison abandonnée, la Riviera, pour créer un nouveau bordel. Tous les protagonistes de cette période en profiteront (« Les collabos avaient beau se faire du gras sur le dos de la population, ça les empêchait pas de vouloir de la pute et les résistants, plus maigres peut-être, en voulaient pareil. ») et nous feront vivre par un angle inhabituel les drames et exploits d’une France alors vaincue. Une écriture très singulière et personnelle, inventive, explosive et rythmée pour ce mélo joyeux.
« La guerre c’est l’exode pour les Made in France et pour Saint-Jean il y a deux sortes de Made in France : les exodés et les exodards. Les exodés c’est ceux qui l’ont toujours dans le baba. L’avaient avant que le Benz se pointe, l’auront après. Plus profond bien profond, ils sueront pour les nouveaux patrons, danke schön bite au cul ! Les exodards eux se débrouillent pour ne pas l’avoir. L’exodé se fait piquer et en crève vite ou moins vite. L’exodard, le dard, il le montre aux cons et leur met profond et à satiété disait Saint-Jean. »
« C’est comme ça que ça marche la génération, les parents font chier les gosses et les gosses s’en souviennent pas. Faut attendre quelques années pour que la haine vienne à l’enfant et le sauve. »
« Sans Dieu, l’homme pourrait vivre sa liberté dit le mac comprendre qu’il n’y a ni bien ni mal que de la vie et de la mort. »
Fiche #293
Thème(s) : Littérature française
Le mardi 14 juin 2005, vers 16 heures, Florence Aubenas, détenue depuis plus de six mois en Irak, ouvre sa conférence de presse. La journaliste de Libération raconte par le menu les conditions de son arrestation du 5 janvier avec Hussein Hanoun al-Saadi, de sa détention et de sa libération. Son récit dure trois quarts d’heure.
« Quelqu’un s’avance là et c’est une femme.
Mettons qu’on ne fasse que la regarder et l’entendre. Regarder comment elle parle, entendre comment elle raconte. Non pas ce que ça cache mais ce que ça montre. Quelqu’un s’avance là et tout y est. Le monde entier dans sa voix, ses mots, ses mimiques. Pendant que l’Histoire poursuit son chemin héroïque et vain, un précipité de modernité se pose là et c’est une femme. »
« Ce dont on va parler aujourd’hui, j’me doute bien qu’vous avez tout un tas de questions diverses, mais moi c’que j’peux vous raconter… j’ai été enfermée dans une cave pendant cinq mois, donc je peux vous raconter cette cave. Ce qui s’est passé en dehors et tout un tas d’autres sujets, je ne les connais pas…»
François Bégaudeau s’empare de ce monologue pour rendre un double hommage : d’abord à Florence Aubenas elle-même (et au-delà à toutes les femmes) mais également à la langue orale et à cette liberté orale que Florence Aubenas a su conquérir et conserver, on est loin de la langue de bois diplomatique... Suivant minutieusement la chronologie de la conférence, il décortique la parole et les attitudes de la journaliste. Puis, en zappeur émérite, il fait pause et commente, digresse, développe ses théories… François Bégaudeau nous offre encore un livre parfaitement maîtrisé dans sa forme et dans son fond (JCP)
Fiche #291
Thème(s) : Littérature française
L’histoire de Monsieur T. rejoint la rubrique des faits divers : Madame T. vient de subir une tentative d’assassinat de la part de son mari atteint de la maladie d’Alzheimer. Lors de son interrogatoire, il est incapable de justifier et d’expliquer son geste. Pour nous conter ce drame, Olivia Rosenthal multiplie les angles : faits réels, souvenirs personnels, biographie du docteur Aloïs Alzheimer, confessions de malades, poésies... Elle nous fournit pages après pages toutes les pièces d’un puzzle géant que chacun de nous devra construire ou reconstruire selon sa propre mémoire...
Alzheimer sujet de plus en plus récurrent de l’actualité, de la littérature et du cinéma, alors on se dit naturellement, encore ? Et pourtant, Olivia Rosenthal réussit brillamment son pari. Par son ton singulier parfois drôle parfois grave, par la construction de son histoire, par son inventivité, elle nous propose sur un sujet difficile un livre passionnant, optimiste et désespéré, graver et léger à la fois. Une réussite ! (JCP)
« Le 6 juillet 2004, Monsieur T. a poignardé sa femme de cinq coups de couteau. Quand, lors de son interrogatoire, on a demandé à Monsieur T. pourquoi il avait agi de la sorte, il a été incapable de répondre.
Comment vous appelez-vous ?
Pas moi.
Quel est votre prénom ?
Il ne m’appartient pas. »
« Faites un exercice. Imaginez que vous puissiez effacer de votre mémoire une personne de votre entourage ainsi que tous les événements afférents à cette personne et dans lesquels vous êtes impliqué. Qui effaceriez-vous ? Sur qui exerceriez-vous ce magnifique pouvoir ? »
Fiche #290
Thème(s) : Littérature française
Deux amis d'enfance se retrouvent après une longue séparation. L’un est resté au village, n'a pas fait d'études, habite chez sa mère et vivote en jouant de la guitare dans les bals du samedi soir. L'autre, Knut, a quitté la ville, s'est marié, a deux filles et est professeur de musique. Enfants, ils ne quittaient pas et avaient formé un groupe de musique puis écumé les maisons des jeunes de la région. Knut vient passer avec sa famille les vacances chez sa mère et espère éviter les rencontres d’anciennes connaissances. Et pourtant, ils vont se rencontrer, se retrouver et nécessairement le passé va resurgir. Le drame se nouera pas à pas entre les deux hommes et la femme de Knut avec comme arrière-plans la jalousie, le désir et l’enfance des deux hommes. Le narrateur (l'homme du village) se met alors à l’écriture pour tenter d’annihiler cette inquiétude lourde qui l’accable.
Le texte de Jon Fosse s’enfonce au plus profond du lecteur, tranquillement, pas à pas, telle une vis sans fin. Texte composé de multiples refrains, de leitmotivs lancinants, de mélopées qui secouent le lecteur, l'imprègnent, l’intriguent. Une vraie écriture singulière à découvrir.
« J’écris pour éloigner l’inquiétude, mais elle ne fait que grandir. En écrivant, je suis calme, et puis, dès que j’arrête, l’inquiétude revient, comme si quelque chose allait se passer, quelque chose de terrible, je le sais. »
« …en réalité il se souvient à peine de tous ces bals où on jouait, de toutes ces années où on tournait avec notre groupe, mais cet épisode-là, une drôle d’histoire, il ne sait pas vraiment, quelque chose d’étrange, il ne sait pas, quelque chose avait dû se passer, quelque chose qu’il n’avait pas compris, et Kunt marche sur la route, il regarde le fjord, il marche, il presse le pas, il marche, il ne sait pas vraiment… »
« Je reste là et je vois Knut s’éloigner sur la route, je vois son dos, et par la suite j’ai souvent revu cette image de lui là-bas sur la route, j’ai revu comment il se retourne, j’ai revu comment il se met à marcher, j’ai revu son dos. Je suis là en train d’écrire, et je ne sors plus. Une inquiétude m’a envahi. »
Fiche #287
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Terje Sinding
C. Duneton nous révèle une part de son enfance paysanne pendant l’Occupation entre ses parents aux relations orageuses et sa chienne. Et lorsque l'homme se retourne vers son passé, finalement, il voit cette chienne, compagnon de tous les jours. Une histoire de vies de chiens au pluriel !
"Mon père n'avait aucune autorité, mais il savait plein de choses de la vie des vaches et tout ça..."
"La fureur de ses maîtres lui semblait aussi inexplicable que la colère de Dieu demeurait imprévisible pour ma mère... De la méchanceté gratuite."
Fiche #288
Thème(s) : Littérature française
Marie Basmati sous l'ère Chirac est maire de gauche d'une ville moyenne et Jacques Jouet nous fait partager son quotidien professionnel et personnel. Une vie à 200 à l'heure, toujours en mouvement, avec ses petites et grandes ambitions, ses réussites et ses échecs, ses rencontres. Un joli portrait de femme intègre et dévouée que le scandale rattrapera pourtant malgré elle...
Fiche #289
Thème(s) : Littérature française
Nous voici plongés dans l’enfance d’une femme en cours d’introspection. Va-et-vient continuel dans le temps au gré de ses souvenirs par une narration alternant entre le « je » et le « elle ». Reconstituer pour comprendre, se reconstruire et peut-être guérir : elle demeure sous l’emprise d’une maladie génétique mais aussi de ce père omniprésent, omnipotent pour lequel elle restera toujours une petite fille. Ces deux puissances ne laissent peu de place à la vie. De ses souvenirs de sa psychothérapie, ses trois complices Virginia, Sarah et Sylvia jaillissent comme trois soutiens salvateurs. Ces trois rencontres en réalité fictives puisqu’il s’agit de Virginia Woolf, Sarah Kane, Sylvia Plath (toutes trois suicidées) l’épaulent dans l’épreuve et dans sa guérison qui passera par l’écriture. Pour son premier récit, Claire Fercak fait preuve d’originalité par l’écriture morcelée et intrigante adoptée. (JCP)
Premier roman.
« Elle a commencé à bâtir un refuge transparent et solide que personne ne saurait attaquer, une maison de verre qui lui permettait d’épier toute atteinte extérieure. Une maison fortifiée par isolants phoniques souvenirs-couvercles et laine de verre. Ecrans pour empêcher que ne se projette une image qui pourrait en déborder le cadre. »
« Elle ne sait pas trop comment s’y prendre, de quel côté crier, sur quel ton, dans quelle langue. […] Elle cherche une écriture. Elle court après l’idiome de la première enfance. »
« Voilà plusieurs années qu’elle désirait écrire cela. Elle est pétrifiée, suffoque à toute idée de. Depuis décembre elle s’en approche à pas menus. Être le réceptacle de sa propre douleur c’est être à la fois le bourreau et la victime, le bordel pénible et l’auberge accueillante de ses possibilités. »
« Ce matin est terrible, le monde se déroule infiniment gris. Une matinée sans importance, ça n’ira pas mieux demain. Je ne bouge pas, reste cloîtrée, tapie au fond de ma tête. Rongé, l’os sphénoïde l’a remplie de cendres. La violence est inscrite dans la mémoire de l’espace. Du corps. Au centre de la vitre, une salissure, un poinçon, comme une cataracte : le père. »
Fiche #286
Thème(s) : Littérature française
La veille de Noël, Betty célibataire reçoit l'invitation d'un ancien compagnon. Elle décide d'accepter mais avant de partir, lors de ses dernières courses, elle fait une rencontre inattendue qui va la bouleverser : Erika, un cochon énorme en peluche et pleine de vie ! Elle l'achète et l'emporte avec elle dans son voyage. Le regard des gens changera à sa vue et les caractères se révèleront. Humour, ironie et émotion accompagnent ce texte pour les jeunes lecteurs à partir de 11 ans.
Fiche #285
Thème(s) : Jeunesse
Timon Lunoilis est écrivain, romancier. Il a connu le succès mais abandonne le roman après l'annonce de la maladie à l'issue fatale qui frappe sa femme. La fiction ne l'intéresse plus. Il se retire avec Ilanda dans une petite ville et pour tenter d'oublier son malheur, il écrit des biographies d'écrivains imaginaires jusqu'au jour où l'un d'eux se présente à lui ("Je lui donnais la vie, et il m'envoyait en retour la fiction"). Troublé et désemparé, Timon hésite : fruit de son imagination ou manipulation ? Son enquête entraînera sa disparition avec sa femme et son frère jumeau viendra démêler les fils de cette histoire entre fiction et réalité.
Jérôme Lafargue varie les modes de narration avec réussite, chaque biographie est une petite nouvelle à elle-seule, et nous emmène pour notre plus grand bonheur dans le domaine de l'imaginaire. L'un de ses personnages affirme que "la fiction, c'est le pays de la liberté", Jérôme Lafargue, libre comme l'air, a dû émigré dans ce pays !
Premier Roman
Fiche #283
Thème(s) : Littérature française
Au volant de sa DS, beauté éternelle, Max de Kool est chauffeur de taxi. Etudiant brillant, il fut reçu à l’écrit de l’agrégation de philosophie mais échoua à l’oral, impossible d’exprimer le moindre mot sur le sujet « Sens et enjeux du silence » ! Un jour, la portière de sa DS s’ouvre et il reconnaît immédiatement la voix : son Maître, professeur brillant et adulé, Oscar von Balthazar, capable d’improviser sur les sujets les plus ardus devant un amphi médusé. Pourtant, il abandonna un jour ses étudiants avant de leur révéler la définition du Sublime. Mais le voici de retour :« Je vais prendre la Sorbonne sans violence, mais sans pitié. Redditions sans conditions ! Que tout soit bien clair, je joue mon va-tout, je n’ai rien à perdre, aucune position, aucun poste, je vais prononcer un discours événement, la fac va changer de base, le monde ne sera plus le même. ». Ils partent alors sur les routes d’Europe pour le voyage vers la reconquête ce qui donnera lieu à une joute oratoire particulièrement jubilatoire entre les deux personnages. Max n’acceptant aucune compromission, Oscar se refusant à toute illusion, les discussions et confrontations seront constantes, et très rythmées, rythme renforcé par le mouvement induit par le road-movie qu’ils ont engagé. Les sujets abordés seront extrêmement variés mais toujours avec références à une approche philosophique (« La philosophie, c’est comme le piano pour un professionnel : il faut en faire tous les jours sans prendre de vacances sinon les doigts de la cervelle s’engourdissent » : ils réussiront même à définir le concept exhaustif du « con » ! Un discours oscillant constamment entre réflexion et blague, analyse et ironie, culture et dérision, du bonheur ! Au fait, Oscar et Max, quelle est la définition du bonheur ?
« Les gens ne croient plus au marxisme mais vénèrent l’astrologie. Créons l’astromarxisme et réconcilions les intellectuels et le peuple. »
« Méfiez-vous des femmes et des tondeuses à gazon »
« Vous avez tort. Il faut savoir être un peu idiot pour vivre en société, plaida Oscar »
Fiche #284
Thème(s) : Littérature française
L’accueil le premier jour d’un stagiaire dans une entreprise préfigure souvent de la suite du stage. Lorsqu’Amory jeune parisien (« Il vient de Paris, Rita. C’est normal qu’il regarde le paysage. Ils n’en ont pas, là-bas ») s’installe au Courrier d’Avesnes, l’accueil est plutôt froid et ironique. Le rédacteur en chef est tout puissant et le fait savoir sans détour ni finesse. Son appréciation des capacités d’Amory est immédiate, définitive, et négative : « un chafouin ». Comme sanction ou bizutage, il décide d’expédier Amory dans le village de St Paulin-sur-Morbier (« Tout est vieux et bordélique. Il n’y a jamais eu de plan d’urbanisme, ici. Ce n’est pas un village, c’est un troupeau »), seul village où il ne se passe absolument rien depuis des années : le calme plat ! Il devra pourtant tenir une chronique pendant un an et intéresser les lecteurs du journal. Pourtant, dans le même temps, le célèbre cinéaste américain Almotino est las de tourner dans les mêmes lieux filmés pour la nième fois. Son équipe cherche un endroit inédit et devinez quel village les accueillera ? Amory saura-t-il rendre compte de cet événement ? Ces chroniques trouveront-elles écho auprès du rédacteur en chef et de ses lecteurs ? Un livre léger plein d’humour pour une rentrée souriante !
« Il a pris soin de ne pas être maire, pas député, d’être le dernier dans la liste des conseillers municipaux : chargé de la culture et des loisirs, autant dire du néant, c’est là qu’il s’ébroue à l’aise, où il développe ses pouvoirs et ses embrouilles »
Fiche #263
Thème(s) : Littérature française
La narratrice est entourée de ses deux enfants Léa et Matthias et de son mari Michel. Peu à peu, son mari s’inquiète de troubles de comportements et le diagnostic est terrible et irrémédiable : six mois à vivre au mieux, un astrocytome s’est installé dans son cerveau. Elle est perdue. Après un malaise, elle est admise dans un service hospitalier. Son mari l’assiste alors qu’elle est perdue dans un état comateux et continue de se perdre. Les réminiscences du passé lui rappellent son long cheminement, cette errance parmi la forêt et les étoiles (l’astrocytome a également la forme d’une étoile) entourée de sa famille. Une belle écriture pour un texte allégorique sur un sujet difficile traité avec poésie, franchise et réalisme, sans pathos et qui remue le lecteur.
« Le cerveau règne partout en maître sur les affaires des hommes. Il s’occupe de politique, d’argent, d’art et d’amour. Le cœur n’est qu’un muscle esclave du cerveau. Le cerveau est roi, tyran, despote, prêtre et confesseur. Et si des pratiques cannibales concernent le cœur, je doute qu’il en existe pour le cerveau. Qui, en effet, prendrait le risque d’ingérer les rêves d’autrui ? ».
« Je sais qu’ils mentent. Je me suis trop bien enfoncée dans la forêt pour espérer retrouver mon chemin et revenir parmi les miens. »
Fiche #264
Thème(s) : Littérature française
Après un an de séparation (« Nous nous étions éloignés ; nous existions en parallèle. Nous nous étions appris par cœur. C’était trop. Plus rien à découvrir, plus rien à espérer. Représailles immédiates. »), Camille souhaite rencontrer son mari le narrateur à qui leurs deux enfants manquent terriblement, comme si un morceau de lui avait disparu. Il est convaincu que cette séparation les a fait basculer directement dans le monde adulte et laissera un goût amer à leur enfance. Camille lui annonce qu’elle souhaite divorcer et qu’elle vit avec un nouveau compagnon qui est leur ancien voisin. Voisin qui avait accueilli le mari au moment de leur séparation et qui l’avait soutenu. Cette nouvelle provoque un retour en arrière du narrateur sur sa vie de couple ainsi que sur ses relations avec son voisin, fêtard invétéré et menteur professionnel. Le malaise de savoir ses enfants aux mains de cet individu accroît encore la douleur de cette séparation. Une vision légère mais sincère d’une séparation.
Fiche #265
Thème(s) : Littérature française
René Derain rejoint une forêt du nord de l’Europe avec son chien pour un stage de chasse. Cinq hommes et deux femmes de différents pays européens partageront son quotidien pendant quelques jours. Pas encore arrivé à destination, il s’arrête et observe la forêt ; même son chien s’inquiète et reste paralysé, immobile, sans voie devant ce mur. Elle semble étrange, interdite, refermée, absorbante. Il poursuit pourtant son chemin et est le dernier à arriver à destination. Bizarrement, le propriétaire du pavillon de chasse responsable du stage est absent. Les stagiaires prennent possession du chalet et entreprennent leurs premières sorties. Peu à peu, Derain ressent une tension poindre au travers des anecdotes contées lors des veillées et de ces sorties. Chacun semble jouer un rôle déjà écrit et la fin lui paraît peu à peu inéluctable. Un piège puissant, machiavélique et fantastique se referme sur lui. Son assassinat ne saurait tarder, c’est écrit ! Mais qui tire les fils de cette histoire ? Ce qui est certain, c'est que le lecteur aura son rôle et sans son intervention, l'histoire restera sans fin ! Hugo Boris réussit à installer une atmosphère lourde et inquiétante par petites touches et le fantastique de la situation accroît le suspense et l’intérêt du lecteur pour cette épopée tragique. On retrouve l’environnement de l’excellent « Scène de chasse en blanc » mais sa violence est remplacée par une dose mesurée de fantastique qui accroît l'étrangeté du récit et l'oppression ressentie par la lecteur.
« Une peur singulière le gagne, lui, le garde forestier, qui n’a jamais rien ressenti de tel dans son pays. La peur de l’ombre, la peur du silence, la peur du bois sombre à la tombée de la nuit. Il y a quelque chose d’inquiétant dans cette montée de la peur lorsqu’il n’y a évidemment personne. Et son chien qui n’aboie pas... Quelque chose ne va pas. Le chien est anormalement immobile. ».
Fiche #266
Thème(s) : Littérature française
Un village de l’est de la France (ou d'ailleurs) où l’on parle un patois proche de l’allemand se réveille au lendemain de la guerre avec ses secrets. Brodeck est revenu des camps et a connu l'innommable et le degré zéro de l'humanité ce qui bouleversera à jamais son appréhension de l'Homme. Il n’est pas né au village, il y est arrivé enfant avec Fédorine, sa mère adoptive, s’y est installé et a réussi à se faire accepter par ce village isolé (« C’était un temps où personne encore n’avait peur des étrangers même lorsqu’ils étaient les plus pauvres des pauvres »). Il fut même envoyé par le village à la capitale pour ses études mais revint en catastrophe suite à la montée du fanatisme et à une première nuit sanglante d’épuration. Et puis, un jour, avec son cheval et son âne, un homme arrive de nulle part et trouble la quiétude du village. L’autre (« Der Anderer ») semble connaître sa destination et s’installe à l’auberge du village. Il est si différent : il s’habille différemment, il est érudit, il parle à son cheval et à son âne, il prend des notes et en plus il sourit... Quelles sont ses intentions ? Que veut-il ? Que cache-t-il ? Espèce de fantôme du passé, les habitants se persuadent qu’il connaît leurs secrets ou qu’il est venu pour les découvrir. La tension croît jusqu’à sa disparition le soir de l’Ereigniës (« la chose qui s’est passée ») comme si le village avait peur de dévoiler de lourds secrets partagés mais tus par tous. Brodeck, le seul qui maîtrise les mots (« Je préfère écrire. Il me semble alors que les mots deviennent très dociles, à venir me manger dans la main comme des petits oiseaux, et j’en fais presque ce que j’en veux, tandis que lorsque j’essaie de les assembler dans l’air, ils se dérobent »), est chargé de rédiger le rapport rendant compte de cette apparition furtive. Il rédigera en réalité deux rapports qui vont se mêler (entremêlement traduit également dans la construction du roman) celui de l’Anderer et celui de sa vie (« Il faut que je raconte l’arrivée de l’Anderer, chez nous, mais j’ai peur : peur d’agiter des fantômes, et peur des autres »). Ces deux vies ne se rejoignent-elles pas ? Deux destins tragiques, destin de l’humanité ? Au péril de sa vie, il cherchera à comprendre cette énigme qui est aussi la sienne tout en témoignant de la Shoah. Un roman grave, sur la peur (éternelle ?) de l’Autre mais aussi sur l’histoire chaotique de l’humanité donc l’histoire de chacun de nous. Dense, puissant, implacable, universel, intemporel et superbe !
Fiche #267
Thème(s) : Littérature française
Lors d’un voyage en Angleterre, une jeune française d’origine vietnamienne croit reconnaître en Nam un réfugié vietnamien son prince charmant. Ils ne se quitteront plus du voyage et pourtant ils n’ont rien de commun, même leur passé et l’appréhension de leur origine commune sont différents. A son grand désespoir, Nam la considère comme sa petite sœur. Leur dialogue va pourtant l’éveiller à son passé qui se dévoilera pas à pas lors de deux voyages au Vietnam avec ses parents peu diserts sur leur passé. Et puis Nam partira, sans explication, sans trace. Rupture dans la construction de cette ado qu’un livre achèvera peut-être des années plus tard. Récit sur l’exil, le grand écart entre deux pays, deux histoires, entremêlés de contes qui renforcent la puissant du texte, un conte n’est pas un roman...
Premier roman
« Il était inutile de renier que de se charger du poids du passé : connaître l’histoire de ma famille et l’assumer pouvait être considéré comme un devoir, en aucun cas comme une raison d’être »
« Toutes les politesses de rigueur au Vietnam entre gens de même sang ne pouvait dissimuler qu’il existait entre mes cousines et moi un fossé à la mesure de l’océan qui séparait la France et son ancienne colonie. Je n’avais pas connu la pauvreté, la faim, l’ennui de ne rien pouvoir faire d’autre que subir, patienter, au mieux espérer, au pire se résigner aux lendemains qui déchantent. »
Fiche #268
Thème(s) : Littérature française
Blaise GAUQUELIN
Petit et méchant
L'Altiplano
20 | 252 pages | 19-08-2007 | 17.8€
Balthazar le narrateur connaîtra deux vies. La première se déroule à Paris dans le monde télévisuel. L’environnement professionnel est écrasant et réduit chacun à l’état d’esclave consentant symbolisé par les séances au sens « propre » comme au sens figuré de « lèche-culs ». Balthazar craint d’y prendre un jour du plaisir (« Ecoutez ça mes amis, notre nouvelle recrue lèche les fions sans distinction »)...Craignant d’avoir empoisonné le chef omnipotent, comme une seconde vie, Balthazar s'exile en Autriche avec Egon. Esclave sexuel d’Egon et de sa compagne, il connaîtra cruellement le statut d’étranger dans un pays en campagne électoral. « Le guide » sera élu et entraînera le pays dans un repli sur lui-même : le thème de l’immigration deviendra central (« L’Autriche n’est pas et ne sera jamais un pays d’immigration. Les étrangers présents sur notre sol doivent désormais choisir : respecter l’Autriche ou partir »), les opposants éliminés, la chasse aux sorcières permanente, la langue autrichienne remise en avant, la propagande constante (« Chaque jour se fait plus présent le danger venant de l’extérieur. Chaque jour pèse la menace de voir nos anciens amis remettre en question la souveraineté qui est la vôtre et le choix que vous avez fait de me porter à la tête du pays »). La fameuse alliance du passé (Noblesse, Clergé) renaîtra de ses cendres pour recréer la Grande Autriche et Balthazar impuissant et inactif assistera à ce désastre. Naturalisé Autrichien, il restera dans ce pays sans que rien ne change ni ne s’améliore. Roman cru et dérangeant sur la condition humaine et l’apparition d’anciens voire de nouveaux pouvoirs forts exploitant la peur de l’autre et la faiblesse, la lâcheté et la bassesse humaines.
Premier roman
« La dictature des gens généreux, c’est terrible »
Fiche #269
Thème(s) : Littérature française
Thomas exilé argentin a deux filles : Ilona dont la mère est décédée sous la dictature en Argentine et Malena née en France suite à sa rencontre avec sa seconde femme. Il vit dans le sud de la France près de Sète jusqu’à ce que des policiers surgissent chez lui pour l’arrêter pour un meurtre qu’il aurait commis en Argentine presque trente ans plus tôt. Thomas se cache et décide de partir vers l’Espagne en vélo en suivant le canal du midi. Ses filles l’accompagnent dans cet ultime voyage. Alternent alors les chapitres narrant la cavale le long du canal où le calme, la sérénité, la beauté paisible de l’environnement propices aux confidences et ceux revenant sur le passé de la famille et la recherche de la vérité sur des événements ayant bouleversé à jamais la vie des hommes les ayant vécus. Le contraste des ambiances de ces deux récits renforce l’attachement du lecteur à cette destinée tragique.
Premier roman
« La peur ne s’apprend pas et respirer non plus, pourtant on sait faire »
« Il faut être très orgueilleux ou très naïf ou très bête pour croire qu’on choisit sa vie. On fait comme on peut avec ce qui nous arrive. - Tu as quand même choisi de te battre contre une dictature. - Bien sûr que non. Les circonstances vous font, d’abord et avant tout. Nous on ne fait que réagir. »
Fiche #270
Thème(s) : Littérature française
La Bretagne hors-saison est calme. Pont-Croix près de Douarnenez n’échappe pas à cette quiétude alors que Cochise Datier s’installe dans un hôtel de la côte. Retour aux sources ? Pas sûr... Il a un revolver dans son sac et des souvenirs de sa femme disparue dans la tête. Il s’en va à la recherche d’un ami du passé pour une rencontre ou pour une vengeance ? Il vous faudra patienter pour le découvrir !
« Je t’aime, dit-elle, à travers les bruits gentils de la neige crissant sous elle. Il la crut. Pour le malheur caché sous l’enchantement, il la crut. C’était donc ça, venu au monde. »
Fiche #271
Thème(s) : Littérature française
Quels liens existent entre (dans le désordre) : l’épopée d’Alain Bombard, la naissance de la télévision, les Dinky Toys et les Norev, le deuxième sexe, Diên Biên Phu, l’hivers 54, l’apparition du premier bikini, Mendès France, les vingt-quatre heures du Mans, Poujade, les spoutniks, le premier pas sur la lune... Tous ces événements ou personnalités ont accompagné la vie des personnes nées dans les années 50. Comme Gérard de Cortanze enfant qui se raconte de sa naissance (1948) jusqu’aux années 1964 et rappelle dans un style très vivant tous les événements qui lui ont permis de se construire. Fils d’immigrés italiens dont l’installation dans la France d’après guerre ne sera pas simple, Gérard de Cortanze nous fait part de leurs vies, leurs discussions et débats, des événements qui l’ont marqués. Un retour agréable dans notre passé proche qui permet aussi de mieux appréhender notre monde actuel.
« J’ai toujours écrit, seule manière de retrouver mon identité perdue. C’est cela l’écriture : l’île des îles, celle qui comble tous les manques, répare toutes les failles autobiographiques. L’écriture est ce qui sauve, ce qui permet un retour aux origines, non pas en se reniant soi-même, comme je l’ai longtemps pensé, mais en se reconnaissant. »
Fiche #272
Thème(s) : Littérature française
Jean-Victor Assalti est diplômé de l’Ecole, pépinière de gagnants. Ces jeunes diplômés sont persuadés de leur supériorité et de leur réussite future, ils sont les Dominants. Pendant un an, Jean-Victor travaille chez Eurocom et est promis à un bel avenir. C’est sans compter avec les effets collatéraux du 11 septembre : Eurocom a quelques difficultés et il est licencié. Catastrophe pour un Dominant surtout que les offres d’emploi ne se bousculent pas. Il devient le canard boiteux du clan des Dominants et s’enfonce dans son désespoir. Suite à une plaisanterie d’un membre du clan, il s’inscrit à un casting pour un nouveau jeu télé. Après sa qualification, il rejoint le camp des Dominés et sa participation devient sa préoccupation principale. Même ses amis dominants l’épaulent et s’intéressent à son aventure. Il se promet de gagner et de marquer l’histoire du jeu grâce à une chute pleine de panache ! Les accros des jeux TV vont se régaler !
Premier roman
Fiche #273
Thème(s) : Littérature française
Julien Letrouvé marche sans fin. Enfant abandonné de la fin du XVIIIème, il est colporteur de livres lui qui ne sait pas lire. Il adore les livres plus que tout et ils lui rappellent les deux rencontres qui marqueront à jamais et définitivement sa vie. La première est la femme qui lit les livres. Au fond d’une écreigne, sous terre, dans un monde de femmes où il est le seul admis, elle fait la lecture aux fileuses. A 15 ans, devenu homme, il doit quitter ce monde et part sur les routes pour proposer à d’autres les petits livres bleus. Du côté de Valmy, il fera la seconde rencontre qui marquera son destin en la personne d’un Prussien déserteur avec qui il partagera tout lors de leur cheminement commun : son histoire, sa passion des livres. Ils n’auront plus de secrets l’un pour l’autre et leur séparation tragique marquera la fin de son errance. Une vraie écriture pour cette belle histoire.
« Il avait abandonné un corps multiple et prestigieux de l’armée du roi de Prusse pour un corps individuel mais qu’il n’avait toujours pas rejoint sous sa défroque, sous l’apparence en laquelle lui-même ne se fût pas reconnu s’il l’avait croisée dans sa propre fuite. »
Fiche #274
Thème(s) : Littérature française
Sisco d’origine italienne et journaliste à Gap rencontre par hasard en marge de la Mostra de Venise le grand cinéaste grec Xerkès. De leur discussion impromptue naîtra une collaboration. Après son échec à la Mostra, Xerkès engage Sisco comme scénariste de son prochain film. En effet, il se dit passionné par les travaux de Sisco sur Mandrin. Mais l’ambition de Xerkès cinéaste insaisissable est plus vaste : il veut rendre compte du monde, de ses folies, de ses violences, de son obscénité, des désespérantes similitudes entre le passé et le présent (« Contrairement à ce que tu penses, les peuples n’apprennent rien du passé, ils pataugent en rond dans la même gadoue, s’embarquent dans les mêmes galères, l’histoire des civilisations n’est pas linéaire ». S’agit-il d’un projet vain : « Personne n’avait trouvé la bonne façon de rendre compte du monde. ». Les deux hommes se heurteront devant leurs approches différentes de l'écrit, du cinéma, du rôle du cinéaste (« Quand je m’approche, caméra à l’épaule, de la détresse des faibles, à N’Djamena ou à Embrun, je ne la provoque pas, je décide de l’enregistrer, même si elle me renvoie à l’illisibilité du monde »), de la vie tout simplement mais ils resteront liés jusqu’au dénouement. Le tournage débute dans une chapelle près d’Embrun mais Xerkès emmène souvent aux risques de leur vie sa troupe hétéroclite dans les lieux du monde où la barbarie règne : une troupe de saltimbanques polyvalents, une serveuse fine psychologue amoureuse du présent sans regard pour le passé et le futur, une photographe chilienne à l’affût du cliché clé de son existence. Calme et violence alternent et renforcent l’ambiance quelque peu désespérée de ce récit : tragédie d’un cinéaste, tragédie humaine ou tragédie récurrente de l’Homme ?
« L’obscénité ne vient pas du sujet qui se dévoile mais de l’intention de ceux qui le regardent »
« Mon grand-père de l’Argentière me racontait que pour comprendre le monde, il fallait s’asseoir sur son cul et admirer le ciel, plutôt que d’enfiler ses bottes pour aller le maudire. »
Fiche #275
Thème(s) : Littérature française
Reprenant les thèmes universels et intemporels de la passion impossible et de la séparation, Metin Arditi nous convie à suivre la famille Louganis : les frères Spiros et Nikos ont respectivement une fille Pavlina et un fils Aris et viennent de mourir sur leur bateau. Après ce double décès à Spetses (île grecque), seuls le prêtre et la mère de Pavlina connaissent la vérité : Pavlina et Aris ont le même père. Pavlina grandit, devient belle, nageuse aguerrie, elle travaille avec son cousin qui à son grand désespoir préfère les garçons. A la suite de déceptions amoureuses d’Aris, ils font l’amour. Elle se retrouve enceinte alors qu’Aris disparaît tragiquement. Comme une malédiction, tous les hommes disparaissent autour d’elle dans cette île : son père, ses frères, son amant. Sa mère soutenue par le prêtre oblige Pavlina à partir pour Athènes et à abandonner sa fille tout en la coupant définitivement de son passé et de son île. Aussitôt, elle n’aura de cesse de la retrouver. Cette obsession ne la quittera jamais et malgré les amitiés, les soutiens, les rencontres, cette quête la laissera toujours plus désespérée. Jusqu’au jour où, à Genève, elle rencontre une jeune fille qui pourrait être sa fille : âge, physique, couleur des yeux, même facilité à nager et sans mère depuis son plus jeune âge. Tout concorde. Sa quête est-elle enfin achevée et pourra-t-elle profiter pleinement de sa fille retrouvée ? Metin Arditi signe un roman touchant et émouvant et cette Isis moderne ne laissera pas le lecteur indifférent.
Fiche #276
Thème(s) : Littérature étrangère
Il est gardien de musée et peint à ses heures perdues dans une petite ville des rives de la Loire proche d’une centrale nucléaire. Un jour, Elle franchit les portes du musée. Elle est partie depuis plus de vingt ans mais il la reconnaît immédiatement. Marie-Hélène, enfant, venait chez sa tante au château de la Boulaye. Elle était différente, se liait à tous et à personne. Les souvenirs inondent sa mémoire sans effort. Pourquoi ce retour tardif ? Le soir, sous une pluie battante, il passe devant le château encore éclairé et le lendemain, elle est retrouvée assassinée. L’enquêteur ami du peintre découvre qu’elle avait déjeuné avec un ingénieur de la centrale le midi, un long repas... Une ambiance sombre et étrange à la Chabrol...
« On n’a pas tellement de temps dans une vie. Je voyais la fille devant moi dans cette salle de musée, et c’était ce que je pensais : on a si peu de temps dans une vie. Un jour, on se regarde dans une glace, et on se dit : voilà, voilà. On n’a même pas de mots pour le dire. »
Fiche #277
Thème(s) : Littérature française
Un récit qui nous fait traverser l’Europe, de la Bohème à la France, de 1930 à nos jours et suivre l’épopée de Zoli dès l’âge de 6 ans. Elle échappe alors à la mort avec son grand-père Stanislaus et leur cheval Rouge. Ils sont les seuls rescapés de leur communauté tzigane que les Hlinkas (fascistes) ont interpelée. Le destin de Zoli est terrible. Le lecteur partage sa vie quotidienne : fichages par les autorités, rencontres avec les autres tziganes, vie à l’école, confrontation aux gadjé, mariage forcé... Alors que l’écriture est réservée aux anciens (« Il m’a expliqué que c’était la tradition, seuls les anciens savent lire, c’était comme ça depuis toujours, un jour tout s’éclaircirait »), Zoli se découvre des talents d’écriture qui lui permettent de faire connaître et comprendre espère-t-elle l’histoire et la culture du peuple rom. Son mari tolère cette activité qui l’amène à rencontrer Martin Stransky poète communiste qui aimerait qu’elle devienne « le parfait poète prolétarien » et Stephen Swann exilé irlandais, traducteur de Stransky, qui désire la publier envers et contre tout. Ils comprendront trop tardivement que « nous avons fait irruption dans sa solitude pour tromper la nôtre ». S. Swann la volera et la trahira pour mener à bien son projet et elle seule en subira de lourdes conséquences... Un livre émouvant et très riche par les multiples sujets évoqués : la survie d’une culture et d’une langue marginalisées, l’identité et la différence, l’exil d’une femme libre et indépendante et pourtant attachée à ses racines... Magnifique !
« J’ai gardé espoir jusqu’à la toute fin. L’espérance est une vieille habitude des roms. »
« Il voulait dire, je suppose, que plus les gens accaparaient le pouvoir, plus ils méprisaient ce qui leur avait permis d’y accéder. »
Fiche #278
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Jean-Luc Piningre
La destinée de Fumika jeune japonaise rejoint la tragédie de la seconde guerre mondiale. Obtenant une bourse pour ses qualités de pianiste, elle part aux Etats-Unis, s ‘éloigne de sa culture et s’ouvre au monde. Elle rencontre sur le campus Wolfang Steinamhirsch un jeune chercheur suisse, violoniste amateur et surtout chercheur en physique qui se spécialisera dans l’atome. Il prend part au projet et à la réalisation de la bombe atomique (« Il va être engagé dans un programme international où la science sera directement au service de la lutte contre le nazisme »). Comme bon nombre de ses concitoyens, Fumika est arrêtée comme ennemie potentielle à la nation et cantonnée dans un camp de détention. Ultime utopie, elle espère encore et toujours que Mozart et la musique sauveront le monde de son destin tragique (« La musique peut-elle nous sauver de la guerre ? »). Pourtant ses trois Mozart ne lui seront pas d’un grand secours : ni le vrai, ni un mari futur Kamikaze choisi et imposé par sa famille ancrés dans les traditions de l’Empire du levant, ni Wolfang le chercheur rencontré aux Etats-Unis qui s’enfermera dans ses convictions. Dénoncée alors qu’elle travaille dans les locaux où les scientifiques préparent la bombe, elle retournera au Japon lors d’un échange contre des prisonniers américains puis subira dans sa chair l’explosion atomique et ses conséquences. Une approche originale et passionnante de l’histoire et des errements des fous de science et de l’atome qui participèrent à l’élaboration de la machine à tuer la plus puissante et la plus terrible jusqu’à en oublier l’humain.
« L’homme qui va l’épouser n’est pas qu’un officier, il est aussi futur kamikaze. Elle va donc se marier avec un mort. Un homme pas encore au paradis, mais qui s’y prépare sur ordre de Sa Majesté Notre Empereur. Au lieu de mourir seul, M. Tsutsui veut se marier. Que sa femme le soutienne, lui offre un dernier plaisir. »
« En temps de paix, le scientifique appartient à la science, en temps de guerre, il se doit tout entier à son pays. Grâce aux gaz nous allons sauver un nombre incalculable de vies, puisque la guerre finira vite. »
« ...Les scientifiques marchent à chaque coup, quand on leur propose d’abréger la guerre en développant une arme encore plus puissante »
Fiche #279
Thème(s) : Littérature française
Un enfant parle, nous parle de son enfance, de ses doutes et de ses rêves (« Je sais pourquoi je suis tout seul : parce que je fais des rêves, parce que toujours je rêve »). Un père militaire, une mère d’humeurs variées se laissant aller parfois à quelques violences, un frère et une sœur. Deux uniques amis : Lui rencontré au judo (« Nous sommes devenus amis parce que, sinon, chacun de nous serait tout seul ») et Lionel Bréjean un élève du collège en marge. « Lui » occupe son esprit constamment, ils forment le couple indissociable du judo : uké (celui qui reçoit l’action) et tori (celui qui engage l’action). On ne sait pas véritablement si cette amitié est partagée. Dans sa quête d’identité et dans sa construction, « Lui » sera peut-être sa brique fondatrice. Il est seul, regarde les autres (« Je ne sais pourquoi les gens font semblant que tout est bien dans leur vie »), ne veut s’y mêler et n’attends pas vraiment grand chose de la vie : « Toute la nuit, je n’ai pas dormi, j’ai attendu de mourir, mais la mort n’est pas venue. Alors, quand j’ai vu la lumière du jour poindre à travers les interstices du volet, puisque je n’étais pas mort, j’ai accepté ma vie ». Un monologue émouvant d’un enfant en difficulté, ayant du mal à s’affirmer et à trouver sa personnalité et sa place dans sa famille et dans l’agora.
Premier roman
« S’ils savent mieux que moi qui je suis, je n’ai pas envie de leur dire qui je suis. Je préfère encore jouer à être celui qu’ils disent que je suis. »
Fiche #280
Thème(s) : Littérature française
José, petit garçon hypersensible, vit seul avec sa mère. Peu à peu, José se crée son univers propre, un monde réservé auquel il est le seul à avoir accès. Il déplace les mots, changent leur sens, renomme les objets, s’invente des amis qui ont l’exclusivité de sa parole. Mais ce monde se referme peu à peu sur lui, il en devient le seul acteur, le seul maître. Il ignore son entourage et sa mère se retrouve exclus. Désespérée devant ce mutisme et cette mise à l’écart, elle sombre dans l’alcoolisme. La pédopsychiatre reste impuissante ("Madame Solère n'a jamais eu d'enfant ; elle aide ceux des autres... Dis-moi José, est-ce que tu aimes faire plaisir aux autres ? Ben oui, puisque je les laisse tranquilles !"). L’hospitalisation de José ne semble pourtant pas pouvoir le ramener à la vie « réelle » . Un déclic sera-t-il possible ?
Une histoire menée avec pudeur, émotion et sensibilité sur un enfant envahi par son imaginaire.
Premier roman
Fiche #262
Thème(s) : Littérature française
Dans notre monde où le temps s’accélère, où chacun est pressé, se doit d’aller vite, de ne pas s’attarder, pourquoi ne pas aller s’asseoir dans un parc, et souffler, s’arrêter, observer, laisser son imagination courir... Contemplation... Les parcs sont des lieux particulièrement propices aux rencontres et à ces pauses dans notre vie moderne dont le rythme va toujours croissant. Un homme rencontre par hasard dans le métro de Tokyo une femme inconnue et étonnamment, lui adresse la parole à propos d’une publicité vantant les dons d’organes (la vie après la vie). Il se rend ensuite comme à son habitude dans le parc Hibiya et assis sur son banc attitré (« Moi, je m’assois sur un banc, tout simplement »), il observe les hommes, les animaux, les arbres, l’eau, le vent… la vie… Il retrouvera l’inconnue dans ce parc et chacune de leurs rencontres éclairera sa vie par sa douceur et sa quiétude et par une conversation inédite. Tout est possible dans un parc : « Mais pourquoi est-ce que tout ce monde vient au parc ? Il a médité très sérieusement, chose rare chez lui, avant de me dire nettement : ‘‘Ils se sentent soulagés’’». Un récit qui évolue par petites touches délicates, sans éclat, avec simplicité et justesse, une vision décalée de la vie quotidienne… Même au sein du mégapole, il subsiste des havres de paix où la vraie vie se cache pour qui sait prendre le temps de la détecter….
Ce livre a obtenu l’équivalent du prix Goncourt au Japon en 2002.
Fiche #261
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Gérard Siary
Lucie Hennebelle que certains lecteurs ont déjà rencontré dans « La chambre des morts » s’apprêtait à passer une soirée tranquille lorsque Manon débarqua dans sa vie. A bout de souffle, des traces de cordes aux poignets, des scarifications récentes et anciennes sur le corps. L’une d’elles annonce « Pr de retour ». Inquiétude : le Professeur il y a quelques temps a rencontré pour son plus grand malheur la sœur de Manon. Pour couronner le tout, Manon n’a pas de mémoire. Quelques instants, et elle oublie tout, absolument tout ce qui n’est pas pour faciliter la tâche de Lucie. Même les visages disparaissent de la mémoire de Manon y compris celui de Lucie. Seul son N-Tech lui permet au jour le jour de noter ses activités, ses rencontres, ses impressions... et de simuler une ébauche de mémoire. Son frère omniprésent l'épaule aussi dans cette épreuve. Pourtant Manon est une ancienne mathématicienne et conserve toutes ses capacités de raisonnement. Les victimes vont s’enchaîner les unes après les autres. Six victimes scalpées et torturées, et toujours des messages comme un problème mathématique à résoudre. Lucie est persuadée que Manon est au centre de cette énigme et que c’est par elle que l’on découvrira qui est le Professeur. Comme d'habitude chez F. Thilliez, cette enquête révèle aussi une facette de l'histoire personnelle de l'enquêteur : elle permettra ici à Lucie d'extérioriser ses démons et de tourner définitivement une page de sa vie en acceptant son passé. Encore du grand Thilliez (pour ceux qui ne l’ont pas encore découvert, si vous aimez le suspense et une intrigue oppressante et obsédante, Deuils de miel est toujours chez Vaux Livres !).
Fiche #260
Thème(s) : Littérature française Polar/Thriller/Noir
Dans ce village perdu d’Haïti « La Brésilienne », le curé breton et ses habitants tiennent à leurs cloches qui rythment la vie quotidienne des habitants. Mais un beau matin, le son des cloches disparaît. Le curé se lamente et les habitants craignent une malédiction si le son des cloches n’est pas retrouvé pour la fête patronale. Ils soupçonnent un règlement de comptes entre le maire et le député, farouches adversaires dans leur vie publique comme dans leur vie privée. Port-au-Prince envoie alors Azemar Dieu-Soit-Loué, amateur d’alcool fort et inspecteur de police intègre haut en couleur pour résoudre cette énigme embarrassante. Il entre ainsi, un peu contre son gré, dans le monde fermé des habitants de La Brésilienne, des croyances vaudoues et de leurs rites, des sociétés secrètes haïtiennes et de celles ayant pignon sur rue. Il sera confronté à l’intimité des responsables de la ville et finira, avec l’aide de son ami le tranpe (boisson à l’alcool de canne) par résoudre l’énigme. Sa vie en sera d’ailleurs bouleversée… Une belle enquête pour vous plonger dans le Haïti véritable des arrières cours.
Autre titre à découvrir : Je sais quand Dieu vient se promener dans mon jardin.
Fiche #257
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Knud né en 1960 d’un père danois et d’une mère allemande nous raconte l’histoire de sa famille, une famille pour laquelle l’héritage de la seconde guerre mondiale sera très lourd. Sa mère a une vie heureuse à Berlin où elle suit ses études lorsque la montée du nazisme la pousse à un exil forcé au Danemark (« …avant que les nazis ne mettent fin à sa vie. ») et dès lors, la mort ne la quittera plus. Knud montre le mépris, la haine et les humiliations que les Danois font subir à ce couple mixte (allemande-danois). Unis par leur amour face à l'extérieur et replier sur eux-mêmes, Knud sera aussi mis à l’écart du couple malgré les sévices qu’il subit également à l’école notamment. Ses parents ne l’aideront pas à s’intégrer. Il ne pourra se protéger seul et restera le petit « boche », souffre-douleur des autres enfants. Les parents s’accommodent de la situation, même si on a l’impression qu’ils vivent à côté d’eux-mêmes, comme des zombies. Quant au petit, il vit dans la peur et l’horreur et restera marqué à jamais par ce quotidien. Devant cette haine constante, il croira même (à tort) que sa mère fut nazie. La seule personne dont il se sent proche est son oncle Helmut lui aussi marqué par la guerre puisque parti à 17 ans sur le front russe (« A l’âge de dix-sept ans, il avait été envoyé sur le front de l’est : il devait marcher sur Stalingrad ; deux millions de morts plus tard, après avoir retraversé en sens inverse l’hiver russe, il revint, trois orteils et l’entendement en moins… et même s’il réussit à revenir vivant au pays, il ne réussit jamais à revenir à lui-même. »). La vie de cette famille montre comment la guerre multiplie les victimes co-latérales comme on dit maintenant : sans l’avoir vécue, Knud en est aussi victime à travers la vie de ses grands-parents et de ses parents qui ne sont jamais réellement revenus de cette guerre. Réquisitoire contre la guerre, ce texte en démontre aussi sa puissance et on a même parfois l’impression que comme une bête blessée, elle est encore là, à l’affût, jamais achevée et toujours prête à se déclencher.
Fiche #258
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Elena Balzamo
Il ne vous reste plus qu'une photo à prendre
Le Dilettante
3 | 155 pages | 17-07-2007 | 15€
A l’heure du numérique, où chacun multiplie les clichés, sans limite, sans réflexion, sans but, sans analyse, sans retenue, les cinq personnages du dernier livre de l'imprévisible Laurent Graf participent à une espèce de safari ou de rallye photographique où ils devront prendre ce qui sera leur dernière photo.
Alain Neigel personnage principal a cessé de prendre des photos, a eu une vie bien remplie et accomplie. Il semble apaisé mais pourtant… « Oui j’ai bien vécu. Je pourrais en terminer là, mourir demain, je n’aurais rien à redire. Mon amour de la vie a depuis longtemps intégré la mort. Il y a une chose qui me ferait plaisir : j’aimerais être surpris ». Lors d’un voyage à Rome, un homme le prend en photo avec sa nouvelle maîtresse, et lui dit en rendant l’appareil « il ne vous reste plus qu’une photo à prendre ». Il prend l’affirmation au sérieux comme un avertissement, recherche et retrouve l’homme qui lui propose ce rallye où les participants réaliseront leur dernière photo. Cinq personnes prendront place dans un minibus et comme une dernière chance, participeront au jeu. Leurs caractères se révèleront dans cette épreuve qui finalement exposera la manière qu’ils ont d’aborder la vie, leur vie et le but qu’ils lui accordent.
Posez cette question à vos proches et observez leurs réactions. Elle engendre principalement sérieux et réflexion, l’ultimatum est lancé, comme si elle révélait notre vie, son but, sa petitesse ou sa grandeur ou sa issue fatale : « Derrière chaque photo, par-delà le plaisir et la joie, il y a la peur, peur du temps qui passe, de sa fugacité, peur de voir puis ne plus voir, vivre puis ne plus vivre, avoir vécu et n'en avoir nulle trace démonstrative, nul souvenir tangible ; derrière chaque photo, il y la peur de mourir, et la preuve de notre mort ».
« Nous vivons une époque païenne d’insouciance et de jouissance ; l’homme se croit sur terre immortel et éternel, comme immunisé, protégé par son statut suprême de créature intelligente ; la mort surprend et révolte. De même, on ne tolère pas de manquer, d’être empêché, de subir des restrictions, c’est le règne de l’illimité et du libre accès. Il ne vous reste plus qu’une photo à prendre… ».
Fiche #259
Thème(s) : Littérature française
L’histoire « d’elle » et « d’un inconnu » nous est contée par « le narrateur ». Elle, fille d’un mineur polonais décédé, est infirmière dans le nord de la France et accompagne les malades en fin de vie. L’inconnu est photographe et vient effectuer un reportage sur les anciennes mines. Ils vont se rencontrer, elle l’invitera, il la violera. Passés les sentiments de révolte et de colère, elle le recherche et devient alors attachée définitivement à lui et sexuellement dépendante (« Son absence est inhumaine. Jamais elle ne renoncera à lui, jamais »). Ils sont pourtant très différents : elle est polonaise catholique, il est juif polonais, ils sont de milieux différents, l’un est parisien, l’autre est provinciale. Le narrateur décortique méthodiquement et minutieusement les pensées et le ressenti de cette femme fascinée par l’amour et la mort. Le lecteur parfois secoué suit ses sentiments, son affolement, cette emprise avec inquiétude. La mort est omniprésente : la « petite mort », la mort de ses patients, la mort de son père… jusqu’à la fin de l’aventure de ce couple fusionnel.
« Quelle nature faut-il avoir pour supporter cette litanie de deuils ? Elle répond simplement que c’est son métier. Elle l’a appris et cherche à l’exercer du mieux possible. Soigner les malades, accompagner les mourants, c’est ça son travail. Elle fait ce qu’il y a à faire, c’est tout. La mort et la souffrance ne la fascinent pas. Si la mort lui fait peur ? elle répond que non. Elle est inévitable de toute manière, inscrite au programme de l’existence. "Lorsqu’une femme met un enfant au monde, elle le condamne" ».
Fiche #256
Thème(s) : Littérature française
Mylène LESCOMBAT
Un monde nouveau - Opération 1er avril
Editions Persée
1 | 80 pages | 13-07-2007 | 11€
Deux nouvelles pour sourire. Dans la première, le lecteur se retrouve dans un monde nouveau où les différences entre les hommes et les femmes ont tellement été gommées que bientôt il n’existera plus qu’une unique forme humaine. Les femmes ont pris le pouvoir (« Ne te laisse pas avoir par la nostalgie. Ne rêve pas d’être protégée par ton père. C’est ce genre de mirage qui a empêché l’évolution pendant si longtemps ») et les hommes ne peuvent continuer à partager quotidiennement leur vie qu’après une petite opération… Dans la seconde nouvelle, Dieu et son entourage décident de s’amuser un 1er avril en suscitant une grande farce afin de tenter de ramener ses ouailles à lui. Il s’agit de créer « des enfants farces », c’est-à-dire des enfants au caractère totalement décalé par rapport à leur famille d’accueil. Les anges sont chargés de surveiller cette opération et d'en rendre compte au chef ce qui ne sera pas si simple qu’il n’y parait !
Fiche #255
Thème(s) : Littérature française
Nouvelle consultation des comptes-rendus de lecture
Les comptes-rendus de lecture de l'année précédente (2006-2007)
Les comptes-rendus de lecture de l'année suivante (2008-2009)
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